C’est un peu la lettre de la victime à son bourreau que cette missive politique du président de la République sahraouie, Mohamed Abdelaziz, adressée hier au président français François Hollande. Une lettre à la texture pathétique, mêlant appel de détresse au rappel d’un mensonge historique appelé MINURSO, Mission des Nations unies pour un référendum au Sahara Occidental… Alors qu’il n’y a jamais eu de consultation électorale depuis le déploiement en 1991 de cet organe onusien neutralisé par la duplicité de la politique étrangère française notamment ! Qu’attendre du nouveau président français après tant d’années de compromission de son pays avec le royaume chérifien dans ce conflit. Qu’attendre de la part d’une ex-métropole qui n’a jamais su établir des relations dignes de l’ère postcoloniale avec les Etats de son empire africain perdu ? Il n’y a malheureusement pas grandchose à espérer de Paris quand Madrid, qui occupa jadis le territoire légitimement revendiqué par les Sahraouis, parvient à prendre plus de recul par rapport à ses intérêts que la France. Une France qui continue de salir son image en abusant du droit de veto au Conseil de sécurité pour protéger l’occupant tortionnaire marocain de toutes sanctions ou de surveillance internationale contre ses exactions avérées ?
Il est à craindre que, comme dans un thriller de série B, la victime s’en soit remis à un flic voyou, un de ces ripoux complices du criminel dont elle aurait voulu se plaindre. A moins qu’une prise de conscience salutaire de l’opinion publique française pousse le gouvernement français à rééquilibrer sa position dans un contentieux où elle est devenue partie au lieu de conserver un rôle d’arbitrage inhérent aux médiateurs naturels. Cela s’est passé de la sorte en Espagne, ce qui explique selon certains analystes le bicéphalisme chronique des autorités espagnoles quant à la question sahraouie.
En attendant que la France en arrive à cette sage modération, qui devrait profiter à la fois aux Sahraouis et aux Marocains empêtrés dans une crise que leur violence militaire ne peut pas étouffer, le président Mohamed Abdelaziz devra peut-être adresser ses lettres de vérité au peuple français. C’est peut-être ce qu’il a déjà fait par cette missive devenue ouverte puisque rendue publique, avec une teneur pédagogique au sujet de la grandeur de la diplomatie française à faire rougir les profs de sciences politiques parisiens.
N. M.
Le Jeune Indépendant, 18 sept 2012
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