Nomination du premier ministre Algérien : Est-ce une nouvelle Algérie qui s’amorce ?

L’Algérie commence à retrouver les apparences de la normalité. Elle dispose d’un nouveau président qui à peine déclaré vainqueur, et malgré la détermination du hirak qui le juge illégitime, tend la main et promet monts et merveilles. Combien la détermination de la rue est vivace, celle de Tebboune semble plus coriace.

Effectivement le mouvement protestataire se poursuit tout en prenant des formes différentes mais cette fois loin de toute confusion institutionnelle. La mise en avant permanente et ostensible d’un chef d’état-major qui relevait d’une anomalie, n’est plus d’actualité. Voici donc l’armée de retour dans ses casernes. Certains diraient, de retour dans les coulisses de son imperium. Peut importe. On sait pertinemment que l’armée ne déteste rien tant que d’être exposées. Elle a d’autres monts à escalader.

En nommant M. Djerad, Tebbounne clarifie le visage du nouvel exécutif algérien. Technocrate et haut cadre d’état, il ne va surement pas piocher dans les moisissures des vielles caves à ministres ou le pouvoir algérien avait pris l’habitude de puiser pour pourvoir aux fonctions ministérielles.

Ce qu’il faut retenir c’est que Djerad, en 2003 avait payé chère sa proximité avec Benflis. Victime d’un limogeage du poste de secrétaire général du ministre des affaires étrangères, il avait estimé à l’époque qu’il était absolument nécessaire que les serviteurs de l’État soient mis à l’abri de tout abus du pouvoir. Djerad qui heureusement n’a pas obtenu le pardon du clan entourant Abdelaziz Bouteflika, peut se considérer aujourd’hui très chanceux ! Son retrait du comité central du FLN après la nominalisation de Ould Abbes en 2016 va surement faire monter sa côte auprès des Algériens.

Outre son parcours pas très favorables au clan des Boutefs, M. Djerad était assez ouvert en direction du Hirak. Il a approuvé ouvertement l’exigence des manifestants, celle du départ immédiat des figures du régime Bouteflika. Djerad, aura parfaitement compris aujourd’hui qu’il faut satisfaire les attentes populaires et que compter sur l’effet d’usure du mouvement de revendication d’une Algérie meilleurs, semble désormais illusoire.

Le pouvoir est devant une conscience politique populaire qui s’exprime spontanément, les manipulations qui ne sont pas à exclure, seront toujours dépassées par l’ampleur des événements. L’appareil politique algérien, est assez rusé pour comprendre que dans le face-à-face avec le système, le peuple est en première ligne. Même si pour le moment, ce mouvement populaire n’a pas encore transformé sa masse sociale en force politique, et qu’il a encore du mal à dégager un leadership, un autre visage de l’Algérie se dessine diffèrent de celui habituellement offert par un pouvoir vicieux.

Mayassa H-Khoudja

Algérie Network, 28 déc 2020

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