Algérie: Houari Manar, ce mort qui a affranchi les vivants

Il s’appelle Houari Manar. Bourré de vie, de musique, d’optimisme et de jeunesse, fut l’artiste. Il n’a légué à la cité, à ses fans que de l’amour et des chansons et le grand sourire.

Sa mort spectaculaire et précoce, sa fin triste et bouleversante a mis la société algérienne à nu ; une société marquée par la culture du racisme et de l’homophobie.

La mort du chanteur nous a fourni une image impitoyable, longtemps dissimulée, de notre soi-disant élite. Soi-disant intelligentsia !

Les débats publics sur les réseaux sociaux commentant la mort du chanteur Houari Manar dans une clique algéroise, est l’image de ce que l’école algérienne a produit de monstres, depuis l’indépendance.

La plupart des commentateurs de cette mort sont le fruit de cette école de l’obscurantisme et de l’enfermement. Une école qui depuis un demi-siècle n’a cessé d’enseigner aux enfants de l’Algérie indépendante la leçon de la haine conjuguée à celle de l’hypocrisie religieuse.

Ce débat est chargé de la haine, contre le chanteur, tout simplement parce que ce dernier n’a pas caché sa nature sexuelle. La société hypocrite n’a pas pu accepter cette liberté individuelle déclarée.

La mort de Houari Manar et les débats publics ségrégationnistes et haineux sans masque aucun qui l’ont suivie nous renvoient à une réalité amère d’une société se trouvant au fond du gouffre caractérisée par:

1- Le silence des intellectuels d’avant-garde face à cette culture raciste généralisée. Ni les universitaires dits intellectuels modernistes ou laïques, ni les artistes qui se voient dans le courant futuriste ou d’ouverture n’ont condamné fermement cet acte raciste répugnant. Si cela s’était produit dans un pays européen ou américain, beaucoup de personnes auraient été inculpées et ainsi jugées pour racisme et xénophobie.

2- Tout le débat haineux autour de la disparition tragique du jeune artiste Houari Manar est resté encellulé dans un seul espace qui est le discours “religieux” islamique. Les commentateurs homophobes se basaient sur un même référent commun qui n’est que la religion islamique. Tous ont justifié leur acte de refus, leur haine, leur racisme par le rappel aux hadiths et aux versets coraniques. Et même ceux qui ont pris le camp de Houari Manar, avec beaucoup de distance, eux aussi, traduisaient leur acte de sympathie, et en réponse aux autres, par d’autres hadiths et d’autres versets coraniques.

3- Tout le monde est dans le même carré religieux! Et cela signifie l’absence totale de la culture universelle, la culture des droits de l’homme, la culture du vivre-ensemble.

4- La perte tragique du chanteur Houari Manar est sans doute une occasion pour les élites sociologiques, psychologiques, pédagogiques et politiques, de penser et repenser la source de cette violence aveugle qui gangrène notre société ?

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