Algérie : Pas à pas…

» L’Algérie, puissance locale incontournable, est toute désignée pour jouer un rôle majeur et essentiel dans ce sens. Ce ne saurait être le cas, en revanche, de la Turquie et de l’Egypte, tous deux partie prenante dans ce conflit. Quant à l’Allemagne, son influence géostratégique dans cette partie de la planète est quasi nulle. Celle des USA l’est un peu plus, mais reste quand même très faible « .

Par Mohamed Abdoun 

Comme il fallait s’y attendre, et comme il fallait le craindre surtout, la conférence internationale de Berlin sur la Libye n’a pas débouché sur grand-chose. Si les hostilités se sont arrêtées, depuis l’intervention de la Russie, et suite à une possible mais discrète médiation algérienne, le conflit continue de couver, et menace de reprendre à tout moment. Khalifa Haftar, qui se trouve à l’origine du début de ces hostilités, a refusé de signer l’accord de cessez-le-feu, de même que celui qui lui avait été proposé à Berlin en marge de ces travaux.

Un laborieux travail de reconstruction, de rapprochement, de médiation, reste donc à accomplir avant que les armes ne se taisent pour de bon, et que la Libye renoue avec la paix, la quiétude et le bien-être social qui en faisait la fierté jadis. En fait le quasi-échec de la conférence de Berlin est lié à plusieurs facteurs. Et, pour en saisir les contours, il faudrait peut-être remonter jusqu’au » printemps libyen « , durant lequel la France aux premières lignes, et l’OTAN à sa suite, avaient pris pour prétexte une résolution onusienne visant à protéger les populations civiles pour neutraliser l’armée régulière, et même aider à assassiner, et à faire taire définitivement Kadhafi.

L’Occident, chemin faisant, n’avait pas hésité à s’allier avec les terroristes locaux du GICL, mené par Abdelhamid Belhadj, faisant sienne cette maxime qui dit que les ennemis de mes ennemis sont forcément mes amis. Mal lui en a pris, puisque la suite a donné lieu à un véritable chaos, qui a déteint sur toute la bande sahélo-saharienne, déclenché une ravageuse guerre civile au Mali, et étendu l’hydre terroriste jusqu’au coeur de la Tunisie.

Pendant ce temps, les tribus locales se sont scindées en autant de » principautés « , menées par d’impitoyables chefs de guerre. L’Algérie, qui aurait pu jouer un rôle majeur pour empêcher cette irrémédiable descente aux enfers, n’avait pas été écoutée d’abord lorsqu’elle refusait que l’OTAN s’immisce dans les affaires souveraines de la Libye d’abord, et avait été occupée par des » préoccupations internes » au moment où la situation avait atteint son point de non-retour en Libye.

A présent, et si la solution doit plus que jamais être interne et propre aux Libyens, seuls des acteurs proches de ces derniers, sensibles à leurs préoccupations, et désirant autant qu’eux la paix et la stabilité peuvent les aider à y parvenir. L’Algérie, puissance locale incontournable est toute désignée pour jouer un rôle majeur et essentiel dans ce sens. Ce ne saurait être le cas, en revanche, de la Turquie et de l’Egypte, tous deux partie prenante dans ce conflit.

Quant à l’Allemagne, son influence géostratégique dans cette partie de la planète est quasi-nulle. Celle des USA l’est un peu plus, mais reste quand même très faible. En fait, et pour faire court, cette profusion d’acteurs, puisque même la Russie, et la France qui continue de tirer les ficelles au vu et au su de tous, y sont également impliqués, c’est cette profusion d’acteurs qui ne permet, et ne permettra jamais, de trouver la moindre solution viable. Les intérêts des uns et des autres sont par trop divergents. Le plus grave c’est qu’ils ne vont jamais dans le sens des Libyens, ni dans celui des habitants du Maghreb arabe, dont nous autres Algériens. Il faudra donc beaucoup de temps, de doigté et de patience pour réparer tout ce que l’OTAN et la France ont cassé dans cette région.

M.A.

La Tribune des Lecteurs, 21 jan 2020

Tags : Algérie, Libye, Russie, France, Turquie, Tripoli, Haftar,

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