Maroc: le boxeur qui voulait voir le roi

Le procès de Zakaria Moumni, ex-champion de boxe accusé d’escroquerie, a-t-il été fabriqué de toutes pièces par la police marocaine? Ses avocats en sont persuadés.

Vendetta à la marocaine? L’histoire commence en 1999. Cette année là, Zakaria Moumni, aujourd’hui âgé de 31 ans, remporte, à Malte, le titre de champion du monde de boxe  » light contact » dans la catégorie des moins de 68 kilos. Il exhume alors un décret royal remontant à 1967 qui accorde une priorité à l’embauche au ministère des sports aux Marocains ayant décroché un titre de champion du monde. Sa demande reste lettre-morte. Il continue de frapper à toutes les portes. En 2006 il finit par décrocher un rendez-vous avec le secrétaire particulier du roi, Mounir Majidi. Celui-ci lui promet une réponse rapide, mais ne tient pas parole.

Maroc: le boxeur qui voulait voir le roi

Les deux avocats de Zakaria Moumni, Me Abderrahim Jamaï à Rabat et Me William Bourdon à Paris, dénoncent un procès fabriqué de toutes pièces.

Le boxeur décide alors de profiter de séjours en France du roi Mohammed VI pour aller, à deux reprises, manifester son mécontentement sous les fenêtres au château de Betz, dans l’Oise, dans le but d’obtenir une audience avec le souverain. Son attitude agace en haut lieu. Et cela d’autant plus qu’il se confie au site d’information en ligne Backchich.info, très critique à l’égard du royaume, qui met expressément en cause Mounir Majidi…

Accusé d’escroquerie

Le 27 septembre 2010, Zakaria, qui vit en France et dont l’épouse, Taline, est française, est arrêté à son arrivée à l’aéroport de Rabat. Il comparaît trois jours plus tard, les yeux bandés, pour apprendre qu’il est accusé d’escroquerie. Et condamné, le 4 octobre 2010 à 3 ans de prison, pour avoir extorqué de l’argent à deux personnes en leur promettant un emploi en France. La condamnation est confirmée lors du procès en appel, le 13 janvier 2011, la peine étant révisée de six mois à la baisse.

Depuis, Zakaria Moumni clame son innocence et dénonce les mauvais traitements qui lui ont été infligés. Ses deux avocats, Me Abderrahim Jamaï à Rabat et Me William Bourdon à Paris, dénoncent un procès fabriqué de toutes pièces. Il faut dire qu’en dépit des demandes répétées de Me Jamai les plaignants – les deux personnes qu’il aurait escroquées- restent introuvables… « Il y a dans ce dossier tous les indices d’une machination » affirme Me Bourdon. L’avocat voit dans cette affaire « la criminalisation de quelqu’un qui a déplu ». Même constat pour Me Jamai qui parle d’un PV « signé sous la torture » et souligne que l’accusation d’escroquerie « ne tient pas la route ». La défense n’exclut pas de saisir le rapporteur spécial des Nations Unies sur la torture et les traitements dégradants.

Au Maroc plusieurs associations se sont saisies de l’affaire. Et Me Jamai a transmis un dossier complet à Driss El Yazami qui préside le Conseil national des droits de l’homme à Rabat, un organisme officiel censé, précisément, combattre ce genre de dérapages.

L’Express, 26 mai 2011

Tags : Maroc, Zakaria Moumni, Mohammed VI,

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