Hocine Adryen
Une situation postrévolutionnaire qui dure depuis un mois, caractérisée par de grandes marches pacifiques, une situation politique des plus imprévisibles et un pays sans gouvernement, -seuls un Premier ministre et son second ont été désignés -pour diriger les affaires courantes depuis plus de dix jours : voilà en résumé la situation générale du pays après l’annonce par le président Abdelaziz Bouteflika du report de la présidentielle du 18 avril et son renoncement à un 5e mandat.
Que va-t-il se passer maintenant que le peuple et les gouvernants se regardent en chiens de faïence ? Chaque partie ne veut rien lâcher et chacun campe sur ses positions initiales. D’un côté le mouvement exige le départ de tout le système et la fin du mandat du président Bouteflika qui arrive à son terme au soir du 28 avril. De l’autre le pouvoir maintient sa feuille de route déclinée à travers la préparation d’une conférence nationale inclusive regroupant tous les acteurs de la société. Cette conférence sortira avec un agenda électoral précis, à commencer par la tenue d’une présidentielle pour permettre au pays de faire le grand saut démocratique.
Pour l’instant la vie publique est rythmée par les retournements de veste, les trahisons, les remises en cause et les déchirements. Mais en aucun cas un sursaut qui pourrait indiquer la marche à suivre. Pourtant les propositions de sortie de crise affluent de partout. Des partis dits de la mouvance présidentielle aux partis de l’opposition multiple. La dernière en date, celle d’une partie de l’opposition réunie au siège de Adala de Abdallah Djaballah, qui met en avant une solution politique dans le cadre de la légitimité populaire prévue par l’article 7 de la Constitution.
Le document stipule « la fin du mandat présidentiel, la mise en place d’une période de transition courte, qui sera gérée par une instance présidentielle constituée de personnalités nationales reconnues pour leur crédibilité, leur intégrité et leur efficacité ». Cette instance aura la charge de désigner « un gouvernement de compétences nationales pour la gestion des affaires courantes, la création d’une instance indépendante en charge de préparer le nouveau dispositif électoral (révision de la loi électorale et mise en place du mécanisme de surveillance).
Un processus au bout duquel sera élu un nouveau président de la République, dont l’élection marquera alors le retour à la légalité constitutionnelle. Pour elle, « la ligne droite est le plus court chemin d’un point à un autre » serait l’application de l’article 102 de la Constitution qui permet de « révoquer le Président pour des raisons de santé ». Ce qui permettrait au président du Conseil de la nation d’assurer l’intérim pour une période de 90 jours au cours desquels sera organisée une nouvelle élection présidentielle et retourner à la légitimité », dit-elle.
Le FFS, quant à lui, indique qu’il est en train de mettre les dernières retouches à une « initiative de sortie de crise » qui passe, naturellement, d’après lui par l’élection d’une Assemblée constituante. Le parti de feu Hocine Aït Ahmed plaide pour une transition d’environ « six mois » pour mettre en place les conditions politiques et réglementaires « devant encadrer le changement du régime ».
Enfin, la proposition du président Bouteflika repose sur l’élection d’un nouveau président démocratiquement élu qui, fort de la légitimité populaire qui lui est donnée par les urnes, aura à engager le processus pour changer la Constitution, convoquera des élections législatives anticipées.
La deuxième République pourra alors se construire avec le peuple et ses nouveaux élus. Sinon le peuple continuera à manifester pacifiquement tous les vendredis jusqu’au terme du mandat du président Bouteflika le 28 avril. L’Algérie entrera alors dans une étape indécise, voire dangereuse pour son unité et sa stabilité.
Source: Le Jeune Indépendant, 25 mars 2019
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