Il lui a offert gracieusement 3 000 tonnes de fertilisants (156 conteneurs), provenant des gisements de Bou Crâa, une ville du Sahara Occidental, sous occupation marocaine.
Mais cela ressemble à ce que l’on appelle un «cadeau empoisonné». Les 156 conteneurs de fertilisants qui ont été livrés depuis plusieurs mois se trouvent, à ce jour encore, en souffrance dans un port panaméen. Ce don a été accordé avant l’investiture, le 1er juillet 2014, de l’actuel président panaméen, Juan Carlos Varela, élu le 4 mai dernier, et la mise en place du nouveau gouvernement du Panama. C’est, visiblement, une combine concoctée par l’Agence marocaine de coopération internationale à travers l’ex-ambassadeur panaméen à Rabat qui a géré cette affaire sans en faire part à personne dans son ambassade ni informer son successeur.
Résultat : le ministère panaméen des Relations extérieures qui vient à peine de s’enquérir de ce don et n’en avait jamais été informé auparavant se retrouve avec une fâcheuse affaire sur les bras, car il s’agit de payer, aux autorités portuaires privées, les frais d’entreposage qui s’élèvent à un million de dollars. Cette histoire rocambolesque a été révélée par un hacker marocain qui vient de dévoiler sur la toile des documents confidentiels du ministère marocain des Affaires étrangères. Selon cette source, le gouvernement panaméen, dans l’impossibilité de régler la facture, et pour arrêter les dégâts – le montant à payer augmente avec la durée de l’entreposage -, a proposé au Maroc de vendre… ce don à une compagnie privée à un prix dérisoire juste pour récupérer le million de dollars et s’acquitter des frais d’entreposage.
La vice-présidente et ministre des Relations extérieures du Panama, Mme Isabel de Saint Malo de Alvarado, en a parlé au ministre marocain des Affaires étrangères, en marge des travaux de la 69e session de l’Assemblée générale des Nations unies. Comme dans toutes les affaires scabreuses, c’est naturellement l’opacité sur toutes les étapes de la transaction et tout cela laisse penser aux procédés utilisés par la mafia qui agit de cette manière pour couvrir ses activités de blanchiment. Il s’agit de se débarrasser des pièces administratives compromettantes liées à cette livraison de phosphate qui est devenu encombrant sur les quais d’un port panaméen.
Extraction illégale de posphate par le Maroc à Bou Crâa. D. R.
Le don de phosphate pour le Panama est dans le même registre que la corruption de journalistes occidentaux, ces mercenaires de la plume payés par le Makhzen pour dénigrer l’Algérie. C’est un «axe» qui fait partie de la démarche marocaine comme on peut le lire dans un des documents confidentiels dévoilés par le hacker : «Distiller au niveau des relais officieux (journalistes, universitaires, parlementaires, etc.), un message sceptique à l’égard de l’EP (est-il l’homme de la situation ? Peut-on faire le renouveau du processus politique avec le même EP ?, etc.)». «EP» veut dire «envoyé personnel» et, tout le monde l’aura compris, c’est Christopher Ross qui est visé.
Houari Achouri