Tags : Maroc, Mouvement 20 Février, Printemps Arabe, Hicham Alaoui, Ali Lmrabet, Aboubakr Jamaï,
Dans cet email envoyé par Mourad El Ghoul à l’attention d’Ahmed Charai, le texte d’un article publié et ensuite effacé par l’Observateur du Maroc. Une copie est joignable sur le site Maghress et dont voici le lien :
http://www.maghress.com/fr/lobservateur/3516
Le gouvernement du 21 février Une transition fleurie
Le Souverain a donné des signes majeurs de changement. Des signes certains. Le gouvernement de transition qu’il a mis en place ravale les démocraties arabes musulmanes, africaines, hébraïques, andalouses, amazighes et indo-européennes au rang de brouillons de gouvernance hésitants et approximatifs. Jugez-en !
Au Palais Royal, Moulay Hicham fait une entrée remarquable en qualité de vice-roi du Maroc. L’exigence révolutionnaire a cédé le pas devant les avantages révolutionnaires. «Un tiens vaut mieux que deux tu l’auras» a effacé le contrat familial négocié.
Au Secrétariat particulier de Sa Majesté le Roi, Ali Amar rassure. Les milieux d’affaires sont heureux car ils connaissent bien cet homme qui a souvent «volé» de ses propres ailes. Il donnera, certainement, à la prédation, thème cher au mouvement des jeunes, son vrai contenu.
Personne, dans ce contexte de transition, n’a trouvé incongru qu’Aboubakr Jamaï soit nommé Premier ministre. Celui qui a toujours donné au régime 24 heures de survie avant l’écroulement général aura pour mission historique de doubler son espérance de vie. Tout son être, ses talents multiples – n’exagérons rien -, ses relations diverses font de lui la personne idoine pour relever ce défi historique. Les primates du makhzen tremblent…
La nomination aux Affaires étrangères d’Ali Lamrabet, par contre, n’a fait couler aucune goutte d’encre. Les stylos étaient à sec. C’est le tajine qui a trouvé son couvercle. L’analyse, l’anticipation, les réseaux, la stratégie, l’élégance, l’éloquence, le charisme, le sens de l’éthique, etc., il a tout pour lui.
Le ministère des Habous et des Affaires religieuses a échu, sans débat, et pourquoi donc débattre, à Abdeslam Yassine. Il en a rêvé, il l’a obtenu. L’apôtre de l’islam tolérant, ouvert et pacifique écrira certainement un nouveau chapitre du livre de l’Alliance des civilisations. Le stratégique ministère de l’Intérieur a, lui, été confié à Khalid Jamaï, le père consentant du Premier ministre. Il connaît ce département du temps où il essayait de ramollir les années de plomb en offrant ses conseils bénévoles aux différents ministres en exercice, mais cela sa biographie officielle ne le dit pas ou plus. Cet ex-spécialiste du nouveau régime se reconvertira toujours avec autant de bonheur, et d’acharnement surtout, dans la transition du futur régime.
Karim Tazi, le militant du taux zéro de la TVA, de l’abolition de l’IS et l’IGR et de la dissolution immédiate des syndicats et de l’Administration des Douanes hérite du ministère des Finances. Il propose un programme de relance. Il est d’ores et déjà assuré du soutien de la bourse de Casablanca et de toutes les fédérations unies de la CGEM. A sa nomination ils ont entonné tous le célèbre chant patronal : «Il est des nôtres…», chant historique de ralliement de la Confédération quand elle a de la visibilité. Il a promis de fêter l’adoption de la première loi de Finances du nouveau règne sur son yacht.
Fouad Abdelmoumni, qui croit tout ce qu’on lui raconte du moment que ça peut irriguer son égo gauchisant, donnera au ministère de la Justice et des Droits de l’homme toute la mesure de son talent. Il a juré de renvoyer au bagne tous les juges qui refusent de devenir indépendants. Il a le soutien unanime de tous les greffiers, de tous les substituts et de tous les ersatz. Il a promis à sa fille qui fait des études en France de se venger de ceux qui ont égaré son passeport.
Le ministère de la Culture a récupéré une grosse pointure. Un homme d’art et de culture. Le surenchérisseur unique. Le prince des ventes publiques. Tableaux, verres de cristal, statuettes, carafes, vaisselle, rien n’échappe à sa vaste culture. Fadel Iraqi est une chance pour le Royaume. Un chineur à la tête d’un département vital : la mémoire, la boîte noire et la boîte à bijoux du Royaume. Les musées nationaux seront administrés à coup sûr. Gare à vos bibelots !
Mounir Remmache a pris le portefeuille de l’Agriculture. Après le Maroc vert, voici le Maroc qui fume. Son projet de remplacement à grande échelle des cultures maraîchères et des cultures céréalières par la culture du cannabis a beaucoup plu à Bruxelles. Peut-être un peu plus à Amsterdam, tout de même. La mise en place d’une industrie nationale lourde sur les bases de la transformation du chanvre indien intéresse beaucoup l’OMS et les Nations Unies. Et en passant, les conseils de gouvernement vont changer d’odeur !
C’est tout naturellement qu’Ali Anouzla a pris le portefeuille de la Communication avec en prime le poste de porte-parole du gouvernement. Son expérience électronique et son sens aigu de l’éthique ont fait la différence. Il propose l’abrogation du code de la presse, du code pénal, du code du commerce, du code de la route, du code postal, du code share, etc. Là où il y a un code, Ali Anouzla abroge. Toutefois on a appris de source sûre que le code de son coffre-fort ne sera pas touché par cette mesure.
Zineb El Rhazoui, au ministère de la Condition féminine, promet de lancer des déjeuners citoyens pendant le mois de ramadan. Avant la rupture du jeûne naturellement. Au nom des sacrifices que nécessite la transition, M. Abdeslam Yassine, ministre des Habous, a promis de participer activement à ces déjeuners.
Nadia Yassine récupère le ministère de l’Education nationale. Elle saura y insuffler une culture aussi vaste qu’universelle. La théoricienne de l’Etat civil résoudra bien évidemment tous les problèmes qui se posent à notre identité. Elle a déjà un problème à résoudre, retrouver le malin qui a posté ses images en compagnie de son copain en Grèce. L’Intérieur a promis son aide.
Au ministère de la Jeunesse et des Sports, Oussama Lakhlifi, montrera, s’il arrête de fumer, cela va de soi, qu’il a du souffle. Le leader des manifestations de jeunes a un seul écueil. C’est que désormais, il devra donner l’exemple. Pas si sûr. Quoiqu’il puisse au moins apprendre aux jeunes qu’avec un kéfieh, une barbe de puceau et un bérêt à la Che Guevara, ils peuvent se faire un nom.
Qui d’autre qu’Ahmed Benchemsi pouvait avoir le ministère de la Recherche scientifique ? Le jeune boursier de l’université de Stanford, le filleul le plus célèbre du pays, l’étudiant le plus doué des générations à venir, l’homme au micro-cravate élégant, le maître du verbe et des tréteaux, le magicien du stylo-plume est à sa place. C’est l’homme lige. Un seul bémol cependant. Moulay Hicham aurait pu également cumuler ce poste, mais comme c’est un chercheur qui cherche depuis douze ans sans trouver, il a dû céder ce portefeuille à un jeune chercheur qui promet beaucoup. Surtout d’ailleurs qu’il a lui aussi tété les mamelles du makhzen. La recherche va décoller pour de bon. Viennent ensuite une série de nominations stratégiques pour conforter la transition. Mustapha Adib, le porte parole du Comité des officiers médiatiques libérés, à l’Inspection des FAR. Hicham Bouchti, un élément international des Forces Auxiliaires, à la tête de la DGED. Mahjoub Tobji, un ex-officier en colère, au commandement de la Gendarmerie Royale. Le mouvement philanthropique Ansar El Mahdi place Tarik Abderrahim, un ex-officier de police égaré, comme patron de la DGSN. Le tableau est donc complet. Ce gouvernement marocain de transition est à l’image d’une composition florale raffinée impressionniste. Un jardin des délices en pointillé. Un printemps arabe des sens en pastel. Avec ce gouvernement, l’avenir sera, à n’en pas douter, radieux. Définitivement. Le gouvernement provisoire est là, il faudra donc faire avec. Seule crainte et non des moindres, le provisoire risque de durer longtemps. Très, très longtemps. Mais au moins on peut être rassuré. Le spermatozoïde qui devait féconder l’œuf pour donner ce gouvernement s’est égaré, semble-t-il en chemin. Enfin, bonne journée et sachez que vous l’avez échappé belle.