Sa visite «s’inscrit dans le cadre des efforts déployés pour relancer le processus visant à trouver une solution politique définitive et consensuelle au différend régional autour du Sahara».
Rabat lui avait unilatéralement retiré sa confiance au mois de mai dernier. Indifférent aux pressions marocaines, Ban Ki-moon n’a toutefois rien voulu savoir et l’a maintenu à son poste. Il faut dire aussi que Washington qui, à ce jour, observe une certaine neutralité sur le dossier du Sahara occidental, l’a âprement défendu. Lui, c’est l’actuel émissaire spécial du secrétaire général de l’ONU pour le Sahara occidental, Christopher Ross. Le Maroc – qui n’a visiblement pas l’habitude d’être remis aussi brutalement à sa place – l’avait désavoué quelques semaines après la publication d’un rapport de l’ONU qui l’avait longuement critiqué. Mais face au niet tranchant de la communauté internationale, Rabat se voit aujourd’hui contraint de se déjuger et d’accueillir l’ancien diplomate américain dans ses palais.
Christopher Ross est, en effet, arrivé samedi au Maroc pour de nouvelles négociations. Ce fut palpable, ce n’est pas de gaieté de cœur que les autorités marocaines l’ont reçu, lui qui a réussi à leur provoquer une crise de nerfs et à mettre fin à l’impunité dont elles bénéficiaient jusque-là.
Contrairement aux usages marocains qui veulent que les responsables importants doivent être reçus en grande pompe, les autorités marocaines ont d’ailleurs été peu disertes sur cette visite. Elles se sont contentées de l’annoncer via un bref communiqué diffusé par l’agence de presse officielle MAP, sans fournir d’explication sur leur revirement. Un revirement que de nombreux observateurs n’ont pas hésité à qualifier de «déculotté». La visite de M. Ross «s’inscrit dans le cadre des efforts déployés pour relancer le processus visant à trouver une solution politique définitive et consensuelle au différend régional autour du Sahara», a indiqué jeudi le MAE marocain. La tête visiblement ailleurs, la presse marocaine – qui a également soigneusement évité de reparler du revers diplomatique essuyé par le royaume en avril au Conseil de sécurité de l’ONU – s’est limitée à relayer mécaniquement la dépêche de la MAP. L’ONU avait annoncé, il y a une semaine, que l’émissaire onusien allait se rendre «en Afrique du Nord et en Europe du 27 octobre au 15 novembre».
La solitude du roi Mohammed VI
De quoi sera-t-il question lors des discussions qu’aura Christopher Ross avec les responsables des pays concernés de manière directe ou indirecte par le Sahara occidental ? Le porte-parole du secrétaire général de l’ONU, Martin Nesirky, avait indiqué que «l’accent sera mis sur les échanges de vue avec les interlocuteurs-clés sur la manière d’accélérer les progrès vers l’objectif central énoncé dans les résolutions successives du Conseil de sécurité, en d’autres termes, une solution politique mutuellement acceptable, qui permette l’autodétermination du peuple du Sahara occidental».
Y a-t-il vraiment une chance que les choses bougent maintenant que les principaux facteurs de blocage ont été identifiés ? Si les responsables du Front Polisario ont réitéré jeudi qu’ils ne feront aucune concession concernant le principe de l’autodétermination, le ministre marocain délégué aux Affaires étrangères et à la Coopération, Youssef Amrani, a affirmé, de son côté, dans un entretien au quotidien Le Soir Echos, que le Maroc demeurait «engagé de bonne foi» à négocier «à partir de l’initiative d’autonomie (…)».
Dans une tentative de sauver la face et, surtout, de montrer que le Maroc n’a pas été ébranlé par la série de camouflets diplomatiques essuyés par le roi Mohammed VI, M. Amrani a cru important de dire que «la communauté internationale la qualifie de sérieuse, crédible et réaliste». Dans les faits, il se trouve que plus personne ne soutient vraiment le «plan marocain d’autonomie». La remarque vaut peut-être aussi pour la France de François Hollande qui estime le moment venu de passer à autre chose eu égard à la situation de blocage qui caractérise le dossier du Sahara occidental. C’est précisément l’élément qui, actuellement, provoque des nuits blanches aux décideurs marocains. Tout cela ajouté à un profond sentiment de solitude.
Zine Cherfaoui
El Watan, 29 oct 2012
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