Des journalistes de Libération, TF1, L'Express et Le Point rémunérés par le Maroc

Hocine Adryen
Certains journalistes des plus gros titres de la presse française
sont aujourd’hui éclaboussés par une sombre affaire de pots-de-vin versés par le royaume chérifien. Après les révélations de dessous-de-table reçus par des journalistes de Libération, TF1, L’Express et le Point de la part de la monarchie marocaine, cette fois-ci il s’agit d’une nouvelle affaire de corruption qui touche la presse française.
Des échanges de mails ont été diffusés, depuis octobre 2014, par un hacker marocain, Chris Coleman. Ils informent de liens de connivence entre des éditorialistes de la presse française et des membres du pouvoir marocain, qui auraient aussi versé plusieurs milliers d’euros à des journalistes, à plusieurs reprises. 
A cela s’ajoutent des séjours passés dans des hôtels du royaume. Des révélations qui ternissent davantage l’image de la presse française et qui remettent sur la table des débats la fiabilité des informations livrées par ces médias, concernant bien entendu le Maroc, ses pseudos réalisations et les attaques en flux tendu contre l’Algérie. 
L’objectif pour Rabat était que ces médias diffusent, en France, la position officielle sur la question du Sahara occidental. Depuis le mois d’octobre dernier, un twitteur marocain, Chris Coleman, diffuse des informations compromettantes sur un système de corruption au sein de la monarchie au Maroc. 
Les journalistes français auraient été encouragés à défendre la position de la monarchie contre la lutte que mène le Front Polisario au Sahara occidental.
L’organisation sahraouie milite pour l’indépendance de cette ancienne colonie espagnole depuis 1975. Ce système de corruption aurait été organisé notamment par le directeur de la rédaction de l’Observateur du Maroc, en lien avec les services de renseignements marocains : les journalistes étaient grassement payés pour la rédaction d’éditoriaux dans le quotidien. José Garçon, Mireille Duteil et Vincent Hervouët ont la particularité d’avoir publié chacun entre 22 et 26 chroniques, rien qu’entre janvier et octobre 2014, en s’abstenant à chaque fois d’évoquer la situation intérieure marocaine. 
Coleman s’est mis à dévoiler des centaines de documents, datant parfois de plusieurs années, se rapportant à des ordres de virement et des correspondances confidentielles, internes au gouvernement. Des membres de la famille royale sont visés ainsi que plusieurs ministres, comme celui des Affaires étrangères, Salaheddine Mezouar, accusé de trafic d’influence. 
Des diplomates, des sociétés privées, les services de renseignements marocains de la Direction générale des études et de la documentation (DGED) sont aussi mis en cause ainsi que des journalistes locaux et étrangers, notamment français, accusés d’avoir été corrompus pour défendre la position du pouvoir marocain sur le Sahara occidental.
Ahmed Charaï, l’homme-lige du roi
Dans un droit de réponse adressé au Nouvel Observateur, suite à la publication d’un article qui évoque son rôle dans le recrutement de mercenaires de la plume au service du makhzen, le directeur de la publication de l’Observateur du Maroc, Ahmed Charai, celui qui sert de lien entre le palais royal et les journalistes, confirme ses relations intimes avec les journalistes français dont les noms apparaissent dans les « câbles » diffusés par le hacker marocain. 
Ahmed Charaï reconnaît à demi-mot ses liens étroits avec les journalistes cités plus loin dans un droit de réponse publié intégralement par le Nouvel Observateur : « En vingt ans, j’ai pu lier des amitiés un peu partout dans le monde. Les quatre journalistes que vous citez me font l’honneur de leur amitié. Ils collaborent avec mes supports depuis plus d’une décennie. » 
« Leurs carrières respectives parlent pour eux, leur indépendance ne peut être mise en doute », a-t-il indiqué, assumant ainsi ses rapports étroits avec Vincent Hervouët, rédacteur dans la chaîne de télévision française LCI, Dominique Lagarde, journaliste au service monde de l’Express, Mireille Duteil, rédactrice adjointe au service monde du Point et José Garçon, journaliste à Libération. Ahmed Charaï reconnaît aussi être membre de plusieurs think tanks américains qui font souvent du lobbying en faveur du régime marocain. « Aux USA, je suis membre du conseil d’administration de plusieurs think tanks ». 
Au passage, il s’attaque également et comme de coutume à l’Algérie qu’il accuse d’être derrière ces fuites, en estimant que ses « positions » gênent « les barbouzes algériens ». Ahmed Charaï assure avoir toujours eu des « amis » israéliens. « Je défends la solution des deux Etats et j’ai des amis dans les deux camps (Israël et Palestine) et j’en suis fier. Plus, je continuerai à entretenir mes rapports avec ces personnalités politiques palestiniennes et israéliennes, qui peuvent faire avancer la paix », dit-il fièrement. 
Un aveu en bonne et due forme ?

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