Alors que les schémas de migration de l’Afrique vers l’Europe se déplacent vers l’ouest, les dirigeants européens focalisent leur attention et leur argent sur les efforts visant à endiguer le trafic humain en croissance rapide entre le Maroc et l’Espagne.
Alors que les schémas de migration de l’Afrique vers l’Europe se déplacent vers l’ouest, les dirigeants européens concentrent leur attention et leur argent sur les efforts visant à endiguer le trafic humain en croissance rapide entre le Maroc et l’Espagne. Les responsables marocains et européens ont convenu la semaine dernière d’un programme de financement d’urgence de 160 millions de dollars, faisant de ce pays nord-africain le troisième plus gros bénéficiaire de fonds de l’Union Européenne à cette fin.
Une grande partie de cet argent servira à renforcer la sécurité des frontières, selon Mustapha El Khalfi, porte-parole du gouvernement marocain. Environ 50.000 dollars seront dépensés pour sécuriser les routes maritimes vers l’Espagne et les vastes frontières du désert avec l’Algérie et la Mauritanie.
Le Maroc dit qu’il a déjà 13.000 agents de sécurité déployés pour faire face au flux croissant de migrants en quête d’atteindre l’Espagne.
Des unités de la police anti-émeute campent en permanence le long des frontières avec Ceuta et Melilla – deux enclaves espagnoles sur la côte méditerranéenne marocaine -, tandis que la marine met en place des postes de garde le long des plages et patrouille le long de la côte pour intercepter les bateaux chargés d’immigrants partis en direction de l’Espagne.
La pression exercée sur les frontières espagnoles résulte du succès relatif des efforts visant à atténuer le flux de migrants en provenance de la Libye et d’autres pays plus à l’est. Cela a détourné le flux de migrants vers le nord-ouest de l’Afrique, où le nombre de migrants traversant le détroit de Gibraltar a triplé au cours de l’année écoulée.
Selon le gouvernement marocain, environ 55.000 Africains, principalement originaires de pays d’Afrique subsaharienne, mais comprenant de plus en plus de Marocains, ont tenté de se rendre en Espagne. La plupart sont originaires de Syrie, du Yémen, de Côte d’Ivoire, de Guinée, de République Centrafricaine et du Congo.
Le gouvernement espagnol rapporte que 43000 immigrants ont quitté le Maroc cette année, soit deux fois plus qu’en 2017. Plusieurs milliers d’autres ont franchi les barrières frontalières autour de Ceuta et de Melilla pour atteindre le sol espagnol.
« Il est nécessaire d’être vigilant face à l’évolution de la situation en Méditerranée occidentale et, dans ce contexte, de renforcer la coopération avec le Maroc », a déclaré le président du Conseil Européen, Donald Tusk.
Le président de la Commission européenne, Jean Claude Junker, a annoncé qu’il se rendrait au Maroc en février. D’après des responsables du ministère espagnol des Affaires étrangères, l’approbation par l’UE du nouveau programme d’aide fait suite à une réunion des chefs d’État de l’UE la semaine dernière au cours de laquelle le Premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, a qualifié le besoin d’urgence.
Un sommet entre les ministres de la Sécurité de l’UE et d’Afrique du Nord est également prévu à Rabat à la fin de cette année.
Le paquet d’aide représente une augmentation importante du financement de l’UE en faveur du royaume d’Afrique du Nord, selon des responsables de l’UE.
Les responsables du gouvernement marocain ont exprimé leur « satisfaction » à ce sujet, bien que certains analystes à Rabat rappellent que le montant est inférieur au besoin compte tenu du rôle croissant joué par le pays en tant que passerelle des migrants vers l’Europe.
Un responsable du ministère marocain des Affaires étrangères qui a demandé l’anonymat a déclaré que son gouvernement avait accepté ce montant, à condition que les fonds soient débloqués immédiatement. Le Maroc affirme avoir légalisé le statut de 50000 migrants transitant par le pays au cours des cinq dernières années.
Mohammed Ali, un conseiller municipal chargé des questions d’immigration dans la ville de Kasser-al-Kabir, a déclaré que l’UE promettait depuis longtemps d’accroître son aide au Maroc et avait utilisé des fonds réservés aux programmes d’éducation et de développement, ainsi que d’autres subventions pour faire pression sur les autorités en vue de les amener à coopérer en matière de migration.
La moitié des fonds de l’UE destinés au Maroc sera acheminée par l’intermédiaire du Centre International pour le Développement des Politiques de Migration, dont le siège se trouve à Vienne, et par d’autres fondations publiques travaillant dans des projets humanitaires.
Selon Rashid Jellouli, qui gère l’un de ces programmes, intitulé « Retour vers de meilleures opportunités », il s’agit notamment des efforts visant à assimiler les migrants subsahariens aux sociétés des pays de transit.
Les 80 millions de dollars restants sont directement injectés dans le budget du gouvernement marocain pour 2019, selon des responsables diplomatiques espagnols qui ont joué un rôle de premier plan dans la négociation du programme d’aide.
C’est toujours bien en deçà des 304 millions de dollars que l’UE a alloués chaque année à la Libye, point de départ de dizaines de milliers de migrants en partance pour l’Italie chaque année. Mais cela représente une augmentation considérable par rapport au montant estimé de 17 millions à 22 millions de dollars que le Maroc a reçu de l’UE l’année dernière lorsque les voies de migration ont commencé à se déplacer vers l’Afrique du Nord-Ouest.