Hafida Ameyar, journaliste par devoir

Tout a commencé pour elle en 1994, cette économiste de formation a vécu un problème familial qui l’a encouragé a bousculer sa vie. 
Dans le secteur économique depuis 1981, elle voulait changer de cap, transformer son quotidien, et quel autre métier que celui de journaliste, dans une presse jeune, revendicative, dynamique aurait pu lui assurer cette métamorphose !
En décembre 1994, Hafida rejoint l’équipe du Matin «on sentait que l’Algérie était au bord du précipice, pour moi, c’était une nécessité d’apporter quelque chose, me rendre utile, le journalisme était un monde qui ne m’était pas inconnu de par des amis journalistes mais en même temps je ne l’avais jamais investi de la sorte. 
Au Matin où j’ai fais mes premiers pas, il est vrai que j’avais des appréhensions au début mais je crois que la situation dans le pays était tellement bouleversée avec le terrorisme et les assassinats qu’on savait , nous journalistes, que ce qu’on écrivait allait apporter quelque chose, tout ce qui était autour du papier tels, la correction, réduction, faute de style n’avait pas d’importance ».
Hafida n’avait-elle pas peur d’investir le métier au moment où les journalistes constituaient la cible privilégiée des terroristes ? «Avec du recul je crois qu’on ne réfléchissait pas du tout à cette terreur qui s’était installée. 
Un seul objectif, sauver la République 
On vivait au jour le jour on n’avait pas le temps de réfléchir ou d’avoir peur, et quand ça nous arrivait on ne s’attardait pas trop, parce qu’il y’avait urgence, c’était une question de survie tout risquait de basculer définitivement, donc il me semble que la question ne se posait même pas ». Ce qui a par contre été une déchirure pour Hafida c’est son éloignement de sa famille, de sa maison, de son milieu «les sites sécuritaires étaient notre planche de salut. On ne pouvait pas rentrer chez nous mais en même temps cet éloignement me bouleversait», nous confie Hafida qui re fusait toutefois de baisser les bras, son caractère bien trempé la poussait vers l’avant «j’ai comme devise qu’on avance grâce aux déchirures et aux épreuves, ce n’était pas facile de gérer cette coupure, se retrouver d’un coup loin de la famille n’est pas évident, mais d’un autre côté cela nous a appris a se prendre en charge. Dans ce chaos qui nous terrorisait, on a appris a être libre».
Hafida estime que quoi qu’on puisse dire sur la presse privée, «dans les moments les plus durs du pays, elle était présente, elle n’a pas déserté. Il y avait un problème en Algérie, et cette presse était là, avec ses lacunes, son manque de professionnalisme peut-être, mais il y avait une situation d’urgence, et cette presse l’a gérée avec les moyens du bord». Hafida admire chez les journalistes de l’époque, leur dynamisme, leur jeunesse, leur liberté d’esprit et leur fraîcheur.
«A l’époque du terrorisme, cette presse est venue répondre à un besoin, celui de defender la République algérienne. Maintenant que les choses se sont normalisées, on se rend compte qu’effectivement, c’est une presse privée au sens réelle du terme, c’est des patrons c’est le capital, c’est le rapport à l’argent», regrette avec amertume Hafida qui exerce aujourd’hui au quotidien Liberté.
« Ne faut-il pas redéployer la presse aujourd’hui ? ». «Avec l’ouverture de la presse au privé, dans les années 1990, la presse privée a naturellement trouvé sa place pas nécessairement de manière professionnelle et objectif mais cette presse a remplit un vide même si aujourd’hui, tout le monde sait que cette presse privée répond souvent à des logiques tels que des partis politiques, d’hommes d’affaires, de l’argent …ce qui fait naître des problèmes de déontologie et d’éthique». Hafida espère que les nouvelles instances qui se mettent en place pour organiser un tant soit peut la presse, puissent renverser cette tendance de presse partisane et mettre fin à certains dépassements de la presse publique, comme de la presse privée et certains manquements à la déontologie.
Par ailleurs, la journaliste regrette qu’il n y ait pas actuellement un véritable débat sur l’avenir de la presse «est ce que le rôle de la presse écrite est terminé devant l’émergence en force des réseaux sociaux ? Cette presse devrait-elle se redéployer ? s’interroge Hafida qui déplore qu’il n y’ait pas réellement une discussion là-dessus.
En plein terrorisme et même en plein chaos «on échangeait énormément entre journalistes et avec les responsables mais aujourd’hui les gens se recroquevillent de plus en plus et on a l’impression qu’on est dans une situation d’impuissance dans la mesure que les rapports aujourd’hui se tournent sur des préoccupations tels que l’argent au détriment de la réflexion sur la presse écrite , normalement celle-ci doit être repensée avec ce qu’il y’a eu comme bouleversement et en même temps nous ne sommes plus a l’ère et la décennie 90, nous somme en 2014 et donc il y a de nouveaux objectifs et de nouveaux défis a relever».
Autant Hafida est passionnée et fervent quand il s’agit de parler de son métier, du journalisme, de la presse, autant elle déviant réservée et hésitante quand on aborde sa vie personnelle.
Hafida n’aime pas parler d’elle, de sa vie, de son quotidien sont intimement liés a sa passion, le journalisme, l’écriture «personnellement, j’ai pris très au sérieux mon travail de journaliste». Au dépend de sa vie privée ? «C’est vrai, que personnellement j’ai pris très au sérieux mon travail de journaliste et c’est vrai aussi, que mon travail influence considérablement sur ma vie privée, mais contrairement à avant ou l’on n’avait pas de temps à nous, les choses ont changé et me concernant, elles se sont améliorées» 
Hafida reconnaît que c’est grâce à la presse et au journalisme qu’elle a pu se construire professionnellement et investir une autre passion qui lui tenait a cœur, l’écriture. «La presse m’a apporté l’échange, la rencontre, la réflexion. Elle m’a permis aussi de réaliser certaines ambition par exemple l’écriture, donc j’ai édité deux livres même si je suis un peu frustrée, car j’aurais voulu faire plus et j’espère le faire. La presse est un milieu qui me convient, malgré la dégradation que ce milieu là est en train de connaître».
F. L.
El Moudjahid, Octobre 2014

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