Maroc : ce qui se prépare pour le remaniement ministériel

Une nouvelle architecture, moins de ministères, la fin des secrétariats d’État: attendu depuis deux mois, le remaniement ministériel demandé par le roi devrait, selon des informations recueillies par MEE, être officialisé cette semaine

« La liste peut être modifiée par le Palais. En tout cas, le roi doit recevoir la nouvelle équipe à tout moment d’ici à vendredi, c’est-à-dire avant l’ouverture de la session parlementaire d’automne. » Selon les informations recueillies par Middle East Eye auprès d’une source proche de la primature, le remaniement ministériel annoncé depuis l’été au Maroc serait imminent.

Dans son discours du 30 juillet, Mohammed VI avait demandé que soit injecté du « sang neuf » au sein de l’exécutif et des administrations. Plus de deux mois plus tard, le chef du gouvernement vient de lui soumettre une liste de « compétences ». L’attelage gouvernemental ne compterait ainsi que 22 ou 23 ministères – au lieu des 38 actuels.

Selon nos sources, la liste de Saâdeddine el-Othmani apporterait plusieurs changements. Du côté du Parti de la justice et du développement (PJD, islamistes), plusieurs ministres devraient quitter le navire.

À commencer par Bassima Hakkaoui, ministre de la Solidarité, de la Femme, de la Famille et du Développement social, qui ne fera plus partie du gouvernement. Grande figure féminine du parti de la lampe, elle occupe ce département depuis 2012 et a, jusque-là, survécu à tous les remaniements malgré un bilan souvent jugé faible. « Dans la liste de Saâdeddine el-Othmani, elle est remplacée par Jamila el-Moussali [secrétaire d’État à l’artisanat et à l’économie sociale] », confie une source à MEE.

Autre changement de taille : le département de Mustapha el-Khalfi, ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement et la Société civile, se retrouverait désormais sous la tutelle de son collègue Mustapha Ramid, ministre d’État chargé des Droits de l’homme.

Ministre de la Justice dans le gouvernement Benkirane (2012-2016), l’avocat a été nommé ministre d’État chargé des Droits de l’homme dans le gouvernement Othmani en avril 2017. « C’est une promotion pour Ramid qui était en charge d’un ministère sans portefeuille », commente une de nos sources à la Primature.

Souvent pointé du doigt pour sa gestion du ministère de l’Emploi et de l’Insertion professionnelle, Mohamed Yatim ne ferait pas non plus partie de la nouvelle équipe.

Idem pour Mohamed Laârej, (Mouvement populaire de la culture et de la communication, MPCC) dont le département fusionnerait, selon nos sources, avec celui de la Jeunesse et des Sports, occupé Rachid Talbi Alami (Rassemblement national des indépendants, RNI).

La surprise du PPS

À bord de toutes les coalitions gouvernementales de ces vingt dernières années, le Parti du progrès et du socialisme (PPS) a pris tout le monde de court, le 1er octobre, en décidant de claquer la porte de l’exécutif lors d’une réunion de son bureau politique. Réuni le vendredi 4 octobre, le comité central du parti a entériné la décision de quitter le gouvernement.

Les raisons de son départ ? « Le PPS a constaté avec regret que le gouvernement reste, depuis son investiture, prisonnier d’une logique de gestion en manque d’inspiration politique lui permettant de mener à bien l’étape actuelle et les dossiers qui s’imposent », explique le bureau politique dans un communiqué publié mardi dernier.

Et d’ajouter : « L’esprit de compétition électoraliste a pris le pas sur toute autre chose dans la perspective de l’échéance des législatives de 2021, un état de fait qui a semé un sentiment de désespoir chez de larges franges de la société qui ont perdu confiance dans l’action politique ».

« Othmani a proposé au PPS un seul portefeuille, à Nabil Benabdellah, ce qu’il n’a pas accepté », confient à MEE plusieurs sources au fait des négociations. Locataire du ministère de la Santé et de celui de l’Habitat, la formation de Nabil Benabdellah, refusant l’offre du chef du gouvernement, aurait ainsi préféré quitter le gouvernement.

Une décision qui n’a pas manqué, d’ailleurs, de susciter la colère du ministre de la Santé, Anas Doukkali, qui, en signe de protestation, a annoncé le 7 octobre sa démission du bureau politique du PPS.

La fin des secrétaires d’État

Autre aspect important de ce remaniement : les onze secrétariats d’État, occupés principalement par des femmes, seraient supprimés. Il faut dire que pour la plupart, ils ne disposent toujours pas de leurs arrêtés d’attributions et ne peuvent donc pas exercer le moindre contrôle sur leur périmètre et encore moins signer des documents.

C’est le cas, par exemple, de Hammou Ouhelli, chargé du Développement rural et des Eaux et Forêts, de Mounia Boucetta aux Affaires étrangères, de Fatna Lkhiyel à l’Habitat, de Rikia Derhem au Commerce extérieur, de Lamia Boutaleb au Tourisme, d’Othmane el-Ferdaous à l’Investissement et de Jamila Moussali à l’Artisanat et à l’Économie sociale.

La loi organique relative à l’organisation et à la conduite des travaux du gouvernement et aux statuts de ses membres dispose pourtant qu’ils doivent recevoir « délégation d’attributions concernant certains services placés sous leur autorité. »

 

Source : Middle East Eye, 8 oct 2019

Tags : Maroc, politique, remaniement,

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