Les libertés individuelles au Maroc, simple utopie ?

Aujourd’hui, et depuis toujours, le débat des libertés individuelles au Maroc frôle la polémique. Il est sans cesse alimenté par des affaires dont les conséquences explosives inquiètent une grande majorité de la société marocaine. La dernière affaire dont l’écho se fait toujours entendre concerne une jeune femme, victime d’une violente agression, au motif qu’elle portait un débardeur. Rouée de coups et déshabillée par des extrémistes salafistes à Rabat, elle symbolise les atteintes aux libertés individuelles.

Cette femme n’a été qu’un exemple parmi tant d’autres, mais a suscité une énorme mobilisation des ONG et des réseaux sociaux, dont un groupe facebook intitulé « Débardeur wbikhir ». La réaction contre ce vent liberticide rassure plus d’un mais fait trembler beaucoup d’autres.

En effet, ce rassemblement pour la défense de ce droit démocratique demeure insuffisant contre les attaques de certains obscurantistes, dont la pression sur le gouvernement actuel est considérable. Comment peut-on se sentir libre dans ces conditions ? Quel avenir ont les libertés individuelles au Maroc ? Sur quels motifs certains s’opposent à ce droit fondamental ?

Le conflit entre extrémistes conservateurs et défenseurs des libertés en dit long sur le clivage social du peuple marocain. Malheureusement, certaines tendances salafistes profitent bien de cette situation pour imposer leurs idées et leurs idéologies. Selon eux, porter un débardeur ou une jupe incite à la débauche.

Cette déclaration est appuyée par l’initiative de Abouzaid El Idrissi, député du PJD qui avait appelé à l’institution par le gouvernement d’une journée de ‘la chasteté et de la modestie’ rejoint dans son appel par Mohamed Fizazi. Mais pour dénoncer ces faits jugés dangereux et dénigrants pour les droits et les libertés au Maroc, des voix se sont élevées. Le gouvernement est le premier à être pointé du doigt, comme étant responsable de cet incident.

L’association Bayt Al Hikma sous la voix de la députée PAMiste Khadija Rouissi déclare par ailleurs: «L’agression s’est faite … sous un gouvernement dirigé par un parti islamique, ce qui pourrait bloquer le mouvement en faveur de la démocratie, des libertés et du respect de la loi ». Mais le chef du gouvernement se défend de ces accusations : «Je crois en la liberté, Dieu nous a créés libres …. Qui est Benkirane pour dire aux Marocains de se raser la barbe ou pour imposer le hijab ? Les libertés individuelles sont sacrées et intangibles ».

Une autre affaire, survenue peu avant celle-ci, a permit d’alimenter la polémique liées aux libertés individuelles ; elle concerne le Journaliste Mokhtar Laghzioui. Ce dernier, a été le sujet du rassemblement de millions d’adeptes sur Youtube appelant à son assassinat, pour avoir défendu la liberté individuelle de tout un chacun de disposer de son corps.

Le plaidoyer de ce journaliste suppose le droit légitime au plaisir sexuel entre partenaires libres et consentants mais ne signifie en rien l’adultère ou la pornographie, comme ce que déclarent les obscurantistes. Quelques jours plus tard, la militante des droits de l’Homme Betty lachgar reçoit aussi des menaces de mort.

Cependant, la réaction rapide de la justice à l’encontre du cheikh Nahari, premier à appeler au meurtre de ce journaliste, désormais poursuivi pour incitation à la violence constitue un énorme pas. Le gouvernement désire montrer qu’il se dresse devant toute dérive extrémiste. Mais le nombre des adeptes adhérant à l’idéologie de Nahari demeure inquiétant. Ce nombre important est du en partie au fait que l’Etat marocain a toléré pendant des années les idées salafistes présentes aussi bien dans le cadre de l’enseignement que dans certains programmes télévisés. Néanmoins, il est temps de ne plus tolérer les intolérants.

Source : E-Plumes, 9 juillet 2012

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