Il s’agirait certainement de l’événement politique le moins connu et le plus inintéressant pour l’opinion publique. Ils sont des milliers d’élus APC et APW, dits collège des grands électeurs, de différentes sensibilités qui seront invités aujourd’hui à désigner de nouveaux membres qui siégeront au Conseil de la nation. Ce sont les fameuses sénatoriales.
L’opération devra concerner le renouvellement de la moitié des sièges du Sénat.
A première vue, rien ne sera chamboulé. Ces élections, depuis la création de l’institution par le président Liamine Zeroual, n’ont jamais perturbé le paysage politique national, ni créé un quelconque séisme sur la stabilité du pays. Depuis toujours deux partis, le FLN et le RND, dominent le fonctionnement de ce conseil, aidé encore par les membres du tiers présidentiel qui, eux, échappent aux contingences partisanes car désignés par le chef de l’Etat.
Aujourd’hui, ce sera encore le cas. La querelle qui oppose le FLN et le RND sur ce vote est un simple prétexte politique qui alimente les chroniques.
En dépit de ses crises internes et des grognes organiques perpétuelles, le FLN de Bouchareb est bien parti pour remporter un succès indiscutable. Grâce à son armée d’élus dans les Assemblées populaires, le vieux parti ne nourrit pratiquement aucune crainte sur sa suprématie. Mieux, il sera soutenu dans plusieurs wilayas par des élus d’autres partis politiques, comme le Front El Moustakbel et la mouvance islamiste.
Il est vrai que certaines notabilités du FLN n’ont jamais pu accepter les secousses qui ont causé l’éjection de Ould Abbès et de Bouhadja et l’émergence d’un nouveau patron, qui semble posséder ses propres relais et ses soutiens au plus haut niveau de l’Etat. Il aura fallu attendre la dernière minute pour connaître les vrais choix du FLN, d’autant que des changements ont eu lieu dans une douzaine de wilayas, en dépit des primaires et de ses résultats. Pour les nouveaux dirigeants du FLN, il faut justement mettre des sénateurs, qui seront de facto membres du futur comité central et congressistes au dixième congrès extraordinaire qui aura lieu prochainement. Car l’enjeu est strictement partisan. C’est de ce congrès qu’émanera la nouvelle direction politique nationale du parti.
Pour le RND, il s’est contenté d’alliances régionales avec le PT et le MPA, ou Taj, mais sans pouvoir espérer une domination totale. Ses candidats sont en ballotage favorable dans certaines wilayas, à moins d’un retournement de veste.
Car, des surprises il y en a dans ces sénatoriales. La course vers le poste de membre du Conseil de la nation est devenue depuis des années une ambition qui se construit et s’achète au prix de milliards. Le poste est avant tout un statut, au-delà du salaire et de la rente qu’il procure, ainsi que des privilèges de toutes sortes. C’est cette immunité parlementaire et cette puissance ou pouvoir de peser sur les décisions locales et régionales qui sont recherchées. C’est aussi le meilleur moyen de relancer ses affaires et de les rendre florissantes. Tout le monde connaît le phénomène de la « chkara » qui s’est incrusté durablement dans les sénatoriales. Les élus du FLN sont capables de voter pour un autre, moyennant une belle prime, tout comme les autres élus RND, sous prétexte d’être déçus des choix de leur direction nationale.
L’indiscipline est garantie dans ces élections. De l’argent, mais aussi des arrangements qui dépassent parfois les prérogatives des walis. Durant ces derniers jours, on rapporte de cas de ces arrangements locaux, de chantages déguisés, de clientélisme et de népotisme avéré.
De nouvelles formes de corruption qui se font avec l’aide de certains hauts fonctionnaires de l’administration.