Le monarque marocain exhibe un t-shirt avec des vers qui pleurent la reconquête
Ignacio Cembrero
Diario de Sevilla, 14 septembre 2019 –
Depuis 2007, le roi Mohamed VI du Maroc, âgé de 56 ans, n’a plus revendiqué publiquement aucun territoire d’Espagne – cette année-là, il avait réclamé Ceuta et Melilla, mais semble avoir un certain regret pour Al andalus, cette longue période durant laquelle une grande partie de la péninsule Ibérique a été sous domination musulmane.
Soufiane El bahri, jeune homme que le palais royal marocain charge depuis des années de diffuser des images informelles du monarque, a difusé cette semaine sur les réseaux sociaux une nouvelle photo du souverain alaouite. Il y pose, dans ce qui semble être un magasin de vêtements, avec une jeune Marocaine nommée Khadija Chaouki.
La presse marocaine a reproduit la photo en soulignant l’originalité et l’élégance du t-shirt porté par le roi tandis que depuis une poignée de comptes Twitter et de profils Facebook on vantait le nouveau look de Mohamed VI et sa proximité avec les gens ordinaires comme la jeune fille avec laquelle il a posé.
À la veille du week-end, certains médias se sont penchés sur les phrases en arabe estampillées en haut à gauche du tee-shirt. Ce sont quatre vers de “Elégie pour Al andalus”, le plus célèbre poème d’Abu Al-Béka al-Rundi, plus connu sous le nom d’Abul Béka. Dans cette œuvre, le poète, né à Séville, ou peut-être à Ronda, en 1204, lamente la chute des grandes villes d’Andalousie par les chrétiens au milieu du XIIIe siècle et demande aux musulmans d’Afrique du Nord de les aider à arrêter leur progression.
“L’islam a disparu de nombreux pays et régions », dit la poésie d’Abul Beka, dont la vie à Ronda, pendant près de 80 ans, est à peine connue. “Où est Córdoba qui fut la cité des sciences ?», se demande-t-il dans le texte écrit en 1267. “Et où est Séville et toutes ses explanades?”. Elles étaient les pierres angulaires du pays”. Comment rester ici si elles n’ont plus de présence? “Voici la source blanche qui pleure de chagrin (…) de voir un pays où l’islam n’est plus présent (…); qui a déserté l’islam, un peuple qui a fait l’apostasie; et où les mosquées sont devenues des églises; où on ne voit que des cloches et églises”. “combien de pauvres gens nous demandent de les secourir; victimes et prisonniers, mais personne ne bouge. « Oh, créatures d’Allah, vous êtes tous frères! Hier encore ils étaient les propriétaires ; aujourd’hui, ils sont accroupis dans un pays d’hérétiques ».
Abdul Beka a quitté la péninsule peu avant sa mort et est décédé à Ceuta en 1285. Aujourd’hui, une place de Ronda porte son nom et une rue de Malaga.
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