Sarkozy, Mam, Ollier, Fillon… vive les vacances aux frais des dictateurs !

« Je voudrais dire à Michèle tout mon soutien. Elle a le soutien du président de la République et du Premier ministre », a donc finalement accordé à Alliot-Marie François Fillon. On comprend qu’il la défende : si la ministre des Affaires étrangères a passé des vacances invitée par un proche du dictateur ben Ali, utilisant à deux reprises son jet privé, lui-même se trouvait, à la même époque, hôte du dictateur… égyptien, Hosni Moubarak !

« François Fillon a été hébergé par le gouvernement égyptien pendant ses vacances de fin d’année et a emprunté un avion « de la flotte gouvernementale » du pays pour une excursion, a annoncé Matignon mardi 8 février, dans un communiqué qui confirme des informations du Canard enchaîné« , relaie L’Obs.com.

Selon le palmipède, le jet appartiendrait même directement à Moubarak. Voilà qui éclaire aussi la querelle qui avait opposé le Premier ministre à sa secrétaire d’Etat à la Jeunesse Jeannette Bougrab. Cette dernière avait déclaré : « Je crois qu’il faut que le président Moubarak parte, je crois qu’après 30 ans de pouvoir il y a quand même une forme d’usure et que la transition démocratique doit aussi toucher l’Égypte. »

Suite à quoi Fillon l’avait fermement recadrée : « Du coup, la secrétaire d’État avait été convoquée dimanche à Matignon, où Fillon lui a rappelé que ce sont le président de la République et son Premier ministre qui expriment la position de la France et du gouvernement sur l’Égypte… et pas elle ! A sa sortie de Matignon, elle avait été contrainte de publier un communiqué précisant que c’était sa position et pas celle de la France », relate Le Post. France Info résume pour sa part la mise au point fillonesque par cette phrase : « C’est le peuple égyptien qui décide ».

Une position ensuite défendue par Nathalie Kosciusko-Morizet, invitée par RTL-LCI-Le Figaro : « Je pense que nous n’avons pas à souhaiter le départ d’un dirigeant étranger. C’est le peuple égyptien qui doit décider des ces choses-là, il n’y a que lui qui peut le faire », avait dit la ministre de l’Ecologie. « L’enjeu c’est : est-ce qu’on peut réussir vers plus de démocratie sans aller vers l’islamisme ? C’est un sujet qui, bien sûr, nous préoccupe beaucoup. »

Moubarak est-il un dictateur ? Oui, mais ne préfère-t-on pas un tyran ami avec les occidentaux qu’un islamiste ? Voilà ce que signifie la phrase de NKM. Toujours le même épouvantail, comme s’il n’existait pas de troisième voie. Cela justifie-t-il pour autant de se compromettre avec le Raïs, en acceptant de passer des vacances avec sa famille tous frais par lui payés ? Evidemment non. Fillon a donc commis une faute politique incontestable.

« Ça ne m’étonne pas que M. Fillon n’ait pas demandé la démission de Michèle Alliot-Marie car il est tombé dans la même marmite de la complaisance à l’égard de dictateurs. Comme elle, il a profité de leur générosité », réagit sur Le Post le député Vert Noël Mamère. Le communiqué diffusé par Matignon en guise de pare-feu ne met pas fin au problème politique. Nous avons donc trois ministres pris la main dans le sac pour avoir passé des vacances payées aux frais de dictateurs. Vous vous rendez compte ?

Après Michèle Alliot-Marie et son compagnon, Patrick Ollier, qui sont tous deux ministres d’Etat, le Premier ministre se fait prendre lui aussi… Nous sommes face à une affaire d’Etat. Cette affaire pose la question du maintien de François Fillon à Matignon. » Cerise sur le gâteau, le communiqué de presse de Matignon indique apporter des précisions sur le séjour égyptien de Fillon « par souci de transparence ». Sauf que lesdites vacances se sont déroulées durant les fêtes de fin d’année et qu’on ne l’apprend qu’aujourd’hui, en catastrophe, parce que le Canard enchaîné publiera toute l’histoire demain. Parler de transparence dans ces circonstances relève donc du grand foutage de gueule !

« Ce n’est que l’illustration du sarkozysme, dit encore Mamère. Qui a donné l’exemple ? C’est Sarkozy en passant des vacances sur le yacht de Bolloré aux lendemains de son élection ! C’est le règne de l’impunité puisqu’on a le pouvoir… » Il eût été plus inspiré de mentionner les vacances du chef de l’Etat de décembre 2009, tous frais payés par… Mohammed VI, « à la résidence royale de Jnane Lekbir », comme le précisait Libération. «

Mohammed VI régale les Sarkozy.

L’ambiance est feutrée, la tablée conviviale. Le roi du Maroc a convié dimanche soir le couple Sarkozy, à partager le dîner familial dans son palais, à Marrakech. Un repas de fête qui n’est pas son seul égard pour le président français et son épouse, puisque l’un et l’autre sont logés dans le « petit palais » de Jnane Lekbir, au cœur de la palmeraie de Marrakech, à trois kilomètres du centre-ville sur la route de Meknès », détaillait France soir. Ou encore les vacances d’octobre dernier, en plein conflit sur les retraites et en cachette : « Le lundi 25 après-midi, L’Express demande au conseiller en communication du président, Franck Louvrier, si le chef de l’Etat se trouve bien au Maroc, comme il en a eu l’information. Réponse négative : Nicolas Sarkozy est au Cap Nègre. Sauf que personne ne l’a vu sur place, ni même à l’aéroport. En réalité, le président s’est bel et bien rendu au Maroc, dans une résidence prêtée par le roi. « Je ne le savais pas, il fait aussi des surprises », assure aujourd’hui Franck Louvrier. Sans doute l’Elysée a-t-il jugé préférable de rester discret sur cette destination ensoleillée, alors que le climat social reste tendu et que les manifestations sur les retraites se sont succédé à un rythme soutenu. »

En quoi ces séjours aux frais de la princesse du roi sont-ils gênants ? Un exemple, tiré de L’Humanité : « Jointe par téléphone, Sonia Terhzaz, vingt-sept ans, est inquiète. Son père, le colonel-major Kaddour Terhzaz, condamné en novembre 2008 à douze ans de prison pour divulgation de «secrets militaires», risque de dépérir dans la prison de Salé, à Rabat. Il a été placé à l’isolement, dormant à même le sol, sans repas chauds, sans douche. Son crime ? Avoir écrit une lettre au roi Mohammed VI, en 2005, exposant la situation d’anciens officiers-pilotes libérés par le Front Polisario après vingt ans de détention, et dans laquelle il demandait un ajustement de carrière compte tenu du fait que leur grade a été gelé durant cette période. [En fait pour avoir transmis ladite lettre à un autre officier, histoire résumée sur le site de ses soutiens]

Arrêté le 9 novembre 2008, l’officier est condamné, sans qu’il ait bénéficié d’un temps suffisant pour assurer sa défense. En dépit d’une lettre adressée au souverain marocain et signée par 150 députés européens, dont Patrick Le Hyaric, d’une cinquantaine de demandes de grâce envoyées par la famille de l’ex-officier, d’interventions multiples d’ONG de défense des droits de l’homme – Amnesty International, Human Rights Watch, AMDH (Maroc) – et d’une pétition signée par de nombreuses personnalités, dont le journaliste et écrivain Gilles Perrault, les autorités marocaines continuent à faire la sourde oreille.

Quant à la France – Kaddour Terhzaz étant franco-marocain –, elle a adopté la posture de l’autruche, qualifiant la situation de «délicate, compliquée», alors que, par ailleurs, Nicolas Sarkozy n’a pas hésité à s’investir personnellement pour la libération du… soldat israélien Shalit, prisonnier du Hamas ! » Mais comment taper sur la table et exiger quoi que ce soit d’un dictateur – et le Maroc reste bien une dictature, témoin ce terrible billet de juin 2009 – alors qu’on est par ailleurs son débiteur personnel ?

A cette dimension éthique élémentaire s’ajoute le pragmatisme bling bling des sarkozystes : après la Tunisie, si l’Egypte venait à tomber elle aussi et que la contagion gagnait le Maroc, où donc iraient se dorer la pilule nos gouvernants décomplexés ? Mam et Ollier ont tranché pour la Dordogne, qui ne mérite certes pas de souffrir en plus l’invasion des Fillon et des Sarkozy !

Source : Plume de presse, 8 fév 2011

Tags : Maroc, Sarkozy, printemps arabe, villa Marrakech, La Mamounia,

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