Il y a trois jours, nous nous interrogions sur ces mêmes colonnes sur la probabilité que le Maroc fasse amende honorable sur la question sahraouie à l’aube de son plus que probable retour au sein de l’Union africaine. La lettre de circonstance de Mohamed VI vient de nous donner tort. Dans un message adressé au 27e sommet de l’UA qui s’est ouvert ce dimanche à Kigali, le roi marocain a clairement affiché ses intentions. Des intentions qui n’ont rien, mais absolument rien à voir avec les attentes du peuple sahraoui ni des demandes internationales d’organiser un référendum d’autodétermination.
Rabat en retrouvant sa «place naturelle» au sein de sa «famille» veut «transcender les divisions», dixit toujours Sa Majesté qui y va de sa leçon de morale aux Africains. Un bref rappel historique culpabilise l’UA, anciennement l’OUA, qui a permis l’admission en son sein d’un «pseudo-Etat», la République arabe sahraouie démocratique (RASD), «un fait accompli immoral» donnant le beau rôle aux Marocains qui pour éviter la division du continent noir se sont sacrifiés. Cette offensive diplomatique du Makhzen menée au pas de charge est l’aboutissement de sa stratégie africaine mise savamment en plan à travers un rapprochement avec les pays africains à coups d’effacement des dettes et de renforcement des relations bilatérales.
Mohamed VI ne se cache pas et son ton volontairement optimiste laisse penser que les équilibres au sein de l’UA ne sont plus les mêmes. Une terminologie triomphaliste dans le discours du souverain qui ambitionne de bousculer l’ordre établi de l’intérieur même de la citadelle africaine s’arrogeant le droit de parler en son nom. «L’Afrique institutionnelle ne peut supporter plus longtemps les fardeaux d’une erreur historique et d’un legs encombrant», écrit-il encore appelant à «écarter les manipulations, le financement des séparatismes». L’allusion est claire et directe visant en premier lieu l’Algérie. Cette déclaration de guerre qui ne dit pas son nom se cache derrière l’émergence d’une solution, estime le roi, sous la supervision du Conseil de sécurité des Nations unies, une instance quadrillée par les soutiens du Maroc, la France en tête de pont.
Le message de Mohamed VI n’a pas à être analysé ni décortiqué, loin du second degré cher aux commentateurs. Il est clair, sans fioriture. Le Maroc va revenir au sein de l’UA et l’avenir même de la RASD au sein de cette dernière est remis en question. Que va être la réaction des autres pays ? Les prochains jours nous le diront.