par Ghania Oukazi
Le départ du Premier ministre et de son gouvernement fait l’objet de grandes supputations depuis la tenue du Conseil des ministres. Départ donné pour imminent. « Il doit partir ces jours-ci, peut-être ce jeudi, en tout cas avant dimanche prochain,» affirment des politiques.
Pour être aussi affirmatives, nos sources tablent sur des discussions, en haut lieu, sur une feuille de route devant être mise en application dès l’adoption des deux lois organiques par le Parlement. «Il se pourrait même que Nouredine Bedoui remette la démission de son gouvernement ce jeudi, » avancent nos interlocuteurs.
Hier, l’APN a ouvert les travaux de sa session ordinaire par la présentation des deux projets par le ministre de la Justice, Garde des sceaux. Peu importe si l’hémicycle est clairsemé, même aux trois quarts vide, et les quelques députés présents chahutent sans gêne, le quorum sera atteint ne serait-ce que par procuration s’il le faut, pour que les deux lois soient votées ces jours-ci, peut être bien avant dimanche prochain.
Si pour des raisons d’urgence, les textes de lois ne devaient pas être débattus, nos interlocuteurs expliquent le fait que le président de l’APN accorde une seule prise de parole par député et de 7 minutes de temps seulement, comme étant « une manière de préciser que ce sont des projets de lois et non des ordonnances qui, elles, sont signées par le président de la République et adoptées par le Parlement sans être débattues. »
Des constitutionnalistes pensent qu’ «il aurait été plus judicieux que le pouvoir gèle la Constitution jusqu’au règlement de la crise politique parce que la manière avec laquelle il est en train de la faire valoir frôle l’illégalité dans toute son ampleur. » L’enseignant-universitaire Mahmoud Lazhari qui a été membre du panel a eu à affirmer que la Constitution est interprétée dans son sens le plus large et non à la lettre ». C’est d’ailleurs ce qui fait dire à nos sources que «le départ du gouvernement Bedoui est plus que probable dans les heures qui suivent, en tout cas avant la convocation du corps électoral par le chef de l’Etat. »
Les adieux de Bedoui en Conseil des ministres
Peu importe l’article 104 de la Constitution qui oblige à son maintien dans son intégralité jusqu’à l’élection d’un nouveau président de la République. « Le pouvoir n’est pas à sa première violation de la loi suprême, elle l’a toujours été, on est dans une situation inconstitutionnelle avérée depuis que Bensalah a été reconduit en tant que chef d’Etat », soutiennent encore nos interlocuteurs.
Le bilan du gouvernement que Nouredine Bedoui a présenté, en Conseil des ministres du lundi dernier, était donc un discours d’adieux qui mettait fin à près de 6 mois de calvaire durant lesquels il était jeté en pâture et à l’invective populaire. Les instructions qu’il a reçues du chef de l’Etat sont pour préparer, dans les heures qui suivent, le siège et les moyens logistiques et matériels à l’autorité indépendante dont le processus de création sera officiellement amorcé dès l’adoption des deux lois.
Toujours pour faire vite, l’on avance du côté de la présidence de la République que le Conseil de la Nation pourra plancher sur les deux textes de loi, ce vendredi. Combien même la convocation du corps électoral pourrait aller au-delà du 15 septembre prochain, la création et l’installation de l’autorité indépendante doit se faire « sans délai », répète-t-on à ce niveau. L’on avance que ces quatre jours à venir seraient décisifs pour marquer «cette étape charnière dans le processus politique qui permet d’engager le processus électoral ». Gaïd Salah a réitéré, hier, à partir de la 5ème Région militaire que cette échéance doit se tenir dans « les délais requis.» Le général de corps d’armée pèse de tout son poids sur l’impérative préparation des corps constitués à « encadrer » la tenue du scrutin, avec la plus forte rigueur. « Personne ne devra pouvoir contrecarrer la mise en œuvre de sa feuille de route, il y va de sa crédibilité mais surtout de la préservation de son pouvoir absolu sur le pays, » estiment nos sources.
Quand les mentalités sont rompues à la fraude
« La priorité qui s’impose dans ces circonstances dans lesquelles vit l’Algérie, ce sont les élections présidentielles, nous sommes convaincus qu’elles se tiendront dans les délais prévus (…), » a-t-il martelé, hier, à partir de l’Est du pays. Des élections, le 31 octobre comme susurré par une chancellerie européenne, à l’oreille de ses amis? Le 12 décembre comme avancé par des politologues? Chacun y va de son comptage à partir du moment où les délais constitutionnels pourraient ne pas être forcément conformes à ceux consacrés par la Constitution, «parce qu’à situation exceptionnelle, décisions et mesures exceptionnelles», avancent nos sources.
La feuille de route du chef d’état-major de l’ANP prévoit en outre un large mouvement des walis « dans les jours à venir puisqu’il est prêt depuis longtemps,» soutient-on. «Sinon, ça ne sert à rien d’installer des délégations indépendantes représentant l’autorité, au niveau des 48 wilayas, sans changer les walis qui s’arrangeront, certainement, pour avoir un droit de regard sur les commissions électorales communales et de wilayas prévues par la loi électorale amendée,» est-il affirmé. C’est certainement la question des candidatures aux présidentielles qui bouleverseraient le cadrage préétabli aux élections présidentielles qui devront être à un seul tour comme de tradition mais surtout pour éviter que des plans de « désobéissance civile» n’aient le temps de mûrir et d’être exécutés.
Gaïd Salah n’en démord pas. Il a fait, hier encore, référence à des agendas de déstabilisation de l’Algérie. Les consignes de vote fermes feront certainement partie de ce cadrage qui se veut garant d’une impartialité fraîchement codifiée mais qui n’aura pas réellement force de loi tant les mentalités sont rompues à la fraude.
Le Quotidien dOran, 13 sept 2019
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