‘Les tribus du nord (‘sahraouis’) sont des mauritaniens de fait et de droit

Aujourd’hui sur la toile, des voix s’élèvent contre le fait que des supposés sahraouis auraient été recensés dans le cadre de la campagne de mise en place en Mauritanie d’un Registre des Populations et des Titres Sécurisés. 
Tout d’abord deux remarques s’imposent: la première est que cette information, qui ne repose que sur du ouï-dire, émane en premier lieu du site Alakhbar, dont on connait aujourd’hui la position biaisée à l’égard du régime en place à Nouakchott; la deuxième remarque, et non la moindre, est que seuls les membres de la diaspora afro-mauritanienne se déchaînent en réaction à cette information. 
Mais, à supposer, pour les fins de la discussion, que cette information repose sur un quelconque élément de vérité, les populations du Nord de la Mauritanie (sahraouis par étiquetage tribal) n’ont-elles pas droit à la revendication et à l’obtention de la nationalité de leur pays? D’entrée de jeu, je réponds par l’affirmative.
Car, la Mauritanie, malgré les tentatives de certaine élite afro-mauritanienne de vouloir l’asphyxier dans sa dimension méridionale et négroïde, ne se limite pas à la ceinture du fleuve du Sénégal. La Mauritanie, la vraie, c’est celle de la « toundra » qui va de Tiris-Zemour aux abords sablonneux de Oualatâ. Oui, l’histoire même de ce pays nous en dit long à cet égard. Pour rappel, la Mauritanie a toujours prétendu avec raison, que les tribus du Nord (sahraouies selon certains) font partie intégrante de l’ensemble mauritanien dans sa dimension culturelle, sociale et identitaire. 
Cet ensemble qui est le Bilad-Chinguetti, se caractérise d’abord et avant tout par un groupement humain lié à la fois par une communauté de langue, de mode de vie et de religion, qui a su se développer au sein de tribus non constituées en Imarats (ex.: Regueibat, Oulad Bousbaa, Oulad Dleim, l’Aroussiyine, Ahl-Barikalaa, etc…) et les Imarats à proprement parler, soit celles du Tagant, du Trarza, du Brakna et de l’Adrar. Cette dernière était à la fois le centre de cet ensemble mauritanien et le carrefour de ses échanges. 
Si bien qu’elle est devenue le pôle d’attraction des grands nomades du Sahara. Alors, peut-on aujourd’hui soutenir valablement que les descendants de ces tribus n’ont pas droit à la nationalité mauritanienne? Je m’insurge catégoriquement! Les populations de ces tribus existent et peuplent ce pays avant même l’existence de l’État mauritanien. 
Comment voulez-vous que cet État les privent de leurs droits ancestraux? Entre cette négation et son arbitraire, il n’y a qu’un pas que seuls certains extrémistes de la franche afro-mauritanienne veulent bien franchir, sans état d’âme et avec un esprit égoïste assumé. Que des individus pour des motifs de circonstances, seraient parti au Polisario ou que d’autres seraient parti au Maroc, cela ne change rien au fond. Bien sûr, c’est regrettable. Pour autant, cela ne les prive pas de leurs droits.
Faut-il le rappeler, que c’est justement sur ce principe du droit que l’opération de l’enrôlement a été mise en place. Comme on le sait, la Loi N° 1961-112, Loi portant code de la nationalité mauritanienne, est on ne peut plus claire. Sous le titre 2, très évocateur, « De la nationalité mauritanienne d’origine », l’article 8 (non amendé en 2010) nous dit qu’il est mauritanien celui ou celle dont le père ou la mère est mauritanienne.
Donc, toute personne qui établit cette preuve irréfragable est en droit d’être recensée. Raison pour laquelle on exige dans les centres d’enrôlement une preuve d’identité des parents, exigence contre laquelle s’insurgent aujourd’hui certaines organisations extrémistes mauritaniennes (http://cridem.org/C_Info.php?article=637774).
Sinon, comment contester le bon sens, qui plus est, conforme aux termes même de la loi, votée il y a cinquante et un ans? Il est donc bien injuste et inéquitable de reprocher aux autorités mauritaniennes chargées de l’enrôlement de permettre aux ayants droit, d’ou qu’ils viennent, d’établir ou de conserver leur nationalité mauritanienne. Je pense qu’il faut, comme on dit, « rendre à César ce qui appartient à César ». 
Me Takioullah Eidda, avocat Québec, Canada
Source : Me Takioullah Eidda
CRIDEM, 4/1/2013
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