Les 6 raisons qui expliquent le sous-développement de l’Algérie

Le sous-développement économique de l’Algérie n’est pas un hasard. Ce n’est pas aussi une malédiction. Ce sous-développement s’explique par des raisons objectives, des faits concrets et des réalités socio-politiques palpables. En se basant sur plusieurs expertises et enquêtes de terrain, nous pouvons au moins recenser 6 raisons qui expliquent le sous-développement de notre pays. Les voici :

1 – Après plus de 20 ans des reformes engagées par l’Algérie, l’économie reste encore dépendante vis-à-vis des hydrocarbures (pétrole et gaz). Les exportations hors hydrocarbures restent marginales (à peine 3% des exportations totales) et les résultats économiques sont quasiment liés aux changements de la demande et des prix des hydrocarbures. Le secteur des hydrocarbures engendre d’environ 70 % des recettes budgétaires, ce qui constitue une source de fragilité de l’économie algérienne. Vis-à-vis de
cette situation, le gouvernement a lancé des actions visant à étendre la participation des autres secteurs (hors hydrocarbures) à la formation de la valeur ajoutée. C’est ainsi qu’il a entrepris :

– le lancement d’une politique de développement des infrastructures, tournée vers le rééquilibrage régional afin d’encourager le réaménagement spatial de l’activité économique ;

– le renforcement du rôle de la PME via la garantie des crédits bancaires, l’utilisation de nouveaux instruments de financement de l’économie (société de capital investissement, leasing), la réduction de la pression fiscale et parafiscale et la création d’un Fonds national d’investissement et de 48 Fonds locaux d’investissement, doté d’un capital de 1 milliard de DZD. Ces mesures doivent être renforcées par des restructurations approfondies au niveau sectoriel, afin de participer réellement à diversifier les sources de croissance et améliorer la compétitivité de l’économie

2 – Hydrocarbures et syndrome hollandais en Algérie : Les économies exportatrices d’hydrocarbures sont généralement confrontées au phénomène du syndrome hollandais.

Les pays victimes de ce phénomène touchent d’énormes revenus en devises, qui sont captés et exploités par l’Etat. Cette particularité se traduit par une surévaluation de la monnaie nationale, ce qui conduit en conséquence à un manque de compétitivité pour les autres secteurs, d’où leur contraction et leur transformation à des économies de répartition de la rente plutôt que des économies de création de valeur à partir du travail. Le syndrome hollandais se figure dans :

– L’appréciation de la monnaie nationale,

– La création d’une économie rentière.

Finalement l’économie se transforme d’un système organisé autour de la production, avec une interdépendance forte entre les différentes branches de l’économie, avec une insertion sociale des individus par le travail, en une économie où les importations remplacent de plus en plus la production nationale de biens industriels et agricoles autres que les hydrocarbures, en une économie où les revenus sont perçus non plus comme la rémunération d’un travail productif, mais comme le fruit d’un comportement de clientélisme à l’égard des détenteurs du pouvoir de captation de la rente pétrolière et gazière, dans une économie devenue économie de répartition ».

Le vrai problème qui menace l’économie algérienne c’est sans doute celui de la dépendance vis-à-vis les hydrocarbures (problème structurel). L’économie reste toujours dépendante d’une manière forte aux exportations d’hydrocarbures et elle est donc sensible aux pressions exercées sur les cours du pétrole et sur la production pétrolière. Néanmoins, les perspectives de croissance à court terme sont prometteuses.

3 – Déséquilibres dans le développement régional : L’économie algérienne demeure confrontée à de considérables déséquilibres régionaux. L’essentiel de la population et des activités économiques sont regroupées dans la frange maritime, qui ne constitue qu’environ 4% du territoire. D’amples territoires au sud, représentant près de 87% de la surface du pays, demeurent sous peuplés (9% de la population) et dotées de manière insuffisante en infrastructures économiques et sociales. En plus de cette fragmentation d’ordre territorial, l’Algérie a connu entre 1980 et une importante urbanisation, avec une population urbaine qui est passé de 40% en 1977 à près de 70% en 2010. Cette importante migration vers les villes, est l’une des raisons de la dégradation des conditions de vie des populations tant en zone urbaine que rurale. Ces considérables déséquilibres représentent un défi majeur pour l’économie algérienne.

4 – Climat des affaires non propice au développement du secteur privé : Le climat des affaires constitue l’une des entraves majeures qui empêchent le développement du secteur privé et son rôle en tant que moteur de croissance. Concernant cette contrainte, examiner plus en profondeur les réformes pour doter l’Algérie d’un climat des affaires propice à l’initiative privée, est un impératif. Il s’agit surtout de poursuivre la mise à niveau et le développement des infrastructures, d’accroitre l’efficacité de certains services publics (justice, impôts, douanes, etc.), d’améliorer les procédures administratives et de faciliter les conditions d’accès des PME au financement.

5- Insuffisance de l’efficacité du secteur bancaire et financier : Encore beaucoup dominé par le secteur public (Le secteur bancaire est dominé par six banques publiques, qui représentent 90 % à 95 % de l’ensemble des dépôts et des actifs), le système bancaire algérien1, participe de manière insuffisante au financement du secteur privé. Le marché des capitaux reste pareillement en retard et n’offre qu’un nombre limité d’outils et de sources alternatives au financement bancaire. Ce qui signifie:

– la prise des mesures qui assistent les banques à moderniser leurs pratiques et procédures;

– la mise en place des instruments plus adaptés au financement de l’investissement privé;

– le renforcement du contrôle des banques.

6 – Faiblesse des capacités de l’administration publique : La réalisation efficace de l’ample Programme d’Investissements Publics (PIP 2010-2014), d’environ 286 milliards USD, exige une administration performante capable à gérer de manière efficace les ressources publiques. Or, la faiblesse institutionnelle, de la planification stratégique, de l’évaluation et du suivi des projets, qui demeurent des conditions sine qua non, sont encore présents, pour que ce programme réalise ses objectifs.

En effet, les calendriers initiaux établis pour l’exécution des grands projets ne sont pas généralement respectés. Le nombre important des acteurs impliqués dans la réalisation du programme d’investissements publics constitue, pareillement, un grand problème pour l’administration algérienne. Dans ce cadre, les pouvoirs publics devront, continuer leurs efforts pour améliore et renforcer les capacités de l’administration concernant la coordination de politiques publiques ainsi que de conception et de mise en œuvre du programme d’investissements publics.

En guise de conclusion, nous pouvons aisément affirmer que l’Algérie ne pourra jamais se développer au sens propre du terme si elle ne remédie pas concrètement à ces 6 dysfonctionnements. Des solutions rationnelles et efficaces existent bel et bien. Mais il faut un mode de gouvernance politique qui peut insuffler une réelle dynamique de développement.
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