par Mahdi Boukhalfa
A ce stade des événements marquant les péripéties de la prochaine élection présidentielle, il est raisonnable de penser que le président Bouteflika va, cette fois-ci encore, se présenter. Les quatre partis de la majorité, épaulés par les organisations patronale FCE et syndicale UGTA, et des moudjahidine notamment, ont lancé dans le bain de la compétition électorale leur candidat et il ne reste à celui-ci qu’à présenter officiellement ses intentions politiques aux Algériens.
Si beaucoup pensent que c’est le mandat de trop, et ils ne se recrutent pas seulement au sein de l’opposition, il est une vérité que l’opposition algérienne est désunie et, plus que tout, que les milieux politiques de cette opposition éclatée se sont toujours contentés de jouer ce rôle, sans pour autant aller plus en avant, en aller chercher eux également le pouvoir. Cette frilosité à aller sur le terrain du combat politique pour ses idées, pour défendre ses convictions face à un pouvoir tout puissant, on ne le voit pas dans cette factice confrontation entre un pouvoir superpuissant et une opposition qui n’est là que pour jouer un triste rôle de figuration.
Qu’à Dieu ne plaise, cette élection présidentielle sera elle aussi menée par une seule partie et les électeurs, la société civile ainsi que les observateurs devront se résigner à suivre la prochaine entrée sur le terrain des soutiens à la 5ème candidature du président Bouteflika, avec l’annonce officielle de cette éventualité longtemps repoussée et toujours rejetée par l’opposition.
Pour autant, et loin des certitudes de l’opposition et de l’attentisme politique des opportunistes qui attendent de voir d’où vient le vent, ce que tout le monde oublie, est que le peuple algérien, les électeurs, ceux notamment qui vivent loin des villes et leur tumulte, ceux qui se lèvent à l’aube pour aller travailler leurs champs, ou ceux qui font tourner le pays à leur manière, qui dans les usines ou les bureaux, ne jugent que sur pièce. Et que tous les discours de l’opposition sur des concepts politiques comme «démocratie», «alternance au pouvoir» ou «bonne gouvernance», qu’ils ne comprennent pas vraiment, ne les touchent pas dans leur vie quotidienne.
Par contre, un prix subventionné du pain et du lait, des semences, le logement social ou l’accès à la propriété foncière agricole, l’AEP et le gaz de ville sont un langage que les électeurs de l’intérieur ou du pays profond comprennent. Pas le discours sur «les droits de l’homme» ou «la liberté d’expression», et c’est toute la différence sémantique, politique que les partis d’opposition n’ont pas su ou pu construire en direction d’un électorat, d’un peuple qui en définitive ne jure que par ce qu’il a entre les mains. Et non pas des concepts politiques tout juste bons à animer des débats byzantins dans les salons du microcosme politique algérois.
Cette différence existentielle entre les deux faces de l’Algérie, celle qui trime et qui se suffit d’un peu de pain, d’un toit, d’eau et beaucoup de paix sociale et celle qui rêve d’étoiles lointaines, a déjà creusé les lignes de démarcation entre l’opposition, otage de ses contradictions qui l’ont toujours éloignée des réalités sociales, et le pouvoir qui puise sa puissance dans la satisfaction des besoins élémentaires du peuple: un toit, du travail, la sécurité. A moins que dans les prochains jours il n’y ait une autre direction à cette présidentielle qui voudrait qu’il y ait, malgré tout, une union de l’opposition pour lancer un candidat unique. Cela aura le mérite de donner plus de crédibilité à la prochaine présidentielle.