par Tarek Hafid
Depuis plusieurs semaines, les alliés du Maroc appuient le droit de ce pays de jouir du «passage frontalier» de Guerguerat et de permettre le transit de marchandises marocaines des territoires sahraouis occupés vers la Mauritanie. Sauf que ce «passage» est une brèche illégale ouverte dans le mur de «défense» puisque, concrètement, il n’y a pas de contact frontalier entre les territoires sous occupation marocaine et la Mauritanie.
Pour mieux comprendre cette situation, il est nécessaire de revenir à l’accord de cessez-le-feu signé entre les deux belligérants en 1991 et à l’accord militaire n°1 entériné conjointement avec la Mission des Nations-Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara Occidental (Minurso) en 1997. Ces textes ont institué deux zones d’accès restreint, respectivement de 25 km au sud et à l’est et à 30 km au nord et à l’ouest du mur marocain de 2 700 km, ainsi qu’une bande-tampon de 5 km de large au sud et à l’est de ce mur. Il est important de préciser que les tirs d’armes, le redéploiement ou le mouvement de troupes, l’entrée d’armes et de munitions et l’amélioration des infrastructures de défense ne sont pas autorisés dans ces espaces.
Pour permettre le déplacement des éléments de la Minurso dans le cadre de leurs activités, les deux parties ont validé l’ouverture de cinq points de passage qui permettent de passer du territoire occupé au territoire libéré. Ces points se trouvent dans les zones d’El Farsia, Smara, Guelta-Zemour, Oum-Dreygua et Aousserd. Autre précision importante : les accords ne prévoient pas l’ouverture de brèches pour des activités «civiles», «commerciales» ou autre au long du mur marocain. La brèche de Guerguerat a été ouverte illégalement par les autorités militaires marocaines vers la fin des années 90 pour relier le territoire occupé à la Mauritanie. En mars 2001, la tentative du Maroc de construire une voie asphaltée a provoqué la ferme opposition des Nations-Unies. Mais l’administration coloniale a réussi à imposer le fait accompli malgré les multiples doléances du Front Polisario.
Guerguerat est devenue le point de passage privilégié des marchandises du royaume du Maroc vers la Mauritanie et l’Afrique de l’Ouest. Mais il reste un passage illégal au vu du droit international. Une voie commerciale stratégique pour ce pays qui en est finalement devenu dépendant. Le blocage depuis le 21 octobre de centaines de semi-remorques par des citoyens sahraouis était devenu insupportable pour l’économie marocaine. C’est ce qui explique la réaction violente de l’armée marocaine qui est intervenue, vendredi 13, contre ces civils. Un acte qui a finalement provoqué la reprise de la guerre au Sahara Occidental.
T. H.
Le Soir d’Algérie, 15 nov 2020
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