« Après avoir échoué dans son entreprise visant à ouvrir ses effectifs à 23 personnalités réputées crédibles et écoutées par le panel, voilà qu’il nous parle aujourd’hui de la mise en place d’une sorte de » comité des sages « . La manoeuvre, qui ne trompe personne, ne devrait servir à ce panel qu’à gagner un peu plus de temps en espérant une sortie de secours honorable…»
Par Mohamed Abdoun
Le panel n’arrive pas à décoller. Les coups qu’il a reçus depuis sa création en sont certainement les causes principales. Mais, pas que… comme dirait l’autre. Karim Younes, désigné à sa tête, est un ancien du système. Un homme qui a déjà été ministre, et président de l’APN. Son passage dans le camp de l’opposition ne veut pas dire -forcément- qu’il ait un jour quitté le pouvoir. Il a juste changé de clan, ou plutôt décidé de soutenir un clan sorti vaincu -à l’époque- du bras-de-fer qui avait secoué le pouvoir.
Cela pour dire que d’évidentes raisons existent, qui poussent les uns et les autres à se méfier d’un panel ainsi choisi. Surtout que celui-ci, à la première bourrasque surgie face à lui, il s’est empressé de plier, à la manière de ce roseau séculaire qui, en agissant de la sorte, évite quand même de rompre. Ni de ramper surtout.
Bref, le panel, qui fait l’actualité, et attire les sunlights depuis une bonne semaine, donne à présent l’air de ne plus vraiment savoir où il en est, ni vers quelle direction il devrait se diriger. Alors qu’il nous avait promis que son travail allait commencer sur les chapeaux de roues, étant donné que le pays avait perdu bien trop de temps, et que cette période de » non-constitution » était porteuse de tous les dangers possibles et imaginables, nous étions en droit de penser que les consultations allaient raisonnablement démarrer dès ce dimanche.
Son but, celui-là seul pour lequel il a été mis en place, réside en effet dans le fait de lancer un » dialogue inclusif » et de faciliter, en quelque sorte, les échanges -tendus- entre le pouvoir et les manifestants. Or, il n’en a été rien. Preuve, sans doute, que toutes les personnalités visées -et même si elles n’ont pas encore été approchées- auraient très certainement décliné l’invitation, histoire de ne pas se mouiller face à un hirak à la mémoire vive, au long court, et au souffle increvable.
Pressentant cet échec patent donc, le panel donne l’air de verser dans la diversion et, la redondance surtout. Après avoir échoué dans son entreprise visant à ouvrir ses effectifs à 23 personnalités réputées crédibles et écoutées par le panel, voilà qu’il nous parle aujourd’hui de la mise en place d’une sorte de » comité des sages « .
La manoeuvre, qui ne trompe personne, ne devrait servir à ce panel qu’à gagner un peu plus de temps en espérant une sortie de secours honorable, à défaut de pouvoir lancer un véritable dialogue inclusif auquel prendraient part l’ensemble des acteurs politiques, sociaux, économiques et associatifs respectés par la rue… l’échec, désormais en partie consommés, s’avère être plus amer que prévu. Il l’est car aucun » plan B » ne semble se profiler à l’horizon, alors qu’il est plus que nécessaire que le pays aille malgré tout vers la tenue d’une élection présidentielle.
Cette période transitoire, qui nous est imposée de facto, est en effet porteuse de pas mal d’incertitudes. La question qui se pose, depuis que le hirak s’est en grande partie essoufflée, est celle de savoir s’il faudrait se résoudre à convoquer de nouveau le corps électoral, en espérant que des candidats sérieux vont se présenter, encouragés qu’ils seront par la mise en place d’une commission indépendante d’organisation de ce scrutin, ou bien s’il faudrait que le pouvoir, dans son acceptation le plus large, se livrerait d’abord à de substantielles concessions, telles que résumées par le panel dans ses préalables, et sèchement rejetées par le chef d’étatmajor de l’ANP. Wait and see…
M. A.
Tribune des lecteurs, 4 sept 2019
Tags : Algérie, transition, élection présidentielle,