Dans un article paru le 22 avril 2013, le magazine Jeune Afrique exprimait son étonnement face aux agissements de deux sites mauritaniens : L’Agence Nouakchott d’information (ANI) et Sahara Media. Alors que les attentats terroristes et les enlèvements d’étrangers faisaient rage dans la région, les deux sites jouissaient de scoops qui avaient immédiatement suscité les soupçons sur l’origine de ces communiqués dont ils étaient les premiers destinataires. Selon The New York Times, ils sont devenus des chasseurs de scoops.
Un an plus tard, en octobre 2014 plus précisément, un mystérieux hacker qui sévissait sous le pseudonyme de Chri Coleman apportait les réponses aux doutes et interrogations qui restaient suspendues dans les airs.
Grâce aux correspondances confidentielles des services secrets marocains, nous avons appris que le directeur de Sahara Media, Abdallahi Ould Mohamedy, était en contact permanent avec Mourad El Ghoul, le chef de cabinet de Yassine Mansouri, directeur général de la DGED (Direction Générale d’Etude et Documentation), les services de renseignement extérieur du Royaume du Maroc. Il faisait partie des « relais médiatiques », selon le lexique utilisé par la DGED.
Le Maroc a créé plusieurs agences de presse en Afrique en vue de relayer sa propagande médiatique sur le Sahara Occidental et l’Algérie. Parmi ces agences, l’Agence de Presse Africaine (APA) dont Ould Mohamedy était l’administrateur, selon les révélations de Coleman.
Sachant qu’Abdallahi Ould Mohamedi, était un ancien correspondant de l’agence marocaine de presse MAP et qu’il dispose de bureaux à Dakar et à Casablanca et possède un studio de télévision ultramoderne à Nouakchott, il y a lieu de demander si Sahara Media n’est une créature de la DGED marocaine. Les indices qui poussent à cette déduction sont nombreux :
-Selon le site mauritanien Al Bayane, entre 1986 et 2003, il travailla pour le quotidien arabophone édité à Londres, Al Sharq Al Awsat, dont les accointances avec le Maroc ont été dévoilées par Hicham Al Mandari, opposant marocain (ayant un lien de parenté avec le roi Mohammed VI) mystérieusement assassiné en 2004 en Espagne.
-L’origine des matériaux avec lesquels il a fondé sa société
– Son poste en tant qu’administrateur d’une agence marocaine basée à Dakar et dont le directeur est un marocain.
– La fluidité des correspondances avec Mourad El Ghoul
– Les séjours en Espagne et les Etats-Unis aux frais de la DGED dans le cadre d’une campagne médiatique contre le Front Polisario et l’Algérie.
– Sahara Media a fait preuve de porte-parole du MUJAO, un mouvement terroriste créé par les marocains et dont les cibles sont uniquement algériennes et sahraouies.
– Abdallahi, ajoute Al Bayane, peut être considéré comme l’un des espions les plus efficaces grâce à Sahara Média, entreprise financée par le Maroc et dont les employés ont profité de stages de formation au Maroc et dans les territoires occupés du Sahara Occidental. L’une des missions de cette pseudo agence sera la surveillance de près de tous les mouvemments du Front Polisario dans le nord de la Mauritanie, promouvoir les soi-disant opposants du Polisario, à l’instar du dénommé Parti Khat Chahid et Mustafa Sidi Mouloud, et lier le mouvement sahraoui à la mouvance terroriste et le trafic des drogues.
Il y a lieu de rappeler que de nombreux observateurs, ont fait des remarques à propos du silence de la presse mauritanienne sur tout ce qui a été dit sur Sahara Media. Mais c’est connu, en Mauritanie, il suffit de distribuer quelques milliers d’ouguiyas pour faire taire les voix les plus critiques.
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