Vous vous rappelez le communiqué de la DGSN (Direction générale de la sûreté nationale) sur un inspecteur de police qui a ouvert le feu aux premières heures du dimanche contre deux « individus », un homme et une femme, les tuant sur le coup ?
Selon les premiers éléments de l’enquête, lit-on dans ce communiqué, un inspecteur de police est intervenu pour « interpeller » quatre personnes en « état d’ébriété », deux filles et deux jeunes hommes, « présumés impliqués dans des activités criminelles et de possession par l’un d’entre eux d’une arme blanche ».
Et le communiqué de rajouter : « Face à une résistance farouche de la part des prévenus, le policier a été contraint d’user de son arme de service, tirant deux balles qui ont atteint mortellement un jeune homme et une fille parmi les mis en cause ».
Ça c’était le récit officiel de la DGSN…. jusqu’à hier. Le policier vient d’être suspendu. Ce qui signifie que vraisemblablement, la police a eu enfin le temps de visionner un enregistrement vidéo qui circule sur les réseaux sociaux.
Dans cette vidéo on ne voit personne menacer le policier avec une « arme blanche », et encore moins lui opposer une « farouche résistance ». D’ailleurs le communiqué de la DGSN ne dit à aucun moment que l’individu abattu a utilisé sa supposée arme blanche, il parle uniquement de « port ».
Sur cette vidéo, de mauvaise qualité, on voit un brouhaha autour d’un homme gisant par terre, sûrement mort, puis une échauffourée. On aperçoit aussi la silhouette d’une fille qui s’agite au milieu d’une foule de curieux. A un moment donné, apparaît un homme, qui n’est pas le policier, qui pousse violemment la fille par terre avant que le flic ne lui loge à bout portant une balle dans le corps. Tout se passe vite, moins d’une minute.
Que s’est-il passé alors ? Si le policier vient d’être suspendu, c’est que le fragile récit débité par la DGSN dans son communiqué, et publié en trombe pour le dédouaner, a convaincu ses concepteurs qu’il ne tient pas la route.
La police a-t-elle eu connaissance de témoignages à chaud, qui circulaient sur YouTube tout juste après la mise à mort de ces deux jeunes, et qui affirment que le policier « n’était pas dans son état normal », c’est-à-dire qu’il était ivre ? C’est possible.
Voilà le récit des faits tels que rapportés par une source anonyme, qui connait les lieux du drame. Et on est loin de la version relatée par la DGSN.
1. il n’a jamais été question d’interpellation de quatre délinquants « présumés impliqués dans des activités criminelles et de possession par l’un d’entre eux d’une arme blanche ». Tout ça c’est une construction légendée de la DGSN pour dédouaner le flic.
2. L’inspecteur de police se trouvait dans la boîte de nuit de l’hôtel Transatlantique de Casablanca, dans le quartier de Derb Omar, quand il a eu une altercation avec un voisin de bar. Les deux hommes, tous les deux en état d’ébriété, sont alors sortis dans la rue pour en découdre. Et là, dans la rue, c’est le drame. Le policier, un inspecteur de police principal de la brigade d’investigation relevant du district de police d’Anfa, sort son arme de service et abat froidement le jeune homme.
3. Une femme qui se trouvait également à l’intérieur du bar de l’hôtel commence à s’agiter en voyant la première victime par terre. C’est elle qu’on voit dans la vidéo. Elle n’avait, assure notre source, aucune relation ni avec le jeune homme mort ni avec le policier. Un fait qu’il faudra recouper. La fille semble reprocher quelque chose au policier. A ce moment, un troisième intervenant, qui n’est pas le flic, la pousse par terre et alors le policier tire sur elle alors à bout portant, la tuant sur le champ.
Maintenant les questions : Pourquoi personne n’évoque l’homme qui jette la fille par terre avant que le policier ne la tue ? Qui est-il ? Selon notre source, il s’agirait du videur de la boîte de nuit de l’hôtel Transatlantique.
Et pourquoi tous les récits ne font pas mention de l’hôtel Transatlantique où tout a commencé ?
Notre source avance une explication. Ou plutôt deux.
1. Premièrement, le vrai propriétaire de l’hôtel Transatlantique serait un gros ponte du régime.
2. Deuxièmement, le Transatlantique, dont la boîte de nuit bénéficie d’une généreuse mansuétude des autorités locales qui lui permettent de rester ouverte après les horaires permis, héberge une bonne partie de la Garde royale quand le roi se déplace à Casablanca.
Conclusion : Qu’un policier tire sur un dangereux malfrat menaçant avec une arme, blanche ou à feu, laisse généralement les Marocains indifférents, tellement ils sont exaspérés par la montée de l’insécurité dans leurs quartiers (YouTube est plein de vidéos montrant des policiers abattant des malfaisants armés de couteaux).
Mais dans cette affaire tout porte à croire qu’il s’agit bel et bien d’une exécution sommaire que la DGSN a essayé dans un premier temps de camoufler en interpellation qui aurait mal tourné.
Source : Ali Lmrabet
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