Après le voyage de Mohammed VI à Laâyoune occupée, Bruxelles installe un périmètre de sécurité avec le Maroc
Federica Mogherini retire le filet de l’UE
De notre bureau de Bruxelles, Aziouz Mokhtari
Mohammed VI est à Laâyoune au Sahara occidental colonisé pour peser sur le rapport de force en vue de l’ouverture, prochaine et certaine, des négociations avec le Polisario. Bruxelles prend ses distances.
En à peine quelques semaines, le roi du Maroc a effectué deux visites surmédiatisées au Sahara occidental colonisé. Très affaibli à l’international, à cause, justement, de son entêtement à vouloir imposer une marocanité à des territoires non-autonomes, relevant de la doctrine des Nations-Unies en matière de décolonisation. Pourtant, cette descente royale sur Laâyoune mérite, clairement, d’être analysée froidement.
Autour du monarque marocain au palais royal à Rabat, deux lobbies présentaient des arguments pour ou contre aller à Laâyoune.
C’est, paradoxalement, l’état-major de l’armée qui portait la thèse de l’éloignement de Mohammed VI de la gestion du dossier, en ces temps politiques «difficiles» et «incertains» sur la notion des «provinces du sud» (Sahara occidental, ndlr).
Les militaires, au contact du réel, du concret, des réalités, savent, pertinemment, que les populations sahraouies des territoires occupés n’ont pas peur des bidasses marocaines en folie répressive folle. Appuyés par les rapports des renseignements, les chefs de l’armée conseillent au roi de faire de la politique, de gagner du temps, de tergiverser quitte à accepter de rencontrer des délégations du Polisario.
Mohammed VI semblait, à l’évidence, convaincu par l’argumentaire de la caserne. Il charge deux de ses principaux conseillers de prendre langue, secrètement, avec des responsables de l’Union européenne pour leur faire part de la «volonté marocaine d’opter pour la sagesse» et de négocier avec le Polisario.
Les Européens consultés restent, cependant, sceptiques et mettent en garde Rabat contre le louvoiement. «Une négociation, a précisé Federica Mogherini (numéro 2 de la Commission européenne et gestionnaire pour les 28 du dossier sahraoui, ndlr), est une négociation, il est dangereux et contre-productif de vouloir discuter en dehors des bases juridiques de l’ONU».
La responsable des relations extérieures et de la sécurité commune de l’UE savait de quoi elle parlait. Et comment ! Les envoyés spéciaux de Mohammed VI avaient, effectivement, laissé entendre que les discussions avec le Polisario pouvaient avoir lieu mais en dehors de «toute pression».
Comprendre, ne pas s’engager sur le plan de paix onusien, sur le principe du référendum d’autodétermination et sur le statut définitif du territoire.
Federica Mogherini, Italienne chevronnée et évaluant les chances, nulles, de la doléance marocaine, oppose un non poli, néanmoins ferme, à Rabat.
Le roi du Maroc sollicite, ensuite, Paris pour forcer la main à Alger et à Tifariti pour contribuer à la «nouvelle initiative de paix». Les Français refusent et disent à leurs interlocuteurs pourquoi. Ni les Sahraouis, ni les Algériens, ni aucun Etat au monde d’ailleurs ne s’aventureraient à «parrainer» une telle offre qui mènera vers l’impasse, pire, ranimera de vieux démons.
L’Elysée et Matignon profitant de l’occasion pour signifier à l’officier du renseignement marocain, chargé par le roi de sonder Hollande et Valls sur l’affaire, de transmettre à son monarque le message à peu près suivant : «Il est temps pour le Maroc de penser, sérieusement, à régler le dossier sahraoui conformément au consensus international».
Les Français précisent, ensuite, qu’ils n’opposeraient plus, dorénavant, leur «veto» à des résolutions contraignantes pour le Maroc sur le Sahara occidental.
Après l’échec de cette option dite politique, les faucons civils dont les agents israéliens, montrent la voie, la seule qui vaille à leurs yeux, celle de l’intransigeance et du «Sahara marocain pour l’éternité», à l’image de «Jérusalem, capitale éternelle d’Israël». Mohammed VI colérique, sanguin, incapable de faire la part des choses, opte dès lors pour la fuite en avant.
Mohammed VI travaille, dorénavant, comme un trapéziste sans filet. Attention à la chute…
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