La demande d’admission passe par l’Acte constitutif de l’organisation
L’Union africaine a répondu à la demande non officielle du Maroc de réintégrer l’Organisation africaine. Plutôt d’y adhérer. Le Maroc n’est pas cité dans le compte-rendu de la 617e réunion du Conseil de paix et de sécurité de l’UA, tenue vendredi, mais c’est bien de lui qu’il s’agit, nul doute sur cela. C’est bien lui qui venait de crier fort sa décision d’en être membre non sans appeler, voire «exiger», l’exclusion d’un autre membre, pourtant fondateur, qu’est la Rasd.
Ce même membre dont l’admission à l’ex-OUA (Organisation de l’union africaine), en 1984, a suscité la grande colère du père Mohamed V qui est allé jusqu’à quitter l’Organisation, refusant d’y siéger avec un adversaire. Mohamed VI prétend que c’est à la demande de pays membres de l’UA qu’il compte y adhérer. C’est aussi pour pouvoir travailler «de l’intérieur» afin de guérir «un corps malade».
L’arrogance à l’extrême au moment où les démarches se multiplient pour la désignation d’un successeur à la Sud-Africaine Nkosazana Dlamini-Zuma, à la tête de la commission (secrétariat général) de l’UA. Une élection qui devait avoir lieu, le mois de juillet dernier, à Kigali (Rwanda), mais qui a été reportée au mois de janvier prochain faute de candidats «d’envergure». Le Maroc entreprend donc des démarches pour intégrer l’Union africaine. Il a réuni, selon les dires du Roi et de ses relais, les 28 voix nécessaires pour son admission et compte en ajouter 8 autres pour faire valoir sa «condition» d’exclure la Rasd.
Le Conseil de Paix et de Sécurité de l’UA a rappelé, vendredi, «les principes et les objectifs de l’Acte constitutif de l’UA adopté par la Conférence des chefs d’Etat et de Gouvernement à Lomé (Togo) en 2000» et a appelé «tous les Etats désireux d’adhérer à l’Acte à se conformer à ses dispositions», lit-on dans un communique de l’UA, rendu public mardi. Le même document indique que «le Conseil de Paix et de Sécurité de l’UA a souligné l’importance pour tout Etat désireux d’adhérer à l’Acte constitutif, et d’être admis en tant que membre de l’Union, de satisfaire à toutes exigences stipulées dans l’Acte, notamment les articles 27 et 29 (1) et (2), ainsi que les dispositions fondamentales contenues dans l’article 9 (c)».
L’article 27 stipule que «les instruments de ratification sont déposés auprès du Secrétaire général de l’OUA». Aussi, «tout Etat membre de l’OUA peut adhérer au présent Acte, après son entrée en vigueur, en déposant ses instruments d’adhésion auprès du président de la Commission».
L’article 29 précise que «tout Etat africain peut, à tout moment, après l’entrée en vigueur du présent Acte, notifier au président de la Commission son intention d’adhérer au présent Acte et d’être admis comme membre de l’Union. Le président de la Commission, dès réception d’une telle notification, en communique copies à tous les Etats membres. L’admission est décidée à la majorité simple des Etats membres.
La décision de chaque Etat membre est transmise au président de la Commission qui communique la décision d’admission à l’Etat intéressé, après réception du nombre de voix requis». Autrement dit, avant de parler d’une quelconque admission et surtout pas d’évoquer une quelconque condition, le pays désireux d’intégrer l’Organisation, et dans ce cas précis, le Maroc, doit passer par le secrétariat général et faire une demande officielle. Ce qui n’est pas le cas jusqu’à présent, le royaume chérifien occupé à séduire ou amadouer des pays d’Afrique centrale –pourquoi pas d’autres- par des contrats économiques notamment, afin de les convaincre de signer «la motion de suspension» de la Rasd. Une suspension impossible du fait notamment qu’aucun acte anticonstitutionnel n’a été reproché à la République sahraouie pour qu’un pays membres de l’UA, devrions-nous le préciser, demande sa suspension. Le Maroc œuvre pour la constitution d’un bloc solide face à un autre bien plus robuste composé des trois pays phares de l’Organisation africaine: l’Algérie, le Nigeria et l’Afrique du Sud. Le bloc marocain constitué du Sénégal, du Gabon, de la Guinée, de la Guinée équatoriale et paradoxalement du Soudan et de la Libye. Dans cette histoire, l’Egypte et la Tunisie ont affiché leur neutralité.
Dans son rapport, suite à la réunion de vendredi, le Conseil de Paix et de Sécurité de l’UA, a «réaffirmé notamment la nécessité pour l’Etat concerné de s’engager à honorer et à respecter pleinement les principes de l’Union tels que définis dans l’article 4 de l’Acte constitutif». Cet autre article qui stipule, entre autres, «le respect des frontières existant au moment de l’accession à l’indépendance, le règlement pacifique des conflits entre les Etats membres de l’Union par les moyens appropriés qui peuvent être décidés par la Conférence de l’Union, l’interdiction de recourir ou de menacer de recourir à l’usage de la force entre les Etats membres de l’Union, la non-ingérence d’un Etat membre dans les affaires intérieures d’un autre Etat membre, la coexistence pacifique entre les Etats membres de l’Union et leur droit de vivre dans la paix et la sécurité…». Des conditions qui ne cadrent nullement avec le comportement du royaume chérifien qui vise tout le contraire par son intention d’adhérer à l’UA. Dans les coulisses, les deux blocs agissent de façon à empêcher l’action de l’un et la réaction de l’autre. L’Algérie a tranché: pas question d’exclure la Rasd. Le Conseil de Paix et de sécurité de l’UA l’a clairement laissé entendre vendredi. Il n’empêche que le Maroc poursuit dans sa démarche, espérant imposer un candidat «allié» au poste de président de la Commission de l’UA. Les trois candidats présentés, le mois de juillet dernier, n’ont pas fait le poids. Et l’élection d’un successeur de la Sud-Africaine qui n’a quitté l’UA que pour se porter candidate à la présidence de son pays, est loin d’être un simple évènement. C’est tout l’avenir de l’Organisation africaine, et plus encore de l’Afrique et des pays d’Afrique, qui est en jeu. L’Algérie n’a présenté aucun candidat. Notre pays n’est pas demandeur, se satisfaisant de la candidature du diplomate Smaïl Chergui au poste de président de la Commission pour la paix et la sécurité. Un poste pratiquement acquis pour l’Algérie. Reste donc le poste de président de la Commission de l’UA. Aucun candidat potentiel pour le moment. Et la démarche marocaine visant à créer de nouveaux ennuis au sein de cette même Organisation n’est pas pour laisser l’Algérie indifférente au problème et à l’élection du nouveau secrétaire général de l’Organisation africaine. L’Algérie n’a pas déposé sa candidature pour ce poste. Elle n’en a pas manifesté l’intention. Il n’empêche que des voix évoquent le nom de Ramtane Lamamra à ce poste. Un poste clé. C’est même très demandé et fortement souhaité, l’homme connaissant parfaitement les rouages de l’Organisation et les enjeux d’ordre politique et économique. Et l’Algérie a de grandes chances de remporter haut la main l’élection considérant l’intégrité de l’homme et d’autres Algériens ayant marqué leur passage au sein de cette Organisation du temps où elle s’appelait déjà l’OUA. D’aucuns ne peuvent renier les mérites de Ramtane Lamamra, d’Abdelkader Messahel, entre autres, mais aussi de Mohamed Sahnoun, l’ancien ministre des Affaires étrangères, ayant occupé le poste de secrétaire général adjoint de l’UA entre 1964 et 1973. L’on se rappelle également l’ancien président de la République, Ahmed Ben Bella, désigné membre du Comité des sages de l’Union africaine.
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