Cette année, pour la commémoration de la mort de feu le président Houari Boumediène, l’accent est mis sur son action déterminante en faveur des mouvements de libération nationale, l’occasion de réaffirmer le soutien indéfectible de l’Algérie et son peuple aux causes justes du combat libérateur des peuples palestinien et sahraoui.
Le choix de ce thème est d’autant plus opportun que deux révolutions qu’il avait particulièrement à cœur, le combat du peuple sahraoui pour sa liberté et son indépendance et celui du peuple palestinien pour l’aboutissement du fait national palestinien et l’édification d’un État avec Al Quods pour capitale sont d’une actualité brûlante.
Sahraouis et Palestiniens se retrouvent dans la même tranchée face à la trahison de régimes, à l’image de la monarchie marocaine qui n’a cessé depuis Hassan II de trahir la nation arabe en agent patenté du sionisme .
Si au lendemain de l’indépendance de l’Algérie on voit accourir à Alger de nombreux révolutionnaires pour en faire leur base arrière , Alger devenant selon la belle formule du leader du PAIGC , Amilcar Cabral la « Mecque des révolutionnaires », le président Boumediene va élargir le soutien de l’Algérie au mouvement de libération mondiale jusqu’ au Black Panther américain et aux mouvements révolutionnaires des trois continents.
L’action du président Boumediène , nourri des théories de Frantz fanon , de Mao Tse Toung de Fidel Castro qui fera une visite triomphale à Alger en 1972 , est consacrée en septembre 1973, par la réussite de la conférence des » Non-alignés « , où plus de soixante-dix chefs d’État – une assemblée, à ce niveau, sans précédent- sont présents à Alger . S’ensuivit aux Nations unies l’Assemblée extraordinaire convoquée à sa demande et consacrée aux rapports entre les États industrialisés et ceux qui doivent compter sur la vente de leurs matières premières pour leur développement .
D’un autre côté, un soutien politique et matériel est accordé aux mouvements de libération d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine et c’est en véritable leader du Tiers-Monde en lutte pour un ordre équitable entre les nations du Nord et du Sud, que notre pays s’est investi au nom du droit des peuples à l’indépendance et aux côtés des opprimés . Le soutien inconditionnel de l’Algérie à toutes les causes justes de par le monde sera inconditionnel, et notre pays mettra un point d’honneur à ne s’ingérer d’aucune façon dans la prise de décisions des mouvements de libération. l’Algérie participe à la libération des peuples opprimés, notamment en Afrique et en Palestine occupée, et les révolutions mozambicaine , angolaise et sud-africaine pour ne citer que celles-là sont alimentées en moyens militaires par l’Algérie qui a aussi créé des centres d’entraînement pour former au combat des militants africains indépendantistes, tel le regretté Samora Machel, chef du Front de libération du Mozambique (FRELIMO). Aujourd’hui, l’Algérie fidèle à ses principes d’aide et soutien aux causes justes, est aux côtés de deux peuples qui subissent le joug de l’oppression coloniale au Sahara occidental et en Palestine L’Algérie a défendu et défend le droit des Palestiniens dans tous les forums internationaux, une position saluée et qui traduit la fidélité à la voie tracée par le président Boumediène. Tout comme elle défend la cause du peuple sahraoui qui affronte un néocolonialisme d’arrière -garde appuyé par Israël et le sionisme international.
L’ambassadeur de la République arabe sahraouie démocratique à Alger, Abdelkader Taleb Omar, soulignant l’engagement jamais démenti de Houari Boumediène en faveur des peuples opprimés, souligne que son action alliait la théorie à la pratique, avec une vision claire des relations internationales, plaidant pour un nouvel ordre économique mondial et soutenant sans réserve les mouvements de libération. Le diplomate sahraoui rappelle qu’en 1975 l’Algérie avait recueilli les Sahraouis victimes de la féroce répression marocaine, spoliant le territoire sahraoui; tout comme il appuiera la proclamation de la RASD, devenue membre fondateur de l’Union africaine et engrangeant les succès diplomatiques en dépit de l’appui du sionisme mondial et des errements d’un Donald Trump défait électoralement et manipulé par Israël. Pour Taleb Omar, le combat du peuple sahraoui contre le Maroc à permis de dévoiler au grand jour la vraie nature du Makhzen et son rôle dangereux dans la région du Maghreb.
M. Bendib
Un homme d’État affirmé
Dictateur éclairé pour certains, homme d’État affirmé pour d’autres, le défunt Houari Boumediene ne laissait personne indifférent. Tous s’accordaient à reconnaitre à l’homme son charisme et surtout son esprit visionnaire qui lui avait permis de donner à l’Algérie une stature de pays réellement engagé sur la voie du développement. Intronisé président du Conseil de la révolution au lendemain du sursaut révolutionnaire du 19 juin 1965, il avait fait du développement rural l’outil pour garantir d’autosuffisance alimentaire, des hydrocarbures le moyen de financer ses programmes de développement et de l’industrie le moyen de réduire la dépendance à la dictature du camp occidental. Aussi intransigeant qu’il était, Boumediene savait écoutait. Ses rencontres avec les étudiants sont encore aujourd’hui un souvenir encore bien ancré dans l’esprit des jeunes de l’époque aujourd’hui septuagénaires. Ils sont même une référence pour toute une génération d’algériens. Ses causeries lui avaient permis de gagner les étudiants et les jeunes à sa cause et les faire adhérer, via des comités à la mise en oeuvre de la révolution agraire et les villages agricoles inscrits dans le sillage de cette dynamique. Cette révolution avait permis de limiter l’exode rural en créant les conditions de vie meilleures pour les agriculteurs restés au contact de leurs terres. Mieux encore et malgré les nombreuses critiques qu’on pouvait formuler à l’encontre de cette politique, il faut reconnaitre qu’elle avait permis au pays de limiter certaines importations de produits alimentaires et même de développer certaines filières agricoles à l’instar de l’aviculture entre autres. La politique de l’industrie industrialisante, pensée par Boumediene et mise en œuvre par Belaïd Abdeslam, avait permis de doter le pays de grands complexes industriels à l’image d’El-hadjar, les usines de montage d’équipements électroniques ou encore les raffineries implantées à Arzew et Hassi Messaoud. C’était l’époque des usines clé en main qui avait même permis au pays d’exporter certains de ses produits. Sur le plan diplomatique, la grande victoire de Boumediene est l’accord de paix entre l’Irak et l’Iran en 1973, le sommet des pays Non alignés organisé au Club des pins à Alger (1973)ou encore la création du front du refus après les accords de Camp David (17 septembre 1978) et la normalisation des relations entre l’Egypte et l’entité sioniste, et qui comptait cinq pays (Algérie, Irak, Syrie, Libye, la Mauritanie et l’OLP).
D’ailleurs on raconte qu’il aurait fait l’objet d’un attentat lors d’une conférence de presse organisée à la fin du sommet de Damas, en utilisant un rayon produit par le flash d’un appareil photo. Aussi farfelue soit cette thèse, ll faut dire que ce fut la dernière sortie du président Boumediene à l’étranger. Il fut l’architecte de l’embargo pétrolier décrété en 1973 par l’OPAEP, contre certains pays qui soutenaient Israël. L’histoire retiendra que lors de la guerre du 6 juin 1973 (Youm Kippour), qui avait permis à l’armée égyptienne de franchir le canal de Suez et de libérer des territoires dans le Sinaï occupé, il s’était rendu en URSS, pour demander aux responsables soviétiques de fournir des armes à l’Egypte ? Il avait même proposé de financer ces achats grâce au budget du deuxième plan quadriennal de développement. Sur le plan politique, les algériens retiendront les grands débats populaires organisés à l’occasion de l’adoption de la charte nationale et la première constitution en 1976. Malgré l’étau de l’ex-SM (sécurité militaire), les débats ont été empreints de démocratie et de liberté sur instruction du président Boumediene qui voulait un véritable débat libre et inclusif.
Sa mort a poussé de nombreux pans de la société dans une tristesse qui reste encore vivace dans les esprits. Ses funérailles furent un véritable moment de communion entre le peuple et l’esprit du défunt dont la pensée et l’œuvre furent l’objet de conférences, annuelles organisées par l’UNJA, mais qui n’ont jamais pu traduire comme il se doit sa philosophie. L’Algérie toute entière l’avait pleuré. Sa disparition n’a pas ébranlé uniquement les algériens mais tous les mouvements de lutte. Le front du refus qui devait servir de socle pour opposer une véritable opposition à la dynamique de normalisation des pays arabes avec l’entité sioniste, s’est effondré quelques mois plus tard, l’Irak et l’Iran avaient repris la guerre et les mouvements de libération se sont retrouvés orphelins.
Slimane Ben
Le Courrier d’Algérie, 28 déc 2020
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