Le 9 janvier est un anniversaire spécial que je ne peux jamais oublier. Il y a exactement 45 ans, j’ai été kidnappé par la sécurité politique marocaine et j’ai passé cette nuit au siège de la police de Rabat à être torturé sans relâche. Je me souviens encore du visage du bourreau en chef; c’était le tristement célèbre M. Kholti. J’ai appris plus tard qu’il avait torturé des dizaines d’activistes dans les années 1970.
Plus tard, j’ai été transféré dans un centre de détention secret à Casablanca, Derb Moulay Chrif, et maintenu pendant de nombreux mois les menottes et les yeux bandés tout le temps. Ici, le tortionnaire en chef était le célèbre Yousfi Kadour que j’ai identifié plus tard et exposé aux journalistes au milieu des années 1990 lorsque, à ma grande horreur, je l’ai repéré au siège de l’ONU à Genève dans le cadre d’une délégation officielle du gouvernement pour présenter un rapport au Comité des Nations Unies sur la torture. déclarant que le Maroc était pleinement conforme aux normes internationales.
J’ai été détenu pendant 8 ans en raison de mon opposition pacifique à un régime despotique et pour avoir rêvé de justice et de liberté. Mon père est mort alors que j’étais en prison et les autorités ne m’ont pas permis de le voir une dernière fois et d’assister à son enterrement.
Après ma libération, j’ai été continuellement harcelée et de nouveau arrêtée à la suite des massacres que l’armée a commis dans le nord du Maroc en janvier 1984 lorsque les gens se sont rebellés contre le gouvernement. J’ai dû alors fuir secrètement le pays dans un bateau de pêche et j’ai commencé mon long voyage de 20 ans en exil. Ma mère est morte quand j’étais en exil. Je ne l’avais pas vue depuis cinq ans car elle était trop frêle pour venir me rendre visite à New York.
Bien que le prix de mon activisme ait été très élevé, je n’ai aucun regret. Je suis fier qu’avec d’autres militants engagés, je me suis opposé à la tyrannie et j’ai contribué de manière très modeste à notre lutte pour un changement démocratique.
Beaucoup de mes compagnons d’opinion sont morts sans voir le véritable changement politique auquel nous aspirions. Cependant, nombre de nos tortionnaires sont toujours en vie et profitent de leur retraite et bénéficient de la protection du gouvernement et d’une impunité honteuse. Bien que des progrès aient été réalisés, je suis consterné qu’après 45 ans de la nuit terrible où j’ai été arrêté pour la première fois, il reste encore des prisonniers d’opinion au Maroc. Certains de ceux qui ont manifesté pacifiquement dans la région du Rif pour de meilleurs services gouvernementaux en matière de santé et d’éducation ont été condamnés à 20 ans de prison. Il est honteux que des jeunes manifestants pacifiques soient emprisonnés alors que nos tortionnaires restent libres. C’est inexcusable. Ça doit finir. C’est une insulte continue à tous ceux qui se sont battus et à ceux qui ont sacrifié leur vie pour la liberté au Maroc.
Source : Facebook, 9 jan 2021
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