Washington entre Alger et Rabat

Une fois de plus la position des Etats-Unis sur le dossier du Sahara occidental est sujette à une double interprétation selon que l’on se place du côté du Maroc ou de la RASD. Le petit communiqué diffusé par la Maison Blanche juste après l’audience accordée par le président Obama au roi Mohamed VI, a donné lieu à des lectures différentes.
Le Makhzen a tôt fait de mettre en avant le fait que Washington ait qualifiée son plan d’autonomie d’approche “potentielle”, crédible” voire “sérieuse”. Cela suffit à son bonheur de relancer sa propagande en interne pour faire valoir son “succès” diplomatique.
Mais a bien y réfléchir, est-ce vraiment une nouveauté dans le langage américain ? Évidemment non puisque les responsable de ce pays distribuent ces deux adjectifs depuis au moins 2007, sans jamais imposer ce fameux plan que les Sahraouis rejettent globalement et dans le détail.
Mais Washington qu’elle soit aux couleurs démocrates ou républicaines est soucieuse avant tout des maintenir les équilibres au Maghreb. En clair, il prend soin de ne pas se mettre à dos ni l’Algérie ni le Maroc qui sont ses partenaires stratégiques sur des dossiers qui ne sont pas forcément les mêmes.
“Crédible” mais… ”mutuellement acceptable”
Obama a donc une fois de plus pris le soin de couper la poire en deux s’agissant du fumeux dossier du Sahara occidental. Il a certes servi du “sérieux” et “crédible” au roi du Maroc parti sauver son Trône, mais il glisse que son administration continuera à soutenir les efforts pour trouver une “solution pacifique, durable et mutuellement acceptable à la question du Sahara occidental”.
Qu’est ce que cela voudrait dire ? Que le plan d’autonomie rejeté par les sahraouis n’est pas applicable et encore moins imposable. Mieux encore, la Maison Blance a insisté sur le “rôle des Nations-Unies” pour résoudre le conflit sahraoui, en tenant à préciser dans le communiqué que les Etats-Unis “continuent à appuyer les négociations menées par l’ONU, y compris le travail entrepris par l’Envoyé personnel du Secrétaire général de l’ONU pour le Sahara occidental, Christopher Ross”.
Tout le monde connait la position de l’ONU et celle de l’envoyé spécial de Ban Ki-Moon favorable à un mécanisme international de surveillance des droits de l’homme. Tout le monde sait aussi que, n’était-ce le droit de veto de la France, le Maroc aurait perdu la bataille avec les compliments de l’oncle Sam. Sauf que les enjeux géopolitiques de la région du Sahel et du Sahara dictent encore aux américains de ménager le choux et la chèvre suivant leur approche pragmatique liée à leurs intérêts vitaux.
Match nul…
Il faut souligner à la charge de M6 et du makhzen que le président Obama a bien précisé qu’il “exhortait les deux parties (Front Polisario et Maroc) à travailler pour parvenir à une solution”. Exit donc l’Algérie, que Rabat tente en vain de présenter comme une partie prenante du conflit pour son soutien au Polisario.
Et pour confirmer cette attitude américaine qui consiste à tenir le bâton par le milieu, la secrétaire-adjointe chargée des Affaires africaines auprès du département américain de la Défense, Mme Amanda Dory, s’est fendue le même jour (vendredi) d’une déclaration flatteuse pour les autorités algériennes. “L’Algérie constitue le “pilier” du dispositif de lutte contre le terrorisme en Afrique du Nord et l’armée algérienne assure avec succès la protection des frontières sud pour empêcher des incursions terroristes, a -elle déclaré.
Voilà deux discours typiquement américains qui ont le “génie” de contenter les frères ennemis, le même jour en plus ! Vu d’Alger ou de Rabat, les deux régimes s’en sortent à bons comptes… L’arbitre américain a sifflé match nul la confrontation à distance entre l’Algérie et le Maroc. Mais il y aura certainement des prolongation sous peu…
Par Rafik Benasseur | 23/11/2013 | 18:21

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