Des événements graves se déroulent, depuis plusieurs jours, dans la zone-tampon délimitée par l’ONU pour séparer le Sahara occidental et le Maroc. Les instances internationales sont alarmées par une escalade qui risque de déboucher sur une reprise imminente du conflit armé. Le Conseil de sécurité se réunira dans deux jours pour tenter de désamorcer cette crise.
Abla Chérif – Alger (Le Soir) – Tout a commencé le 16 août dernier lorsque les autorités marocaines ont ordonné à des chasseurs bombardiers de faire incursion dans la zone de Guerguerate, un no man’s land délimité par l’ONU lors de la signature de la trêve entre Marocains et Sahraouis en septembre 1991. Guerguerate est officiellement sous contrôle onusien. Les clauses de la trêve signifient clairement que toute incursion militaire, aérienne ou terrestre est considérée comme une violation de l’accord. Mohammed VI le sait pertinemment, mais il ose.
Ces chasseurs bombardiers ont violé ce 16 août la zone-tampon en faisant fi de l’accord signé par son père, Hassan II, et des troupes de surveillance des Nations-Unies chargées du maintien du cessez-le-feu. Au cours de la même journée, le porte-parole du gouvernement organise une conférence de presse pour tenter d’expliquer le geste grave que son pays vient de commettre. Le survol de cette zone par l’aviation marocaine entre, selon lui, dans une stratégie nationale engagée par son pays contre les contrebandiers et les terroristes. Il livre quelques chiffres d’arrestations et met y compris en exergue sa volonté de lutter contre les trafiquants de drogue…
Ce discours sonne creux aux oreilles des Sahraouis et des instances internationales. Le nouveau président de la RASD, (République arabe sahraouie démocratique) saisit immédiatement les Nations-Unies et alerte l’opinion internationale sur la violation du cessez-le-feu. Brahim Ghali adresse une lettre à Ban Ki-moon et l’informe de ce pas supplémentaire que vient de franchir le roi en matière de provocation. Mohammed VI vient difficilement d’accepter le retour d’une partie du personnel de la Minurso (Mission des Nations-Unies pour le référendum au Sahara occidental), qu’il avait chassé en mars dernier.
83 Casques bleu onusiens avaient été carrément chassés de leur base et renvoyés chez eux à l’heure où le roi engageait un bras de fer inédit avec le SG de l’ONU et une partie de la communauté internationale dans une tentative de coup de force destinée à en découdre avec le problème sahraoui.
Mis à mal par une décision du tribunal européen de rompre d’importants accords financiers avec le Maroc, acculé par le Conseil de sécurité qui ordonne le retour du personnel de la Minurso et la reprise des négociations directes avec le Front Polisario, semble donc avoir opté pour une autre stratégie. Une stratégie de diversion «destinée à vendre aux Européens l’idée qu’il est entré en guerre contre les trafiquants de drogue. Il lui fallait impérativement une opération de diversion même la stratégie d’intégrer l’Union africaine n’a pas fonctionné pour lui. Seulement sa stratégie est dangereuse».
Ban Ki-moon a saisi par deux fois le Conseil de sécurité pour faire part de sa grande inquiétude. Il a été suivi par l’Union européenne qui a évoqué ce vendredi l’impuissance des Nations-Unies dans un conflit qui risque de compromettre la stabilité régionale. Il y a trois jours, et suite à une nouvelle incursion de l’aviation marocaine à Guerguerate, le Front Polisario a mis à son tour en place un système de défense aérien pour parer à toute éventualité. Les Sahraouis évoquent une situation très tendue au sein de leur population, les jeunes en particulier, partisans d’une reprise des hostilités en raison de l’impuissance des Nations-Unies.
Conscientes de l’imminence d’un dérapage aux conséquences incalculables, l’ONU tente, depuis plusieurs jours, de calmer le jeu à travers des pourparlers qui se mènent en off dans les couloirs des Nations-Unies.
Hier, les dirigeants de la RASD se sont à nouveau réunis pour prendre de nouvelles décisions militaires en attendant que le Conseil de sécurité se penche sérieusement sur le dossier ce mercredi.
A. C.
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