Mme Aminatou Haidar a fait sa déposition, mercredi à Madrid, devant le juge espagnol, Pablo Ruiz, à la fois comme témoin et victime dans l´affaire des 562 Sahraouis disparus durant les opérations d´occupation militaire au Sahara occidental par le Maroc entre 1976 et 1987.
L´indépendantiste a dénoncé, également, devant le magistrat espagnol la pratique systématique « des séquestrations et des tortures » des militants de la cause sahraouie par les autorités marocaines qui se poursuit encore 38 ans après l´occupation du territoire du Sahara Occidental. A la sortie du tribunal, elle a déclaré avoir fait sa déposition « comme témoin et victime directe des faits » consignés dans la plainte déposée dans les années 2000 par des Sahraouis et des organisations civiles et humanitaires espagnoles contre une trentaine de hauts responsables civils et militaires marocains encore en fonction. « J´ai livré au juge des informations précises et actualisées sur les méthodes employées par le Maroc pour l’élimination ethnique du peuple sahraoui », a déclaré Aminatou Haider, à sa sortie de l´Audience nationale, la plus haute juridiction pénale espagnole où l´attendait un groupe d´activistes qui reprenait les slogans traditionnels des marches de soutien au peuple sahraoui : « Maroc coupable », « Espagne responsable ».
L´indépendantiste sahraouie a expliqué au magistrat espagnol que les « tortures et les séquestrations systématiques » des militants de la cause sahraouie par les autorités marocaines se poursuivent jusqu´à l´heure actuelle. Leurs auteurs « sont ceux-là mêmes qui avaient ordonné » son arrestation en 2005 et son « incarcération » dans la « prison noire » durant 4 ans où les « pires sévices » lui avaient été infligés avant que le gouvernement marocain ne cède aux pressions internationales et la remette en liberté. Ce sont, également, ces mêmes responsables marocains qui avaient ordonné l´assaut brutal contre le camp de protestation pacifique de Gdeim Izik en novembre 2010.
La déposition de Mme Haider devait avoir lieu le 11 mai 2011. Le magistrat espagnol de l´Audience nationale l´avait différée en raison de la dégradation de son « état de santé » des suites de la grève de la faim de 32 jours qu´elle avait observée vers la fin de l´année 2009, en signe de protestation contre son expulsion d´Al Ayoune pour avoir fait mention de sa nationalité « sahraouie » au lieu de « marocaine » à l´aéroport d´Al Ayoune.
Cette plainte contre le Maroc avait été considérée, en décembre 2007, par l´ex-juge Baltazar Garzón comme juridiquement fondée. Ce magistrat avait alors ordonné, en octobre 2008, une commission rogatoire à laquelle le gouvernement marocain n´a pas donné suite. Baltazar Garzón sera radié une année plus tard de l´Ordre des magistrats pour avoir ordonné l´exhumation des fosses communes datant de l´ère de Franco, ce qui est « un acte illégal », selon la haute Cour espagnole. L´affaire du « génocide » au Sahara occidental sera alors confiée au juge Pablo Ruiz dont l´une des premières décisions sera de demander au ministère espagnol de la Justice si le Maroc avait donné suite à la commission rogatoire décidée par son collègue.
Nassim A.
HORIZONS, 16/03/2013