Sans doute fallait-il être très naïf sur le plan politique pour croire un instant, un seul, que la France allait revoir sa copie en ce qui concerne son indéfectible soutien à la politique colonialiste et criminelle du Maroc au Sahara occidental. Les propos sibyllins de Hollande, faits à propos de cette question, lorsqu’il avait choisi de visiter l’Algérie lors de sa toute première sortie vers un pays africain et arabe ne pouvaient tromper un observateur qui suit de très près un dossier aussi lourd.
Dire que la France soutient la légalité internationale, comme l’avait dit avant lui, Jacques Chirac, quand il était lui aussi en visite en Algérie, ne pouvait vouloir dire qu’une chose : Paris se contente de botter en touche, de développer des lieux communs, tout en maintenant en l’état sa politique du fait accompli. Ne soyons pas assez naïfs pour aller jusqu’à oublier que c’est depuis Paris que le « plan de large autonomie du Sahara occidental » avait été annoncé par le roi Mohamed VI. C’est également à cause de la France, membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU, que toutes les tentatives pour étendre le mandat et la mission de la Minurso au respect des droits de l’homme ont échoué.
Hollande le socialiste, au même titre que Chirac ou Sarkozy les « gaullistes » développe le même discours, à quelques nuances près, quand il s’agit de la politique étrangère de la France. Simplement parce que celle-ci se décide ailleurs, et que de puissants lobbyes transnationaux continuent de dicter leurs ordres à pas mal de chefs d’États du monde occidental. Hollande n’a donc pas déjugé son prédécesseur par rapport à sa hasardeuse guerre en Libye (curieusement soutenue par le sioniste, Bernard Henry-Levy) ni en ce qui concerne l’assassinat de Kadhafi par des troupes spéciales françaises.
Dans son mémorable discours fait ce jeudi devant le Parlement marocain, Hollande n’a vraiment pas été avec le dos de la cuillère pour annoncer son soutien partial et spécieux à un Maroc qui, peut-être n’en demandait ni n’en espérait, pas tant. Sinon, comment expliquer que Hollande soit allé jusqu’à citer le Maroc comme exemple de démocratie et de respect des droits de l’homme pour le restant des pays arabes et africains ? Le chef d’État français est-il myope jusqu’à perdre de vue le fait que les « réformes » de Mohamed VI n’étaient que de la poudre aux yeux puisqu’il a gardé les pleins pouvoirs, des pouvoirs quasi divins puisque les sujets de Sa majesté n’ont même pas le droit de juger ses actes, quand bien même ce serait pour le louer.
En matière de respect des droits de l’homme et d’indépendance de la justice il serait fastidieux de rappeler ici tous les dépassements et toutes les atteintes commises quasiment au quotidien, jusques-y compris à la liberté de la presse. Le dernier exemple en date, si l’on met de côté tous les journalistes condamnés, et les journaux et revues suspendus, mais aussi cette histoire du tôlier contraint de baiser les pieds d’un procureur de son Altesse sérénissime Mohamed VI, rappelons le cas horrible de ces femmes sahraouies massacrées, humiliées et violées par des policiers marocains à Laâyoune parce qu’elles avaient essayé de manifester pacifiquement à l’occasion de la venue de Christopher Ross, l’Envoyé spécial du Secrétaire général de l’ONU. Cela s’est passé il y a de cela à peine une semaine. Hollande ne peut l’ignorer ni l’avoir oublié. Il l’a donc volontairement occulté. Et pour cause !
Le chef d’État français, qui ose prétendre que la France aurait assumé ses responsabilité en intervenant militairement au Mali, omet simplement de dire que la guerre n’était pas la meilleure solution possible, et que la dégradation de la situation dans ce pays a été rendue possible à cause, précisément, de la guerre menée par la France contre la Libye, provoquant le retour vers leur pays de milliers de touareg lourdement armés et très bien entraînés. Bref, Hollande ne peut que se rapprocher plus encore de Rabat, royaume vassal et particulièrement servile, à qui toutes ses fautes sont pardonnées d’avance, puisqu’il avait poussé la docilité jusqu’à soutenir publiquement la guerre déclenchée par la France au Mali, et autorisé les avions de chasse hexagonaux à survoler son espace aérien pour s’en aller guerroyer au Sahel.
Hollande, on s’en doute, ne pouvait s’arrêter en «si bon chemin». Et c’est donc, tout naturellement qu’il a apporté (de nouveau) le soutien de la France au plan de large autonomie marocain alors qu’il contredit foncièrement les principes liés au droit international, ainsi que toutes les résolutions onusiennes prévoyant toutes la tenue d’un référendum d’autodétermination du peuple sahraoui…
Par Mohamed Abdoun
Le Courrier d’Algérie, 05 avr, 2013
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