Baisser de rideau sur le 33e Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement africains à Addis-Abeba – Ethiopie. Les délégations africaines devaient se concentrer sur la recherche des voies et moyens pour concrétiser l’engagement de faire taire les armes pour se consacrer plutôt au développement économique et social.
Le Président Abdelmadjid Tebboune est rentré hier lundi , non sans avoir rencontré plusieurs de ses pairs africains et évoqué avec eux les sujets sensibles de l’heure, dont la crise en Libye et l’insécurité au Sahel. Il marque, ce faisant, le retour de l’Algérie sur la scène politique africaine et dans le monde.
Il a réitéré le respect des principes et engagements traditionnels. Pour preuve, la gestion du dossier libyen après une longue éclipse, d’autant que la position de l’Algérie, impartiale, est de plus en plus vue par les observateurs politiques internationaux comme la meilleure marche à suivre devant l’échec des autres initiatives, dont les rencontres de Moscou et, plus proche de nous, la Conférence de Berlin (Allemagne), à laquelle tenait tant la chancelière Angela Merkel. Aux dernières nouvelles, cette dernière plaide pour une autre rencontre sur le dossier libyen.
Dans son intervention à ces travaux d’Addis-Abeba, le chef de l’Etat algérien a défendu l’option du règlement pacifique des conflits en Afrique par les Africains eux-mêmes. Point sur lequel a rebondi Antonio Guterres, le secrétaire général de l’Onu qui s’est désolé du néo-colonialisme ambiant, empêchant la liberté de manœuvre de l’Afrique face à ses propres problèmes. Il va jusqu’à appuyer la réforme du Conseil de sécurité de l’organisation ounusienne, telle que revendiquée par les pays africains pour une meilleure représentation.
Même sentiment partagé à l’endroit de l’Union panafricaine qui a du mal à assumer les grandes questions qui l’interpellent, le plus souvent négociées en dehors du continent par des pays étrangers. C’est le cas de la Libye aujourd’hui, le terrorisme meurtrier qui met à mal des pays à faibles capacités défensives ouvrant ainsi la porte à tous les interventionnismes.
L’Union africaine, face à ces défis, donne la désagréable impression d’être paralysée par l’ampleur des défis, confinée à constater les dégâts. Le jeu souterrain de certains pays est une entrave sérieuse aux efforts communs. Sur la question sahraouie, par exemple, son silence bruyant devant les violations répétées des droits de la République sahraouie, pays membre de l’UA au demeurant, a de quoi inquiéter. Le Maroc pavoise de façon outrancière et applaudit les reniements du dernier en date, le Burkina Faso ou encore la Côte-d’Ivoire.
Abdelmadjid Tebboune a tenu, à l’occasion de ce 33e Sommet, à rappeler la réalité du conflit qui oppose le Front Polisario à l’occupant marocain, et nous ne notons aucun rappel à l’ordre de l’organisation. C’est pourquoi, dira le Président algérien, il faut hâter la désignation d’un nouvel émissaire spécial de l’Onu, qui a d’ailleurs en charge le dossier de la décolonisation du Sahara Occidental. Faut-il, pour autant, que le Maroc arrive, 40 ans après ladite « marche verte » d’occupation, à faire accréditer ses thèses ? Ou bien alors c’est être dupe de croire qu’il est le seul à vouloir faire croire à la légitimité de son occupation de l’ancienne colonie espagnole ?
Si le soutien de la France à la prétendue « marocanité » du Sahara Occidental n’est pas nouveau pour une foule de raisons, c’est aussi une façon d’exprimer son hostilité à l’Algérie qui soutient le droit des peuples à l’autodétermination. De là à voir la main des officines de l’Elysée à l’œuvre battre le rappel de ses anciennes colonies, il n’y a qu’un pas qu’invite à franchir justement cette hostilité de la France coloniale.
En effet, Abdelmadjid Tebboune a eu à rappeler la souveraineté pleine et entière dans ses relations avec la France. La dernière sortie en date qui a défrayé la chronique, c’était lors de son investiture à la magistrature suprême. Les accents nationalistes de chacune des interventions du nouveau Président algérien irritent les lobbies dans la sphère politique française. Comment alors lui faire payer ses « outrecuidances », si ce n’est à monter son vieux rival maghrébin qui a profité, depuis plus de 10 ans, d’une diplomatie laissée en jachère par un Président omnipotent et impotent ! Cyril Ramaphosa , qui prend la relève du général égyptien Al Sissi , aura fort à faire dans la mise au goût du jour des principes d’émancipation de pays africains sous domination coloniale.
L’Afrique du Sud est connue pour son soutien sans faille à la cause sahraouie dans tous les forums. D’ores et déjà, le Président sud- africain prend les devants en appelant, pour le mois de mai prochain, à une réunion portant résolution des conflits en Afrique du Sud. Il aura toute l’année 2020 à mettre en pratique l’agenda politique : « Faire taire les armes », et économique par la réactivation efficiente de la Zone de libre-échange continentale (Zlec).
Abdelmadjid Tebboune a voulu, lors de ce 33e Sommet d’Addis-Abeba, montrer la voie quant aux mesures à prioriser pour le développement, thème de ce forum africain des chefs d’Etat et de gouvernement, en lançant l’Agence algérienne de coopération internationale à vocation africaine.
Brahim Taouchichet
Le Soir d’Algérie, 11 fév 2020
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