De notre bureau de Bruxelles, Aziouz Mokhtari
De Bruxelles, l’on sait un peu plus de la folle tentative de Rabat d’exclure la République sahraouie de l’Union africaine. Minutes. A Kigali, le complot du Maroc porté par le Sénégal a lamentablement échoué.
La stratégie adoptée par Rabat-Dakar manquait cruellement d’intelligence, de raffinement. Les observateurs, ici, à Bruxelles, estiment qu’en cette occurrence, la France, traditionnel parrain, n’a pas été convaincue du plan de déstabilisation de la RASD au sein de l’Union africaine présenté par les experts de Mohammed VI. A l’avant-veille de la déclaration de principes (lettre du roi adressée au président en exercice de l’Union africaine), présentée, évidemment, à l’expertise française, Paris et Rabat divergeaient sur, non seulement, la forme mais le fond de l’affaire. La diplomatie française ne souhaitant pas aller au clash avec l’Afrique du Sud, l’Algérie, l’Angola, le Nigeria et une bonne partie d’Africains favorables à la République sahraouie.
Mohammed VI change, précipitamment de posture et charge un autre cabinet de conseillers d’apporter des retouches à la missive adressée à Idriss Deby, en charge de l’exercice tournant de l’UA. Dans cette dernière, il est notamment signifié que le Maroc ne demande pas l’exclusion de la RASD mais qu’il veut mieux «soigner», la maladie de l’intérieur que de «l’extérieur», s’attaque à son père Hassan II en considérant que la sortie de l’Union africaine était une erreur et qu’en 1984 les «Africains étaient mineurs» en acceptant l’adhésion de la République sahraouie en leur sein. Bruxelles, Paris, Washington, Moscou, les garants de la dernière résolution de l’ONU sur le dossier sahraoui, comprennent, dès lors, qu’au Maroc les lignes ont bougé et que Rabat n’était plus rassuré ni rassurant sur la conduite des affaires au Sahara occidental.
L’ONU ne fait pas de cadeau et annonce le retour de la composante civile de la Minurso à Laâyoune occupée, le Quai d’Orsay communique son attachement au processus référendaire des Nations-Unies.
Fédérica Mogherini, Madame affaires étrangères de l’Union européenne refuse tout infléchissement par rapport à la position européenne sur la question, largement favorable, bien que fluctuante, à la cause sahraouie.
De Kigali, les informations qui parviennent au roi ne sont pas bonnes. Le président rwandais, qui accueille le 27e sommet, n’accorde à Mohammed VI qu’une seule faveur, prononcer un discours à l’ouverture pour annoncer la réintégration au sein de l’UE et point c’est tout. Trop peu pour Mohammed VI qui décide de rester à la maison. Macky Sall, le Sénégalais, est alors abandonné à son triste sort. Défendre le Maroc alors que ce dernier refuse d’engager la dernière bataille à Kigali. Mme Zuma reste alors à la tête de la présidence de l’UA jusqu’au prochain sommet, ce qui casse, complètement, les projets de Rabat portés par le malheureux Sall.
En réussissant à introduire la RASD au sein de l’Union africaine, Mohamed Seddik Benyahia savait qu’il frappait un grand coup diplomatique.
Au président Chadli qui lui demandait de ne pas trop précipiter les choses, en attendant une évolution de Hassan II sur le dossier, Benyahia répondit : «Hassan II peut toujours montrer des signes d’évolution, la RASD en dehors ou à l’intérieur de l’Union africaine, cela n’a rien à voir». Chadli accepta, enfin, la doctrine Benyahia.
De 1984, entrée de la RASD au sein de l’Organisation africaine, alors OUA devenue UA, l’on attend toujours des évolutions de la partie marocaine.
Heureusement que Mohamed Seddik était là en 1984, autrement l’on se battrait, aujourd’hui, pour l’entrée ou non au sein de l’UA non pas du Maroc mais de la République sahraouie.
A. M.