« Enfants de nuages, la dernière colonie » : le conflit oublié du Sahara occidental

Ce documentaire ne nous est pas parvenu sans heurts. Sa sortie sur le territoire français est restée longtemps incertaine, en raison de son sujet politiquesulfureux : le sort du peuple sahraoui et son droit à l’autodétermination. Face à d’éventuelles frictions diplomatiques – qu’il n’a d’ailleurs pas manqué de susciter, la France étant directement mise en cause dans le film pour sa collusion avec leMaroc -, les distributeurs hypothétiques se sont montrés frileux.
Ces tensions se sont exprimées encore plus vivement lors de la venue à Paris, en février, de l’acteur Javier Bardem. Porte-parole de la cause sahraouie, il est venu accompagné d’une délégation, afin d’interpeller le monde politique français et la presse sur le scandale, lié à ce peuple abandonné de tous. A ses côtés se tenait Alvaro Longoria, le réalisateur du film, plus connu pour ses activités de producteur. Il a, dans ce cadre, financé les deux volets du Che de Steven Soderbergh, avant de passer pour la première fois à la réalisation avec Enfants des nuages.
RÉCIPIENDAIRE D’UN GOYA EN 2013
Ce film engagé, récipiendaire d’un Goya en 2013 (l’équivalent de nos César enEspagne) affiche une volonté pédagogique manifeste, qui prime sur une forme qu’on aurait aimé plus ambitieuse. La narration vient en renfort d’images d’archives et de témoignages bouleversants de victimes de la répression marocaine. Elle donne aussi au film son caractère violemment émotionnel. Impossible de ne pas être scandalisé, au terme de la projection, par la condition terrible de ce peuple, dont le vaste territoire est au centre de toutes les revendications.
Le Sahara occidental fut, jusqu’en 1976, une colonie espagnole. Depuis quarante ans, la région est à l’origine d’un conflit entre le Maroc, convaincu de sa souveraineté, et de l’Algérie qui a apporté son soutien au Front Polisario, constitué d’indépendantistes.
Les opposants au gouvernement marocain continuent de subir une répression violente, dans le plus grand mépris des droits de l’homme. 
Depuis 2008, l’acteur espagnol Javier Bardem (dont la mère œuvrait avant lui en direction des femmes sahraouies), est allé à la rencontre des hommes politiques du monde entier pour les rallier à cette cause, ce que montre le documentaire.
CONJURER LEUR DOULEUR DE PEUPLE DÉRACINÉ
On voit, à ce titre, l’acteur prendre la parole à l’ONU. Il partage également le quotidien de réfugiés sahraouis, en vivant avec eux dans leur camp. Pour conjurerleur douleur de peuple déraciné, il leur a organisé un festival de cinéma, auquel prit part l’actrice Victoria Abril, la narratrice du film. Mais l’acteur, oscarisé pour son rôle dans No Country for Old Men des frères Coen, n’entend pas se servir de ce combat pour sa gloriole personnelle.
Humblement, il s’efface derrière des personnalités comme Aminatou Haidar, une militante sahraouie, qui fut séquestrée et torturée par la police marocaine, à maintes reprises. Le film n’occulte rien des compromis diplomatiques et des défaillances politiques. Il renvoie surtout chaque spectateur à sa conscience de citoyen.
http://www.lemonde.fr/culture/article/2014/04/29/enfants-de-nuages-la-derniere-colonie-le-conflit-oublie-du-sahara-occidental_4408478_3246.html

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