(…)
72. Dans les affaires touchant la sûreté de l’État (terrorisme, appartenance à des mouvements islamistes ou appui à l’indépendance du Sahara occidental) il y a une pratique ancrée de la torture au moment de l’arrestation et pendant la détention de la part de policiers, notamment d’agents de la Direction de la surveillance du territoire (DST). De nombreuses personnes ont été contraintes à faire des aveux et condamnées à des peines d’emprisonnement sur la foi de ces aveux. Souvent, ces personnes continuent d’être victimes de violations pendant l’exécution de leur peine.
73. Lorsque la police ou d’autres autorités réagissent à des incidents survenant pendant des manifestations ou des réunions, elles font un usage excessif de la force. Que des manifestations soient autorisées ou non, les autorités doivent se conformer aux normes internationales de nécessité et de proportionnalité et respecter le droit à la vie et à l’intégrité physique.
84. En ce qui concerne Laâyoune au Sahara occidental, le Rapporteur spécial est arrivé à la conclusion que des tortures ou des mauvais traitements ont été infligés au moment de l’arrestation, dans les postes de police et à la prison de Laâyoune. Il est également arrivé à la conclusion qu’il y avait un recours excessif à la force pendant les manifestations pour l’indépendance du Sahara occidental, ainsi que des enlèvements et des abandons dans le désert de manifestants présumés pour les intimider.
85. Le Rapporteur spécial a en outre entendu des témoignages selon lesquels des violations seraient commises par des éléments non étatiques œuvrant pour l’indépendance du Sahara occidental. Tout en exprimant sa sympathie aux victimes, il note que de telles allégations ne sont pas couvertes par son mandat. Enfin, le Rapporteur spécial regrette que les réunions avec la société civile aient été surveillées par les autorités et les médias et que les caméras étaient présentes à son arrivée dans tous les lieux où il s’est rendu. À Laâyoune en particulier cela a créé un climat d’intimidation ressenti par bon nombre de personnes qu’il a interrogées pendant sa visite.
97. En ce qui concerne Laâyoune, au Sahara occidental, le Rapporteur spécial recommande au Gouvernement:
a) D’enquêter rapidement sur toutes les allégations faisant état d’actes de torture et de mauvais traitements pendant et après les manifestations et à la prison de Laâyoune; de tenir les auteurs responsables de ces actes et d’accorder une indemnisation aux victimes;
b) De reconsidérer la compétence du tribunal militaire pour connaître d’affaires concernant des civils dans le cas des 23 Sahraouis en détention à la prison 1 de Salé et de veiller à ce qu’en principe, les civils ne soient pas condamnés par des tribunaux militaires; d’ouvrir des enquêtes sérieuses et impartiales pour établir les faits exacts dans cette affaire et déterminer quelle est la responsabilité des membres de la police ou des forces de sécurité; et d’enquêter sur toutes les allégations de torture et de mauvais traitements;
c) De trouver des moyens pour renforcer encore plus la protection des droits de l’homme internationalement reconnus, notamment en invitant les mécanismes des procédures spéciales de l’Organisation des Nations Unies; en renforçant l’engagement avec la société civile et les institutions nationales des droits de l’homme; et en facilitant la présence des organisations internationales non gouvernementales;
d) La région tout entière tirerait profit de l’établissement d’un mécanisme régional intergouvernementales de surveillance des droits de l’homme, robuste, comme une mesure importante visant à instaurer la confiance et qui peut contribuer à améliorer la situation en ce qui concerne le respect des droits de l’homme et, en particulier, l’interdiction de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.