Au sud du Maroc se trouve 266 000 m² considérés comme « territoire non autonome » par l’ONU : le Sahara occidental. Depuis le départ des colons espagnols en 1976, aucun statut définitif n’a pu être trouvé puisque ces terres sont revendiquées à la fois par le Maroc – qui administre 80% du territoire – et la République arabe sahraouie démocratique (RASD, non reconnue), proclamée il y a quarante ans par le Front Polisario, mouvement politique et armé créé pour lutter contre l’occupation espagnole. Et depuis quatre décennies, la situation est au point mort et fait grimper les tensions entre le Maroc et l’Algérie, pays voisin qui soutient l’indépendance.
De l’occupation espagnole à l’annexion marocaine
En 1884, l’Espagne place le Sahara occidental sous son protectorat. Cette présence dure jusqu’en 1975, année de la mort de Franco. A ce moment-là, les espagnols se retirent unilatéralement. L’ONU le leur demandait depuis dix ans afin de pouvoir engager des discussions avec le Maroc, qui revendiquait le territoire. Mais en 1976, les Sahraouis proclament la RASD, appuyés par l’Algérie. Les Marocains ne reconnaissent pas cette république et entreprennent une annexion de ce territoire. Ils vont faire face à une opposition armée mais, aidés par les USA dans les années 80, ils mettent en place une zone tampon qui court sur plus de 1 000 km avec un dispositif de mines. Commence alors une forme de guerre froide. Une situation qui n’est toujours pas réglée aujourd’hui dans la mesure où tous les acteurs campent sur leurs positions.
Le Sahara occidental et ses villes principales. Crédit : Gribeco
Un territoire riche et donc… convoité
Si le Sahara occidental est un espace désertique, il est également plein de richesses. C’est en partie ce qui explique l’intérêt du Maroc pour ce territoire. L’ayant annexé, le royaume profite déjà grandement de ses ressources. Avec 1200 kilomètres de côtes, la région est l’une des plus poissonneuses au monde. Ce qui a permis au Maroc d’y réaliser 78% de ses captures, pour 17% du PIB des « provinces du Sud », le nom donné par les Marocains au Sahara occidental.
Un autre enjeu important est celui des phosphates, très présents dans la zone. A l’échelle mondiale, ils sont rares et très recherchés puisque utilisés en agriculture pour les engrais. Grâce aux infrastructures mises en place au Sahara occidental, le Maroc tirait de cette exploitation 6% de son PIB en 2012. Avec le territoire annexé, le royaume comptabilise les plus importantes ressources mondiales.
De difficiles relations Maroc/Algérie
Le Maroc et l’Algérie sont rivaux en ce qui concerne la conquête de l’espace saharien. Et ils l’étaient avant même que les Espagnols aient quitté le Sahara occidental. En 1963, les deux pays s’affrontaient déjà dans la guerre des Sables pour délimiter leur frontière dans le Sahara. A cette époque, le Maroc revendique une partie de l’Algérie que le pays nouvellement indépendant n’entend pas céder. Le conflit se joue aussi autour des ressources de l’espace convoité après la découverte d’importants gisements de pétrole et de minerais.
Après plusieurs mois, le Maroc finit par abandonner ses revendications et une frontière sera tracée. Mais le souvenir de cette guerre reste et c’est pourquoi l’Algérie est aujourd’hui le principal soutien des Sahraouis. Même si la frontière entre les deux est fermée depuis 1994, l’Algérie accueille de nombreux réfugiés.
Une impossible mission de l’ONU ?
Les Nations unies sont présentes au Sahara occidental depuis 1991 à travers la Minurso, une mission spéciale qui avait pour mandat d’origine de surveiller le cessez-le-feu et d’organiser un référendum libre pour que les citoyens décident s’ils veulent être Marocains ou indépendants. Mais cette dernière mission a été perdue de vue et l’ONU affirmait en avril 2015 qu’aucune solution politique n’était en vue.
En effet, difficile de faire avancer le règlement du conflit quand le Maroc fait tout pour préserver le statu quo. Début mars, le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, était en visite à Bir Lahlou, dans une zone du Sahara occidental contrôlée par le Front Polisario.
A cette occasion, il a utilisé le terme « occupé » en parlant de la présence marocaine dans le Sahara. Ce qui n’a pas manqué d’irriter le roi Mohammed VI, qui a annoncé une semaine plus tard la réduction de sa contribution à la Minurso, signe qu’il ne ferait pas d’efforts pour aller vers une résolution du conflit. Le 22 mars, l’ONU annonçait la fermeture de son bureau de liaison militaire à Dakhla, réclamée par Rabat. Un désengagement problématique puisqu’un éventuel accord ne pourra se faire sans volonté marocaine.
http://chronosmag.fr/2016/03/23/le-sahara-occidental-un-conflit-gele-depuis-quarante-ans/