Algérie : Périlleux exercice de Djerad devant les députés

L’information est de plus en plus insistante dans les milieux officiels. Certains médias ont même répercuté des échos sur un mois de février qui sera politiquement l’un des mois les plus intenses. On évoque déjà que le Premier ministre Abdelaziz Djerad se prépare à descendre à l’Assemblée populaire nationale dans une dizaine de jours pour présenter son bilan d’une année de gestion des affaires du pays. Il s’agirait d’une démarche qui répond aux exigences de la nouvelle constitution, dont un dispositif stipule que l’exécutif doit présenter devant les parlementaires une déclaration de politique générale.

L’exercice est périlleux pour Djerad, d’autant que son gouvernement souffre déjà non seulement d’incohérences, mais subit aussi de virulentes critiques. Des critiques que même le chef de l’État, Abdelmadjid Tebboune, n’a pas caché, avant son second départ pour l’Allemagne. D’ailleurs, des observateurs s’attendent à des décisions majeures dès son retour de convalescence, en acceptant d’abord la démission de son gouvernement et la nomination d’un autre cabinet “politique” plus porté sur les réformes en profondeur et engagé dans une stratégie de changement.

Il faut dire que Djerad aura du mal à convaincre les députés sur l’efficacité de son gouvernement et sa bonne conduite, même si certaines raisons objectives, comme la crise sanitaire, ont perturbé son programme pompeusement annoncé en janvier 2020. En plus de quelques erreurs de casting, de profils trop technocratiques, rigides ou figés sur les procédures, voire même de ministres très poussés sur la démagogie et les discours populistes, ce gouvernement a surtout péché par des insuffisances criardes dans la gestion de certains secteurs. On s’en souvient des cacophonies liées à la gestion de la crise sanitaire, aux différentes dissonances dans l’approche face à des phénomènes pourtant récurrents. Comme les pannes d’électricité et d’eau potable en pleine saison estivale, les coupures d’Internet, les manques de liquidités au niveau des agences postales, les chaotiques vols de rapatriement de nos compatriotes bloqués à l’étranger. Face aux ratages, on s’est recroquevillé dans des explications farfelues, comme celles de la conspiration et la main étrangère.

Mais, le plus grave dans cette année presque blanche, reste sans doute l’échec du gouvernement de Djerad à faire face à la crise économique et sociale. Le tableau est noir: glissement dangereux de la monnaie nationale, dérives inflationnistes, forte spéculation sur les produits de première nécessité, montée exponentielle du chômage, faillite des entreprises. Le déficit budgétaire atteint des seuils inquiétants, alors que les investissements locaux ou étrangers sont au point mort. La croissance est négative et l’État continue de puiser dans les caisses pour assurer les transferts sociaux et faire face aux énormes besoins de la collectivité et garantir le fonctionnement du service public, comme l’éducation, l’enseignement supérieur, et la santé. De plus, la dégringolade des cours du brut a impacté lourdement les prévisions gouvernementales. Des projets sont abandonnés, d’autres remis aux calendes grecques. Les recettes pétrolières ont chuté de onze milliards de dollars, soit l’équivalent de la moitié du budget annuel consacré aux transferts sociaux.

Selon les mêmes milieux, Djerad attend le retour dans quelques jours du président de la république, avant de rejoindre l’hémicycle de l’APN. Il présentera son bilan annuel, sans doute avec des chiffres et des taux explicatifs mais il n’échappera pas aux critiques des députés de l’opposition. Ensuite, comme le veut désormais la nouvelle Constitution, il présentera la démission de son gouvernement à Tebboune, dont on dit qu’il a une idée précise sur la nouvelle équipe qui va conduire le pays vers les prochaines élections législatives et communales.

Le Jeune Indépendant, 30 jan 2021

Tags : Algérie, Abdelaziz Djerad, gouvernement, bilan,

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