Le ministre des Affaires maghrébines a fait publiquement connaître la position de l’Algérie au sujet de la volonté marocaine de réintégrer l’UA. Selon lui, un retour au sein de l’organisation africaine est impossible s’il est précédé de conditions.
Abla Chérif – Alger (Le Soir) – Invité à l’émission spéciale de la Chaîne III, M. Abdelkader Messahel a déclaré, hier, qu’«un pays ne peut demander son adhésion à l’UA avec des conditions».
Parmi ces conditions, il a évoqué «la suspension de la République sahraouie démocratique (Rasd)», précisant que «l’acte constitutif de l’Union africaine ne parle à aucun moment de cela». Il ajoute «L’UA a des critères (…) Il y a adhésion d’un Etat, et non pas retour. Lorsqu’on adhère à une organisation, on le fait sur la base des principes et des fondements de cette organisation.
Tout Etat africain peut demander son adhésion, mais elle doit se faire selon les critères bien établis par l’acte constitutif lui-même. Il stipule que ce pays qui veut adhérer à l’Union africaine doit faire une demande remise et notifiée au président de la commission de l’UA ; elle est ensuite distribuée à tous les Etats membres. Si cette demande reçoit l’accord de 28 pays membres (majorité simple) il est admis mais sans conditions (…) Il n’y a pas de suspension, de gel ni de retrait. La suspension ne se fait que s’il y a changement anticonstitutionnel dans un pays». Ce qui n’est pas le cas à l’évidence.
Le 12 novembre 1984, le Maroc avait souverainement pris la décision de se retirer de l’OUA lors du 20e sommet de l’Organisation pour protester contre l’admission de la Rasd. La délégation marocaine, alors conduite par Ahmed Guédira, le conseiller de Hassan II, a lu un message où il faisait des adieux au nom de son roi «en attendant des jours plus sages». Cette décision, il faut le dire, avait provoqué une véritable scission au sein de l’OUA, mais les années qui ont suivi ont enregistré un grand changement puisqu’une trentaine de pays africains solidaires avec l’initiative marocaine ont revus leur position à l’égard de la Rasd.
Trente ans après, Mohamed VI décide de revenir sur la décision de son père en exprimant sa volonté de réintégrer l’Union africaine. Le roi, décontenancé par le retour de choc de ses positions jugées trop intransigeantes à l’égard d’un dossier aussi épineux que celui du Sahara occidental veut laisser entrevoir un changement de cap. Malmené par l’Union européenne en procès depuis 48 heures contre le Maroc pour l’annulation de l’accord agricole qui le lie au Maroc (en raison de l’exploitation des ressources en provenance des territoires sahraouis occupés) Mohammed VI a visiblement décidé d’effacer au plus vite l’image qu’il a donné de lui en faisant part de sa volonté de se ranger dans le cadre de la légalité internationale et continentale. Pour ce, il a lancé il y a quelques jours une grande offensive diplomatique en Afrique pour tenter de réintégrer l’Union africaine. Il a également adressé une lettre au président en exercice de l’UA, M. Idriss Deby, dans laquelle il fait part de la «perspective résolue et sans équivoque (du Maroc) de regagner sa famille institutionnelle». Il se dit «confiant dans la sagesse de l’UA pour rétablir la légalité et corriger les erreurs de parcours».
Le conseiller du roi et tout le staff dirigeant de son ministère des Affaires étrangères ont été récemment dépêchés aux quatre coins du continent africain pour faire aboutir cette volonté. L’Algérie a elle aussi reçu, comme on le sait, une visite d’émissaires. Interrogé sur une éventuelle demande à l’Algérie d’un soutien marocain à une adhésion à l’UA lors de cette visite, M. Abdelkader Messahel a simplement indiqué que l’envoyé spécial était porteur d’un message du roi du Maroc au président de la République ayant trait aux relations bilatérales et à la situation dans la région.
En revanche, le ministre chargé des Affaires maghrébines a fait connaître officiellement la position de l’Algérie vis-à-vis de la volonté marocaine d’intégrer l’UA.
Les clarifications les plus importantes et les plus urgentes sont cependant attendues du côté marocain, du moment que ce pays a toujours conditionné son retour au sein de l’Union africaine au retrait de la Rasd. Jusqu’où ira Mohamed VI ?
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