Descendant du prophète Mahomet, Mohammed VI, roi du Maroc depuis 1999, semble, pour l’heure, à l’écart de l’agitation qui, de l’Algérie au Yémen en passant par la Tunisie et l’Égypte, gagne comme une traînée de poudre le monde arabe, du Maghreb à la péninsule arabique.
Les menaces sont pourtant réelles et le gouvernement vient de réaffirmer sa volonté de maintenir les subventions sur les produits de base comme la farine, le sucre, l’huile ou le gaz butane afin d’éviter une hausse des prix qui pourrait enflammer un pays où les inégalités sont vertigineuses.
La plupart des opposants au régime de Rabat ne disent mot sur l’actuel chef de la dynastie alaouite, établie depuis le XVIIe siècle sur le trône marocain. M6 comme le surnomment certains irrespectueux, agacés par son côté bling-bling est protégé par son statut de Commandeur des croyants. Et après seulement onze ans de règne, il ne connaît pas encore l’usure politique d’un Hosni Moubarak, d’un Zine el-Abidine Ben Ali ou d’un Ali Abdallah Saleh, aux commandes de l’Égypte, de la Tunisie et du Yémen depuis des décennies.
Mais l’écart entre la fortune de certains Marocains, dont le roi lui-même, à la tête d’un patrimoine de près de 2 milliards d’euros ce qui le place au 7e rang des monarques les plus riches du monde, devant Élizabeth II ou l’émir du Koweït, selon un classement du magazine Forbes et les cinq millions de miséreux vivant avec moins d’un euro par jour, dans un pays où le salaire minimum est de 5 euros par jour, est le talon d’Achille du régime.
D’autant qu’en montant sur le trône après son père, Hassan II, un roi controversé qui n’hésitait pas à recourir à la terreur pour se débarrasser d’opposants comme le général Oufkir, mort au soir d’une tentative de putsch en 1972 et dont l’épouse et les six enfants furent emprisonnés pendant une vingtaine d’années, Mohammed VI représentait l’espoir d’une réelle démocratisation et d’un meilleur partage des richesses.
Las, si quelques ouvertures ont éclairé le début de son règne, comme la réintégration de l’opposant de Hassan II, Abraham Serfaty (1926-2010), détenu pendant dix-sept ans puis expulsé en 1991, dans sa nationalité marocaine en 2000, les espoirs semblent évanouis. Rien que pour les journalistes, le tour de vis a été sensible, comme le relève l’ONG Reporters sans frontières qui abaisse le Maroc au 135e rang mondial dans son rapport 2010.
Le mouvement islamiste « Justice et bienfaisance », interdit mais toléré, a d’ailleurs appelé en début de semaine à « un changement démocratique urgent » et à « l’établissement de mécanismes mettant fin à l’autocratie », mais aussi réclamé « l’abrogation » de l’actuelle constitution qui donne des pouvoirs étendus au roi. De jeunes Marocains ont également lancé sur Facebook un mouvement en faveur de manifestations pacifiques, le 20 février pour une « large réforme politique ».
Moulay Hicham, cousin de M6, surnommé « le prince rouge » en raison de ses critiques contre la monarchie, estime que le Maroc « ne serait sans doute pas une exception » dans le mouvement de contestation actuel. L’explication tient dans les constatations de l’économiste Najib Akesbi : le Maroc, fort de 32 millions d’habitants, c’est aussi « une population jeune, largement désoeuvrée, en butte à des problèmes de formation et d’emploi et sans perspective d’avenir avec un horizon politique assez fermé ». Un pays plus touché par le népotisme et la corruption (85e rang) que la Tunisie (59e), selon le dernier classement de Transparency International.
P:S. : L’article a été supprimé par les lobbyistes du Makjhzen
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