Sahara occidental : Dernier pays colonisé en Afrique

Par Meriem Ali MARINA
Un Sahara marocain ?
Une pure illusion à laquelle continuent de croire les Marocains qui s’avèrent, avec le temps, mauvais élèves en histoire de l’humanité. Car dans les faits, l’Espagne s’est emparée de la région en 1884 sous le commandement du capitaine Emilio Bonelli Hernando. En 1900, une convention déterminant la frontière sud du Sahara « espagnol», était signée entre la France et l’Espagne. Deux ans plus tard, la France et l’Espagne ont signé une autre convention qui démarquait les frontières du Sahara occidental. Quatre-vingt-dix ans plus tard, faisant face à une révolte de la population locale au Sahara occidental qui ne s’est jamais laissé faire, l’Espagne signe un accord tripartite avec le Maroc et la Mauritanie, lequel accord donne lieu à une invasion marocaine des territoires du Sahara occidental après que Hassan II, alors roi du Maroc, eut tourné le dos à la déclaration de la Cour internationale de justice de La Haye qui était pourtant claire à ce propos : en réponse à la première question, la Cour a répondu : Non. Le Sahara occidental n’était pas une «terra nullus». Le Sahara occidental appartient à un peuple « habité par des peuples, lesquels, si nomades, étaient socialement et politiquement organisés en tribus et menés par des chefs habilités à les représenter ». En d’autres termes, la CIJ a déterminé que le Sahara occidental appartenait à une population autochtone, les Sahraouis, au moment de la colonisation espagnole. Hassan II décide ainsi d’occuper un pays voisin, le Sahara occidental. Trente milles Marocains entament ainsi, ce qu’ils ont appelé «la Marche Verte». Le Coran dans une main, l’emblème rouge frappé d’une étoile au centre dans une autre, ils entament ce qui allait se transformer par la suite en un drame pour tout le peuple sahraoui, pourtant né libre. C’est le début d’un colonialisme marocain qui s’est illustré depuis, par toute forme d’exactions, de tortures, d’interdiction de libertés mais surtout de spoliation illégale des ressources naturelles du Sahara occidental. 
Le Maroc face à ses violations des droits de l’Homme 
Le Maroc ne cesse de revendiquer la souveraineté de ce vaste territoire situé entre ses frontières sud, celles de l’Algérie, et le nord de la Mauritanie. La hantise humaine de gouverner a fait du Sahara occidental un coin où tous les maux sont réunis. Les violations des droits humains au Sahara occidental n’est pas un vain mot. La situation perdure au vu et au su de la communauté internationale. Les exemples ne manquent nullement. Ils sont édifiants. La découverte récente de fosses communes dans les territoires sahraouis occupés remet en effet, à l’ordre du jour, la question des crimes que commettent les autorités marocaines à l’encontre du peuple sahraoui, au mépris de la légalité internationale concernant le respect des droits de l’homme. Les dépassements marocains ont été ainsi mis à nu par la découverte, début 2013, de deux fosses communes dans la localité de Mkala, près de Smara, et non loin du «mur de la honte», selon les révélations de Omar Abdesslam, président de l’Association des familles des prisonniers et disparus sahraouis (Afapredesa). Les restes de 60 corps au moins, dont des enfants, y ont été trouvés et l’identification de 9 d’entre eux a permis d’établir qu’il s’agissait de civils sahraouis exécutés par les forces marocaines lors de l’invasion puis l’occupation du Sahara occidental. Le gouvernement sahraoui a appelé, à maintes reprises, à casser le blocage médiatique imposé par le Maroc dans les territoires sahraouis occupés où des violations systématiques des droits de l’Homme et une répression aveugle et sauvage sont commises à l’égard des populations locales. Les violations marocaines concernent aussi le non-respect des lois internationales, en entravant notamment le travail des organisations de défense des droits de l’Homme. Face à une situation qui semble s’inscrire dans le temps, l’Afapredesa a exprimé sa «profonde préoccupation» pour la persistance des violations des droits de l’Homme perpétrées par les forces marocaines depuis le 31 octobre 1975, date de l’invasion du territoire du Sahara occidental. Au lendemain de la découverte des fosses communes début 2013, l’Afapredesa a présenté un rapport sur la situation des droits de l’Homme au Sahara occidental comportant des données scientifiques émanant de médecins légistes et d’experts généticiens et confirmant l’implication des troupes d’occupation marocaines dans l’ensevelissement de disparus sahraouis dans des fosses communes. A elles seules, ces preuves «suffisent pour une action internationale face aux allégations de l’occupant marocain sur le dossier des droits de l’Homme», pense le président de l’association sahraouie, appelant les Nations unies à assumer leur responsabilité pour permettre aux familles des victimes d’exercer pleinement leur droit à la vérité d’autant que cette occupation s’est, également, « soldée par des milliers de victimes des graves et systématiques violations des droits de l’homme qui se poursuivent à ce jour » ne cessent de le répéter les Sahraouis. «Plus de 4.500 cas de disparitions forcées, dont plus de 550 toujours non élucidés, 30.000 cas de détention arbitraire et plus de 30.000 cas de torture dont près de 55% de femmes et d’enfants», ont été enregistrés en 38 ans d’occupation, a affirmé dans une déclaration à l’APS, Omar Abdesslam, président de l’Association des familles des prisonniers et disparus sahraouis (Afapredesa). Il a fait également état de «plus de 1.550 jugements iniques par des tribunaux civils et militaires marocains, et plus de 1.300 civils morts, dont plus de 200 personnes (la majorité des femmes et des enfants) durant le bombardement au napalm et au phosphore blanc en février 1976 ainsi que 2.500 victimes des mines antipersonnel posées par les forces marocaines».
Le makhzen dos au mur 
Rien ne se cache plus à la communauté internationale s’agissant des violations marocaines des droits de l’Homme dans les territoires occupés du Sahara occidental. Une des « fortes inquiétudes » exprimées récemment à cet égard par le Congrès américain. La parlementaire Betty Mc Cullum avait fustigé les autorités marocaines sur les actes de répression et d’abus qu’elles continuent de pratiquer en citant les différents rapports établis par plusieurs organisations internationales des droits de l’Homme (Amnesty international, Human Rights Watch, RF Kennedy Center…) ainsi que la presse américaine. La poursuite des violations des droits de l’Homme par les forces marocaines contre les Sahraouis «est clairement rapportée par les organisations des droits de l’Homme», avait-elle souligné. Elle avait affirmé également que les Sahraouis continuaient à être traqués et emprisonnés pour leur participation à des manifestations réclamant leur droit à l’autodétermination, et dont certains ont été torturés ou soumis à d’autres mauvais traitements lors des interrogatoires par la police marocaine. De toute évidence, avait fait remarquer la parlementaire américaine devant le Congrès, « le roi Mohammed VI et son appareil de sécurité font preuve de défaillance en matière des droits de l’Homme à tel point que cela suscite l’attention croissante de la communauté internationale ». La déclaration de Mme Mc Cullum intervient quelques jours après que le Congrès eut été destinataire d’un nouveau rapport du département d’Etat sur le Sahara occidental et dans lequel il avait exprimé ses «préoccupations » face aux actes de violation et aux « restrictions excessives » perpétrés par les autorités marocaines contre les Sahraouis. Le secrétaire d’Etat américain, John Kerry, avait noté pour sa part que ces violations contre la population sahraouie compromettaient leur « droit d’exprimer pacifiquement leurs opinions concernant le statut et l’avenir du Sahara occidental» et entravaient l’accès des territoires sahraouis aux organisations des droits de l’Homme, aux journalistes et aux représentants de gouvernements étrangers. Dans la même optique, un comité africain de coordination de la solidarité de la société civile du continent avec le Sahara occidental avait été créé à Abuja, la capitale nigériane à l’issue des travaux de la Conférence africaine de solidarité avec la lutte du peuple sahraouie. Cette task force regroupe un noyau de six pays, à savoir l’Afrique du Sud, l’Algérie, le Bénin, le Cameroun, le Kenya et le Nigéria. La task force, selon la déclaration dite d’Abuja, est responsable de la coordination des activités du Mouvement africain de solidarité avec l’indépendance du Sahara occidental. De plus, la Déclaration d’Abuja avait lancé un appel pressent à l’Union africaine (UA) pour imposer des sanctions économiques, militaires et diplomatiques contre le Maroc à l’exemple de celles prises contre le système d’apartheid en Afrique du Sud.
Le Président Bouteflika remet les pendules à l’heure 
Le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, avait jugé à Abuja (Nigéria) « plus que jamais d’actualité » la nécessité de mettre en place un mécanisme de suivi et de surveillance des droits de l’Homme au Sahara occidental en lutte pour son indépendance depuis près de 40 ans. « La nécessité de la mise en place d’un mécanisme de suivi et de surveillance des droits de l’Homme au Sahara occidental est plus que jamais d’actualité», avait indiqué le Président Bouteflika dans un message à la Conférence africaine de solidarité avec la cause sahraouie, lu en son nom dans la capitale nigériane par le ministre de la Justice garde des Sceaux, Tayeb Louh. « L’Algérie demeure à cet égard convaincue que l’élargissement de la mission de la Minurso à la prise en charge par les Nations unies de la surveillance des droits de l’Homme au Sahara occidental est une nécessité », avait ajouté le chef de l’Etat. « Ce recadrage de la mission de la Minurso permettra aux Nations unies de jouer pleinement leur rôle en matière de surveillance des droits de l’Homme au Sahara occidental et ce faisant, complètera le mandat de la Minurso qui, faut-il le rappeler, est la seule mission de maintien de paix des Nations unies à ne pas englober les droits de l’Homme dans son mandat », avait-il souligné. Pour le Président Bouteflika, la mise en place de ce mécanisme de suivi et de surveillance des droits de l’Homme dans les territoires sahraouis occupés est d’autant plus nécessaire que « l’organisation des Nations unies particulièrement le Conseil de sécurité sont, au quotidien, interpellés par les souffrances qu’endure le peuple du Sahara occidental depuis près de quarante années ». « Les violations massives et systématiques des droits de l’Homme, qui ont lieu à l’intérieur des territoires occupés, pour réprimer la lutte pacifique des citoyens pour la liberté d’association, de manifestation et d’expression, ne sauraient laisser la communauté internationale indifférente », a soutenu le chef de l’Etat. Le Président Bouteflika avait, à ce propos, renouvelé le soutien de l’Algérie à la cause sahraouie, précisant que « l’Algérie, qui s’est toujours pleinement investie dans le combat libérateur des peuples, notamment sur notre continent, continuera de soutenir le peuple du Sahara occidental dans sa lutte pour le recouvrement de ses droits ». Il avait assuré, en outre que, « l’Algérie continuera en tant que pays voisin des deux parties en conflits, le Front Polisario et le Royaume du Maroc, à apporter son appui et son soutien aux efforts du secrétaire général de l’ONU et de son envoyé personnel, Christopher Ross, visant à aider les deux parties en conflit à parvenir à une solution qui pourvoit à l’autodétermination du peuple du Sahara occidental à travers l’organisation d’un référendum libre et régulier, sous les auspices des Nations unies ». Dans son message, le chef de l’Etat avait rappelé que la question du conflit du Sahara occidental, reconnue unanimement comme étant une question de décolonisation, est inscrite à l’ordre du jour de l’ONU depuis près d’un demi-siècle, affirmant que ce conflit ne peut trouver de solution que dans l’application de la résolution 1514 de l’Assemblée générale de l’ONU. « Toute autre approche, qui viserait à imposer le fait accompli colonial en niant le droit du peuple du Sahara occidental à l’autodétermination, constituerait une grave violation du droit international et irait à l’encontre de la doctrine des Nations unies en matière de décolonisation », avait-il averti. Pour le Président Bouteflika, « la seule solution, juste et durable, est celle qui permettrait au peuple sahraoui d’exprimer librement et souverainement son choix et, au-delà, aux peuples de la région de réaliser leur rêve de voir émerger enfin un espace maghrébin prospère fondé sur les principes de la complémentarité et de l’équilibre des intérêts ». Le chef de l’Etat avait signalé que la Conférence de solidarité d’Abuja intervient dans le sillage de la décision adoptée en mai dernier par la Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union africaine (UA) à l’occasion du sommet du cinquantenaire de l’organisation continentale. Chose, comme beaucoup d’autres d’ailleurs, que n’arrive toujours pas à admettre M6 qui s’en prend comme à chaque fois à notre pays.
Le délire de Mohamed VI 
Persistant dans son attitude d’hostilité envers l’Algérie, le Palais royal avait décidé, dans la soirée du mercredi 23 octobre dernier, de rappeler son ambassadeur à Alger «pour consultation». Ce rappel de l’ambassadeur est venu ainsi s’ajouter à une série d’attaques médiatiques virulentes contre notre pays. Qu’est-ce qui fait donc courir le palais royal en privilégiant toujours l’escalade verbale et en recherchant les actes à même d’entretenir et de perpétuer la tension avec l’Algérie ? Comme justificatifs à cet acte, pour le moins inamical et déplacé, Rabat revient sur l’appel lancé par le Président Bouteflika à Abuja, lors de la conférence sur le Sahara occidental, pour mettre en place un mécanisme international de suivi et de surveillance des droits de l’Homme au Sahara occidental. Il est pourtant clair que le Maroc fait dans la répression dans ce territoire, que les Sahraouis sont persécutés et que toute velléité de remettre en cause la colonisation marocaine est immédiatement étouffée dans la violence. A maintes reprises, l’armée marocaine par ses agissements a été épinglée et mise au banc des accusés. Forums internationaux, ONG, associations, partis politiques de plusieurs capitales dénoncent ces violations des droits de l’Homme au Sahara occidental. L’Algérie n’a fait, chaque fois, que joindre sa voix à celle de tous ceux qui refusent le déni de justice au peuple sahraoui réclamant son droit à l’autodétermination. Pour le Président Bouteflika, « la mise en place d’un mécanisme de surveillance des droits de l’Homme est d’autant plus nécessaire que l’ONU et particulièrement le Conseil de sécurité sont au quotidien interpellés par les souffrances qu’endure le peuple sahraoui depuis près de quarante années ». Face à ces vérités et à court d’arguments, Rabat a commencé à réagir par des commentaires et autres virulentes attaques médiatiques contre l’Algérie. Cela n’a pas suffi. Un autre palier dans l’entretien de la tension diplomatique avec Alger vient d’être franchi avec le rappel de l’ambassadeur du Maroc. Du côté d’Alger, l’on prend note avec «regret» de la décision de marocaine. «Cette décision injustifiée constitue une escalade malencontreuse qui s’appuie sur des motifs fallacieux et attentatoires à la souveraineté de l’Algérie, dont les positions de principe sur les questions régionales et internationales ne sont susceptibles d’aucune remise en cause sous l’effet d’interférences étrangères», a souligné le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué. Le MAE a dans ce contexte rappelé que la position de principe de l’Algérie sur le nécessaire parachèvement de la décolonisation du Sahara occidental n’a jamais varié et le discours prononcé à Abuja par le ministre de la Justice, garde des Sceaux, ne fait que rappeler la constance de cette position qui est non seulement connue mais largement soutenue par l’Union africaine, le Parlement européen, ainsi que par de nombreux autres acteurs internationaux. «La campagne ininterrompue de dénigrement de l’Algérie, menée avec acharnement par une partie de la classe politique marocaine, relayée et amplifiée par les médias publics de ce pays, est contraire aux relations de fraternité, de coopération et de bon voisinage entre les deux pays», a-t-on encore précisé. Cette campagne «préméditée et cette escalade procèdent manifestement de la pratique connue visant à la bilatéralisation d’une question qui relève de la responsabilité des Nations unies», avait-on écrit dans le même communiqué. «L’Algérie, en ce qui la concerne, maintient en place l’ensemble de ses missions diplomatiques et consulaires dans le royaume du Maroc, ainsi que les chefs desdites missions qui poursuivent normalement leurs activités. Elle forme le ferme espoir que cet épisode malheureux dans le cours des relations algéro-marocaines pourra être contenu dans sa juste dimension et être rapidement dépassé», avait conclu le communiqué. 
Que cherche réellement le Maroc ?
Alors que sa présence et sa politique de répression au Sahara occidental sont de plus en plus critiquées et dénoncées par la communauté internationale, le roi du Maroc, à court d’arguments, s’en prend, une nouvelle fois, à l’Algérie sur le terrain des droits de l’Homme ! Le roi feint d’ignorer que les organisations internationales dénoncent, chaque jour que Dieu fait, le calvaire des Sahraouis dans les territoires occupés par l’armée et la police marocaines. Au moment où l’on croyait dissipé le différend entre les deux pays, créé de toutes pièces par Rabat, avec le retour de l’ambassadeur du royaume à Alger, Mohamed VI ouvre une nouvelle brèche dans ses propos incendiaires à l’encontre de l’Algérie. Il revient sur le discours du président de la République avec plus d’hostilité et de contrevérités. S’exprimant à l’occasion de la commémoration de la «Marche verte» sur les territoires occupés du Sahara occidental, en 1975, Mohammed VI a fait valoir que «quiconque souhaite surenchérir sur le Maroc n’a qu’à descendre à Tindouf, et observer dans nombre de régions alentour, les atteintes portées aux droits humains les plus élémentaires». Le roi fait référence, en toute évidence, aux camps de réfugiés sahraouis situés dans cette vaste région du pays visités à maintes reprises par de nombreuses délégations internationales. Ces dernières n’ont pourtant à aucun moment évoqué la violation des droits des réfugiés sahraouis qui sont traités dans le strict respect du droit international des réfugiés, du droit humanitaire et des droits de l’homme. Un programme d’assistance a même été réorienté pour leur bien- être dans les secteurs de la santé, de la nutrition et de l’éducation. «Les camps de réfugiés ne nous appartiennent pas, nous ne sommes que des invités, et pourtant, nous nous sentons plus libres ici», avait confié une jeune activiste sahraouie au magazine américain The Nation. Qu’en est-il, par contre, de la situation des droits de l’homme dans les territoires occupés où les Sahraouis vivent des conditions pénibles et où des cas de torture, de la répression systématique, des agressions et des exécutions extrajudiciaires sont rapportés quasi quotidiennement par des ONG internationales ? Le souverain chérifien a par ailleurs accusé les «adversaires» du royaume de recourir «à l’argent» et à d’autres «avantages» pour tenter «d’acheter les voix et les prises de position de certaines organisations hostiles». «Ils dilapident de la sorte les richesses et les ressources d’un peuple, que cette question ne concerne pas mais se dresse plutôt comme une entrave à l’intégration maghrébine», a-t-il ajouté. Ces allégations mensongères qui peinent à tenir la route car totalement infondées, interviennent quelques jours avant une visite (reportée) à Alger puis à Rabat du secrétaire d’Etat américain, John Kerry. Il s’agit de donner un peu de consistance à la thèse marocaine de plus en plus isolée sur la scène internationale sur cette question. Ces déclarations illustrent clairement la panique, l’incohérence et l’irresponsabilité dans laquelle sont les hautes autorités marocaines. En tout état de cause, il est judicieux de se poser une question primordiale: pourquoi le Maroc tient-il à sa politique expansionniste et persiste dans sa stratégie coloniale ? 
Un conflit, des appétits 
Pour les spécialistes, la réponse est claire. Un pays, comme le Maroc, qui ne dispose d’aucune ressource naturelle autre que le tourisme et le cannabis – premier producteur mondial –, se voit contraint d’aller chercher des richesses ailleurs, quitte à spolier celles du peuple sahraoui. C’est dire que l’enjeu est économique. Le Sahara occidental possède les eaux parmi les plus poissonneuses du monde avec de nombreuses espèces très recherchées: crevettes, céphalopodes, thons, sardines et crustacés. Cette richesse halieutique a suscité la convoitise des armateurs européens, notamment espagnols, qui ont cherché à acquérir des droits de pêche dans les eaux des pays tiers pour compenser la diminution des ressources halieutiques dans l’Union européenne. Des accords de pêche ont été signés par l’Union européenne avec de nombreux pays. L’accord UE-Maroc était le plus important avec des compensations financières d’un montant de 500 millions d’euros dont le Maroc se sert pour acheter de nouveaux équipements militaires pour renforcer le mur de défense et réprimer le peuple sahraoui. Ces fonds européens servent également à plusieurs chefs militaires marocains qui ont « investi » dans le secteur de la pêche. Une étude publiée récemment confirme la spoliation des richesses naturelles, notamment halieutiques, du Sahara occidental par les autorités marocaines, avec la complicité de sociétés européennes. « Le Maroc vient en tête des pays arabes et africains en matière de pêche, toutefois 72% des ressources halieutiques sont pêchées par les navires marocains dans les eaux territoriales sahraouies », a indiqué l’ingénieur sahraoui, le Dr Ghali Zoubir, spécialiste en géologie et pétrole dans une étude rapportée par l’Agence de presse sahraouie (SPS). L’étude fait également état d’une exploitation « effrénée » des ressources halieutiques sahraouies par l’administration de l’occupation marocaine. La quantité de poissons pêchés dans la région de Rio de Oro dépasse de 13 fois celles extraites par l’Espagne en 1975 dans les eaux territoriales sahraouies. La moyenne d’exploitation des ressources halieutiques a dépassé 122% entre 2000 et 2004 générant au trésor marocain un profit de 2,3 milliards de dollars par an, a indiqué le spécialiste. Ajouter à cela l’exploitation illégale du phosphate sahraoui sachant que la dernière colonie africaine dispose d’un sol riche en phosphates (parmi les premiers fournisseurs mondiaux).
Des enjeux géopolitiques
La résolution du conflit incombe à l’ONU, « mais la clé de sa résolution est entre les mains de la France et des Etats-Unis qui, même s’ils ne reconnaissent pas la souveraineté du Maroc sur le territoire, ont permis à ce dernier de conforter sa position », estime Yahia H. Zoubir, professeur en relations internationales et management à Euromed, directeur de recherche spécialiste en géopolitique dans son ouvrage intitulé : Le conflit du Sahara occidental : enjeux régionaux et internationaux. Selon ce spécialiste, les ingrédients qui favorisent le statu quo « sont contenus dans les résolutions onusiennes, qui réaffirment le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui et encouragent, en même temps, ce dernier à rechercher avec le Maroc une solution politique mutuellement acceptable ». Autrement dit, chaque partie a un droit de veto, même si l’avantage est accordé au Maroc. Et là, faudrait-il le noter, la France demeure l’obstacle majeur à toute solution juste au conflit du Sahara occidental. Aucun des gouvernements qui se sont succédé aux destinées de ce pays depuis 1975, n’ont caché leur opposition à un Etat sahraoui qui serait indépendant. Ils (les Français) en avaient leur propre vision. Laquelle émergence est perçue comme un facteur de déstabilisation du Royaume chérifien, au sein duquel la France a d’énormes intérêts, politiques, économiques, militaires et culturels. « Avec près de 70 % du total des investissements étrangers directs au Maroc, la France en est le premier partenaire commercial et le principal investisseur », lit-on encore dans l’ouvrage du professeur en relations internationales et management à Euromed. Une position qui n’a pas changé d’un iota avec la venue des socialistes au pouvoir. Jugeons-en : « La position de la France reste inchangée concernant le dossier du Sahara », a déclaré récemment, à Rabat, Pascal Canfin, ministre français chargé du Développement, cité par l’agence marocaine, MAP, à l’issue d’un entretien avec Youssef Amrani, ministre marocain, délégué auprès du ministre des Affaires étrangères et de la Coopération. «Nous appuyons (…) le plan d’autonomie marocain qui est pour nous la seule proposition crédible sur la table des négociations », a-t-il souligné. S’agissant des USA, il y a eu des moments, comme à la fin des années 1980, où les Etats-Unis n’étaient pas défavorables à l’émergence d’un Etat sahraoui indépendant. A priori, les USA ne sont pas opposés à l’exercice du droit à l’autodétermination des peuples, mais pour le cas du Sahara occidental, ce sont les considérations géopolitiques qui ont dicté l’attitude américaine. En 2003, les USA étaient favorables au Plan Baker II, par lequel les Sahraouis auraient bénéficié d’une autonomie, pendant une période de cinq ans, avant la tenue d’un référendum d’autodétermination incluant l’indépendance parmi les trois options soumises. Les Marocains s’y sont opposés, malgré l’avantage numérique des colons marocains sur le territoire. A l’époque, l’Administration Bush avait promis de l’imposer au Conseil de sécurité. La menace du veto de la France a fait reculer les Etats-Unis, en pleine guerre d’Irak. Une fois de plus la France galope au secours des Marocains et là, il est légitime de se poser la question du pourquoi du comment.
La France, toujours force coloniale ?
L’Italie a lâché la Libye, la Grande-Bretagne, l’Egypte et l’Inde mais la France n’arrive toujours pas à admettre que l’Algérie est un pays indépendant. Un pays qui a arraché sa liberté au prix fort contrairement au Maroc, à qui, l’indépendance a été offerte justement pour s’occuper de l’Algérie. La France, cinquante et un an après, cherche toujours un moyen d’exercer une pression sur l’Algérie qui milite pour l’autodétermination des peuples. Les exemples ne manquent pas. Ils sont édifiants. A citer, à titre illustratif, la ferme franco-marocaine Tawarta. Construite en 2002, elle est la seule ferme située sur la péninsule de l’Oued Eddahab, à environ 11 km de la ville de Dakhla occupée. Toutes les autres fermes sont situées dans les terres, de l’autre côté de la baie. La société possède deux sites de Tawarta sur la péninsule, l’un pour les cultures sous serre, et l’autre pour la culture sur la terre. Les plantes cultivées sur la terre sont principalement des cultures fourragères, en particulier la luzerne pour la production laitière intensive. La vocation de Tawarta est la production de melons et de tomates, hors-sol et sous serres. A Dakhla, la société possède l’un des plus grands champs de tomates – cerise et cocktail du « Maroc ». Une fois que les tomates sont cueillies, elles sont immédiatement transportées au quai de chargement pour être transférées à Agadir, à 1 200 kilomètres au nord. Après un voyage de 20 heures, le produit est stocké à Agadir avant d’être exporté à l’étranger, étiqueté comme « marocain ».
Des positions irréconciliables
Depuis 1991, date à laquelle les protagonistes ont accepté le plan de paix de l’ONU incluant un cessez-le-feu et la tenue d’un référendum, toutes les tentatives pour organiser la consultation référendaire ont échoué. Le Maroc s’est toujours opposé à l’intégration de l’option d’indépendance et à tout processus référendaire basé sur l’autodétermination, qu’il qualifie de « pratique obsolète ». Sous les auspices de l’envoyé personnel du Secrétaire général pour le Sahara occidental, des représentants des deux parties, ainsi que des représentants de la Mauritanie et l’Algérie, se sont réunis lors de deux phases de négociations facilitées par les Nations unies dans la banlieue de New York en juin et en août 2007. Malgré la persistance de positions divergentes, le dialogue renouvelé a permis des négociations directes entre les parties au conflit. Une troisième série de négociations a eu lieu en janvier 2008 et les parties se sont réunies en vue de nouvelles consultations informelles en août 2009 et en février 2010. Toutefois, aucune de ces réunions n’a permis de réaliser d’avancée sur les questions de fond. Trois ans après, c’est le statu quo. Un statu quo qualifié « d’insoutenable et de dangereux » dans le contexte de la montée de l’extrémisme, du terrorisme et de la criminalité organisée dans la région du Sahel, par l’envoyé personnel du Secrétaire général de l’ONU, pour le Sahara occidental. « Le conflit sur le statut final du Sahara occidental dure depuis 37 ans, donc depuis bien trop longtemps », avait affirmé Christopher Ross à Madrid, à l’issue d’un entretien avec le ministre espagnol des Affaires étrangères. « S’il est tentant pour certains d’affirmer qu’il est trop risqué de relancer les efforts de paix et que le statu quo garantit au moins la stabilité, je suis convaincu que cela serait une erreur grave, particulièrement alors qu’il est menacé par la montée de l’extrémisme, du terrorisme et des éléments criminels dans la région du Sahel », a-t-il expliqué. « Si la situation est laissée en l’état, les violences pourraient reprendre avec des conséquences tragiques pour le peuple sahraoui et l’ensemble de l’Afrique du nord », a prévenu M. Ross. « Le conflit doit être résolu et cela est possible s’il existe une volonté réelle d’engager le dialogue et de faire preuve de compromis pour trouver une solution acceptable pour tous. J’exhorte toutes les parties prenantes à s’engager au plus vite dans des négociations sérieuses », a-t-il souligné en demandant aux membres de la communauté internationale qui exercent une influence dans la région de soutenir ces efforts. Ainsi, l’analyse de Christopher Ross laisse présager de nouvelles surprises. La reprise des armes par les Sahraouis demeure la plus plausible. Un état de fait qui viendra compliquer davantage la situation dans la région qui a du mal à se remettre de tous ces groupuscules qui agissent en maîtres absolus dans le Grand Sahara. Pour le Maroc et son allié de toujours, la France, ce serait l’occasion idéale de faire encore une fois une démonstration de force. De retour dans la région, une année après, (après la visite d’octobre 2012) l’Envoyé personnel du Secrétaire général de l’ONU pour le Sahara occidental, Christopher Ross, a présenté au Conseil de sécurité son compte rendu sur la question sahraouie en suggérant le lancement de négociations basées sur des « échanges bilatéraux discrets et séparés » entre lui et chacune des deux parties au conflit (Maroc et Front Polisario). M. Ross a tenu ces consultations à huis clos avec l’organe de décision de l’ONU suite à la tournée qui l’a mené du 7 au 25 octobre dernier dans la région. Selon le communiqué publié par l’ONU à l’issue de cette réunion, M. Ross a informé le Conseil de sécurité qu’il avait l’intention de retourner dans la région dans les prochaines semaines afin de poursuivre « une nouvelle approche qui permette de mettre fin à ce conflit » dans les territoires sahraouis occupés.
M. A. M.
El Djazaircom.dz, Janvier 2014
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