Par Mohamed K.
La guerre au Sahara occidental semble s’inscrire dans la durée. Déclarée zone de guerre et l’annonce de la fin du cessez-le-feu, le territoire sahraoui et toute les régions limitrophes vivent dans une tension extrême. Les combats font rage sur au moins trois positions le long du mur des sables, qui sépare le territoire sahraoui occupé par le Maroc et les zones contrôlées par l’armée sahraouie.
Dans la région de Guerguerat, à l’extrême sud, non loin de la ville La Guerra, on a observé une forte concentration de troupes royales. En face, les unités avancées du Polisario se tiennent sur le qui-vive. Cette région est considérée comme l’une des plus dangereuses, en raison d’une forte densité de mines implantées par les marocains durant les années quatre-vingts, bien avant l’accord du cessez-le-feu et juste après le retrait des forces mauritaniennes des zones qu’elles occupaient en vertu de l’accord de partage de Madrid en 1975. Depuis le début de l’agression marocaine sur des populations civiles sahraouies qui campaient dans cette zone tampon, Nouakchott a décidé de renforcer le contrôle à ses frontières.
Des troupes ont été envoyées sur place, des barrages et des check points ont été dressés sur les voies qui mènent vers Nouadhibou, principal port et poumon économique de la Mauritanie. Selon des informations relayées par des sites spécialisés, l’espace aérien du Sahara occidental sera certainement fermé au trafic, en raison d’une forte menace. Des compagnies aériennes sont résolues à changer de couloirs dans leurs dessertes entre des aéroports européens et ceux de l’Afrique de l’ouest, notamment sénégalais, gambiens, guinéens et cap-verdiens.
Alors que Rabat a imposé le black-out total sur les informations militaires et notamment les annonces sur des décès de militaires, voire de blessés évacués vers des hôpitaux au nord, le Front Polisario continue de diffuser des communiqués sur l’évolution de la guerre. Ainsi, pour le dix-huitième jour consécutif, les cantonnements de l’armée marocaine sont régulièrement ciblés par des tirs intenses. Les forces d’occupation, acculées et sur la défensive, maintiennent difficilement leurs positions.
La défense sahraouie a souligné, dans son communiqué n18 que “les unités avancées de l’Armée de libération ont bombardé à deux reprises ce lundi des sites dans le secteur de Smara, et ont visé la zone de Ross Sbti dans la région de Mahbes”. Des unités de l’armée de libération sahraouie ont mené des bombardements contre la zone de Kalb Enous dans le secteur de Awsard.
Sur le plan politique, des observateurs s’étonnent du silence alarmant des Nations-Unies, qui continuent de refuser de prendre des résolutions claires et nettes sur la question et prendre des sanctions après les récentes violations marocaines de l’accord de cessez-le-feu de 1991.
La journaliste Gabrielle Lefèvre, spécialiste de la question sahraouie a expliqué, dans un article intitulé “Sahara Occidental : les armes ou la diplomatie ?”, publié dans le site d’information, “Entre Les Lignes”, que la route de Guerguerat ainsi créée permet de faire passer vers la Mauritanie et le reste de l’Afrique les camions chargés des ressources pillées en territoires occupés. Déjà lorsqu’en mars 2001 l’armée marocaine a tenté de construire une route goudronnée à travers la zone tampon d’El-Guerguerat vers la frontière entre le Sahara occidental et la Mauritanie, l’ONU avertit le Maroc que “la construction envisagée posait des problèmes délicats et que certaines des activités entreprises pourraient contrevenir l’accord de cessez-le-feu”, rappelle la journaliste. L’ONU n’a alors soulevé aucune question concernant le “trafic commercial ou civil” dans la région. Gabrielle Lefèvre a également déploré dans son article, le fait que “le Maroc a tout fait pour empêcher ce processus d’autodétermination, annexant par la force la plus grande partie du territoire sahraoui, érigeant un mur totalement miné, réduisant la population sahraouie à un statut de réfugiée dans son propre territoire et en Algérie qui accueille et soutient depuis des décennies des milliers de Sahraouis aidés par l’assistance internationale”. Pendant ces années, le commerce des ressources ainsi spoliées “a contribué à l’économie marocaine exclusivement (et notamment à la fortune personnelle du roi)”, à la grande satisfaction de pays européens, a-t-elle poursuivi.
Le Jeune Indépendant, 1 déc 2020
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