Oui au plan d'autonomie marocain et à une solution mutuellement acceptable : Contorsions américaines sur le Sahara Occidental

par Salem Ferdi
Le Roi Mohamed VI est allé chez Barack Obama à la Maison Blanche où il a obtenu ce qu’il pense être l’essentiel : un renouvellement du soutien, déjà formulé par l’ancienne ministre des Affaires étrangères, Hillary Clinton, au plan d’autonomie marocain pour le Sahara Occidental. L’équilibrisme américain avec une légère préférence pour Rabat ne change pas. 
L’inflexion que craignait Rabat après l’arrivée de John Kerry au département d’Etat s’exprime plus en matière de demande de respect des droits de l’homme que celui… du droit à l’autodétermination des Sahraouis. Le porte-parole de la Maison Blanche, Jay Carney, a qualifié le plan marocain de «sérieux, réaliste et digne de foi» avant même la rencontre de Mohamed VI avec la président Barack Obama. Ce plan «représente une approche potentielle qui peut satisfaire les aspirations des habitants du Sahara Occidental pour diriger leurs propres affaires dans la paix et la dignité», a déclaré le porte-parole de l’exécutif américain, Jay Carney. 
Les mots sont choisis, une approche «potentielle» ne signifiant pas automatiquement une obligation de la suivre car d’autres approches existent aussi. Si la «préférence» est affirmée pour le plan marocain, les Etats-Unis n’en continuent pas moins de «soutenir les efforts pour trouver une solution pacifique, durable et mutuellement convenue, solution à la question du Sahara Occidental». 
Washington indique qu’elle continue à appuyer les négociations menées par l’Onu et la mission de l’envoyé spécial, Christopher Ross, et à «exhorter les parties à travailler à une solution». Les Américains ont néanmoins fait passer le message sur les droits de l’homme au Sahara Occidental. 
LE POLISARIO «POSITIVE»… 
Le communiqué conjoint indique que les deux parties ont «convenu de travailler ensemble pour protéger et promouvoir les droits de l’homme dans le territoire». Le dosage est subtil, mais il satisfait pleinement le Maroc. Le représentant du Polisario à Washington, Mohamed Yeslem Beisat, a choisi d’en faire une lecture positive en constatant que le communiqué commun a consacré un chapitre «spécial» à la question du Sahara Occidental au même titre que les autres volets relatifs à l’Afrique et à la paix au Moyen-Orient. Selon lui, le communiqué mentionne clairement le «peuple du Sahara Occidental» lorsqu’il évoque la question des droits de l’homme. Non sans regretter implicitement le recul des Américains sur l’extension du rôle de la Minurso à la surveillance des droits de l’homme. Le peuple sahraoui, a-t-il dit, s’attend «à ce que des mesures et des mécanismes pratiques de surveillance des droits de l’homme soient instaurés pour la mise en œuvre de ce noble engagement des Etats-Unis». A l’évidence, cela n’est pas à l’ordre du jour même si Washington marque le coup sur la question. Le Maroc obtient le maximum qu’il peut attendre : une approbation du plan d’autonomie. Ce n’est pas vraiment un «échec» pour la diplomatie algérienne, comme se sont empressés de l’écrire certains analystes. Le soutien de l’administration américaine au plan d’autonomie n’est pas une nouveauté, il a déjà été exprimé dans le passé. 
La déclaration du porte-parole de la Maison Blanche rassure cependant le roi du Maroc sur le fait que les divergences exprimées sur le respect des droits de l’homme au Sahara Occidental n’influent pas sur ce soutien. C’est largement suffisant pour le Roi Mohamed VI qui a commencé à douter des Etats-Unis après l’appel de Washington à étendre le rôle de la Minurso à la surveillance des droits de l’homme au Sahara Occidental qui avait suscité la fureur de Rabat au début de l’année. 
LE SAHARA N’EST PAS UNE PRIORITE AMERICAINE 
Du côté des Sahraouis et d’Alger, on pourrait prendre acte du fait que la Maison Blanche, même si elle trouve beaucoup de qualités au plan marocain, continue de soutenir une «solution pacifique, durable et mutuellement convenue». 
Cette notion de solution «mutuellement convenue» a été défendue par Paris après le fameux plan Baker adopté par le Conseil de sécurité, en défendant l’idée qu’aucune «solution ne doit être imposée aux parties». 
Aujourd’hui, même si le plan d’autonomie a des soutiens chez les Occidentaux, il ne peut pas non plus être imposé aux Sahraouis. Les Etats-Unis, qui avaient soutenu en son temps le plan Baker, restent dans la même posture. Ils soutiennent le «plan d’autonomie» mais ils soutiennent aussi l’idée que la solution doit être «mutuellement acceptée». 
C’est très clairement illustratif de la situation de statuquo qui règne sur le dossier, le représentant du Polisario à Washington faisant remarquer, non sans pertinence, que l’expression «approche potentielle» pour le plan d’autonomie vaut également pour les autres approches prévues par l’Onu dont le référendum d’autodétermination. Il ne faut pas s’attendre non plus à ce que Washington fasse de la question du Sahara Occidental une «priorité» de sa politique extérieure. 
Sur la question du Sahara Occidental, la politique en vigueur depuis des années se poursuit. 
Washington reste dans un «équilibrisme» avec une tendance favorable au Maroc mais sans être contraignante ou agressive pour le Polisario ou l’Algérie.
Le Quotidien d’Oran, 24 novembre 2013
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