par Abdelkrim Zerzouri
L’Europe peine à trouver une réponse commune à la menace terroriste. A la recherche, depuis 2015, d’un mode d’emploi «européen» de la lutte contre le terrorisme, la France est revenue à la charge en 2020, en organisant mardi dernier un mini sommet européen, pour tenter de convaincre ses voisins de se pencher sérieusement sur la recherche d’une réponse «coordonnée et rapide» pour asseoir une politique commune visant le renforcement de la sécurité des citoyens européens. C’est toujours aux lendemains d’attentats terroristes meurtriers sur le sol européen que la question de la sécurité commune revient hanter les esprits, sans pour autant dégager des mesures prépondérantes qui engageraient la communauté européenne, dans son ensemble, contre la menace terroriste.
Après les attaques de janvier 2015 à Paris, mars 2016 à Bruxelles et à Berlin à la fin de la même année, une dynamique d’intégration européenne en matière de sécurité a connu une certaine accélération au nom de la lutte contre le terrorisme, se traduisant par la création du mandat d’arrêt européen ou encore par la création de l’unité européenne de coordination judiciaire (Eurojust), la création du Centre européen de lutte contre le terrorisme d’Europol, la modification de la législation européenne sur les armes à feu, l’actualisation du texte instaurant le «casier judiciaire européen» pour y inscrire les ressortissants extracommunautaires, mais toutes ces mesures se sont avérées impuissantes face à la menace terroriste. Preuve en est le récent attentat perpétré à Vienne, après celui de Nice et la décapitation de Samuel Paty en France en octobre. Sans parler de la vingtaine ou plus de projets d’attentats terroristes déjoués, selon les services de sécurité.
La grande faille de sécurité est bien connue, elle se situe aux frontières internes de l’Europe, de «véritables passoires», selon certains partis extrémistes, en cela qu’elles ouvrent la voie à l’immigration clandestine et offrent une circulation facile aux terroristes d’un pays à un autre pour commettre des attaques difficiles à contrer par les seuls outils sécuritaires internes adoptés par les pays membres de l’Union. Le défi véritable relève, ainsi, d’une réforme du code «frontières Schengen», bien en vue sur la table du mini sommet consacré à la menace terroriste et des moyens à mettre en œuvre pour la contrer. Comment toucher à ce principe de l’invisibilité des frontières internes (Schengen) sans remettre en cause la sacro-sainte libre circulation entre les pays membres de l’UE ?
Répugnant depuis longtemps à prendre des mesures qui touchent aux libertés en général, la France, en premier lieu, et les autres pays membres de l’UE, semblent se résigner à déclarer la guerre totale aux terroristes quitte à malmener les droits de l’homme, dont les fondements sont exploités par les terroristes pour fomenter leurs attaques. De fervents défenseurs de ce socle des valeurs humaines consentent désormais à «prendre des libertés avec la liberté» dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. L’Europe n’est pas loin en 2020 de marcher sur les pas de l’Amérique aux lendemains des attentats du 11 septembre 2001, à l’enseigne de cet appel pour la création d’un «Guantanamo» européen !
Le Quotidien d’Oran, 12 nov 2020
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