Le double visage de Bruxelles

par Moncef Wafi
La décision de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) du 21 décembre est «contraignante». L’aveu fort de Nicholas Westcott, haut diplomate européen, consacre le dilemme de l’Europe entre l’application des décisions de sa propre justice et ses juteux intérêts commerciaux gracieusement offerts par le Maroc. Bruxelles se retrouve ainsi à chipoter, hésiter et tergiverser alors que le droit est du côté des Sahraouis. 
Les dernières révélations de l’Observatoire des ressources naturelles du Sahara occidental (WSRW) sur la transgression de la sentence de la CJUE, deux semaines seulement après avoir été rendue, ont braqué les lumières sur cette hypocrisie tout occidentale, adepte d’une politique à deux leviers applicable selon ses propres besoins. Si le diplomate européen reconnaît la nécessité de «respecter toute décision prise par la justice» et de veiller à son application, il n’abdique pas pour autant, relayant les lobbys de l’argent. Il expliquera dans ce sens que Bruxelles examine «de façon précise les argumentaires de la CJUE» et «ses implications sur le plan juridique pour appréhender ses conséquences». 
Décryptage: le message subliminal est adressé aux Marocains et signifie que l’Europe va prendre le temps de riposter et de rectifier le tir. Les intérêts commerciaux du Vieux Continent, particulièrement, en ces temps de crise économique mondiale sont plus importants que le sort d’un pays qui reste toujours sous occupation étrangère. L’Europe ne déroge pas à ses vieux réflexes coloniaux et malgré un discours de façade épousant la légitimité internationale à propos du dossier sahraoui, certains pays, à leur tête la France, continuent de parrainer les thèses marocaines. 
Bruxelles n’en démord pas et les territoires sahraouis sont pour l’UE une chasse gardée naturelle replaçant le conflit du Sahara occidental au centre de ses priorités avec l’ONU et son nouveau secrétaire général, Antonio Guterres. L’autre front juridique ouvert par le Polisario concerne le recours qu’il a introduit, en 2014, contre le protocole conclu en 2013 entre l’UE et le Maroc dans le cadre de l’accord de partenariat dans le secteur de la pêche, qui consacre l’exploitation outrageuse et avec la complicité active de Bruxelles des ressources halieutiques et de produits de la pêche au large des côtes sahraouies. Un poisson appartenant au Sahara occidental, pêché par les bateaux européens et payé aux Marocains.
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