Au lendemain de la remise de son rapport sur les questions mémorielles liées à la colonisation au président français, Benjamin Stora s’est exprimé sur les ondes de la radio Europe 1, pour défendre les conclusions auxquelles il est arrivé, après plusieurs mois de travail et répondre en même temps aux critiques soulevées, en France comme en Algérie, par sa série de recommandations. Pour lui, les avis « irrités » suscités par son rapport sont le fait de « personnes qui vivent d’une rente mémorielle », soutenant que « cette rente mémorielle », qui, selon lui, « sert à construire une politique, une clientèle politique et sociale, devrait être retirée. D’après lui, « il faut en finir avec ça, parce qu’on a beaucoup de défis à affronter dans le futur avec l’Algérie », citant la question du terrorisme notamment et de l’immigration notamment.
Selon l’historien français, « on ne peut pas continuer à avoir des relations avec un pays sans aborder ces questions-là, ce n’est pas possible. Il faut avancer », a-t-il estimé. Il a indiqué que ces mémoires illustrant « deux visions radicalisées » de part et d’autre de la Méditerranée constituent un obstacle devant la réconciliation et l’apaisement. En conséquence, il a plaidé pour une « troisième voie » portée par Albert Camus, auteur de la célèbre expression « je crois à la justice, mais je défendrai ma mère avant la justice ».
L’approche défendue par l’historien est improbable dans un contexte marqué d’un côté par le refus de l’idée même de la repentance par l’Elysée, et de l’autre par l’accueil mitigé réservé aux « actes symboliques », comme l’entrée de l’avocate anticolonialiste Gisèle Halimi, décédée le 28 juillet 2020, au Panthéon. Anticipant sur les positions algériennes, officielles notamment, Benjamin Stora a fait remarquer qu’il n’y a pas eu de rejet, et qu’à ce stade de la réflexion, « c’est quand même assez nouveau, même ce silence signifie qu’il y a quand même des interrogations qui existent au niveau de l’Etat algérien sur la façon d’engager un dialogue important avec la France ».
En insistant sur le fait que ses propositions n’ont pas provoqué de rejet de la part des Algériens, il n’a pas estimé utile d’accorder la moindre importance aux réactions de la population algérienne, qui ont enflammé les réseaux sociaux. Exit, les génocides, la torture systématisée et les déplacements forcés. Quoi qu’il en soit, l’opinion publique nationale attend toujours la réaction d’Abdelmadjid Chikhi, chargé par Abdelmadjid Tebboune pour rétablir la vérité sur la période coloniale conjointement avec l’historien français, Benjamin Stora.
Mohamed M.
L’Est Républicain, 23 jan 2021
Tags : Algérie, France, Mémoire, colonisation, répentance,
Be the first to comment