Un peu de sérieux !
Par Kamel Moulfi
Après son ministre des Affaires étrangères, Salah-Eddine Mezouar, qui ne s’est pas gêné du tout pour donner libre cours à ses divagations, c’est au tour du chef du gouvernement marocain, Abdelilah Benkirane, de dire, lui aussi, son mot sur le Sahara Occidental que le Maroc occupe, sur l’OUA qu’il a désertée et sur l’Algérie, motif de sa jalousie obsessionnelle. Il est allé plus loin que son ministre dont les errements ont pourtant révélé un aveuglement rare pour quelqu’un qui dirige la diplomatie de son pays. Benkirane a saisi l’opportunité de l’entretien qu’il a accordé à la chaîne de télévision américaine Al-Hurra, arabophone, pour raconter n’importe quoi sur des questions importantes qui nécessitent d’être traitées avec un minimum de sérieux.
Le chef du gouvernement marocain use de contrevérités qui portent sur des faits relativement récents et n’hésite également pas à tordre le cou à l’histoire pour s’en prendre à l’Algérie. Il veut faire avaler à l’opinion publique l’idée que l’admission de la République arabe sahraouie démocratique (Rasd) au sein de l’OUA a été une erreur qui sera corrigée. Il faut croire que cette erreur a la peau dure, puisque l’entrée de la Rasd au sein de l’organisation panafricaine, à l’occasion de son 20e sommet à Addis-Abeba, date de 1984, trente ans tout de même. L’erreur, si c’en était une, aurait pu être rectifiée au moment du remplacement de l’OUA, dissoute en 2002, par l’Union africaine (UA). Or, celle-ci n’a pas modifié la position de la Rasd qui reste membre de l’UA. Benkirane doit comprendre ce que le Polisario ne cesse d’expliquer, à savoir que le Sahara Occidental est un «territoire occupé», dont le gouvernement légitime est la République arabe sahraouie démocratique ; il doit se résigner à admettre le droit d’autodétermination du peuple sahraoui et lui reconnaître la possibilité de s’exprimer dans un référendum.
L’UA a montré qu’elle sait ce qu’elle fait, en nommant un envoyé spécial pour le Sahara Occidental. Benkirane ne veut pas regarder la réalité des faits en face. Tant pis pour lui.
K. M.