Le bilan «UMA» est suffisamment terne pour qu’on comprenne que les miracles sont inutiles et ne remplacent ni le travail ni la volonté. Pour faire le Maghreb, il ne suffit pas que les opinions en aient envie. Il faut aussi que ceux qui détiennent les commandes le veuillent et le souhaitent. Et se parlent au moins. Il n’y a pas eu de sommet maghrébin depuis 1994, cela veut dire que cela fait dix-huit ans que l’on se boude ; même si au demeurant dans les occasions on ne se prive pas, protocolairement, de faire assaut d’amabilités et de convictions maghrébines. Tout comme la démocratie spécifique a créé sa langue de bois dans chacun de nos pays, l’UMA a secrété aussi sa langue de bois. A la fête du trône, le président Bouteflika ne rate pas l’occasion d’adresser un message à Mohammed VI lequel n’oublie jamais de marquer l’anniversaire du 1er Novembre.
C’est vrai qu’il y a eu une tentative de dialogue au sommet qui est restée sans lendemain au cours de ces dix-huit dernières années. Une période où des jeunes Maghrébins ont grandi et s’éveillent à un monde en mouvement sans avoir des repères. Et sans avoir de structures. Le bilan est si peu reluisant que la simple tenue d’un nouveau sommet de l’UMA, près de deux décennies plus tard après le dernier, était vue en soi comme un «progrès» sans préjudice de ses éventuels résultats. C’est d’ailleurs dans cette optique que le président tunisien, maghrébin convaincu, a choisi d’agiter des idées – les 5 libertés – et surtout d’œuvrer à ce que le sommet se tienne. Quitte à ce qu’il ne soit que l’amorce d’un début laborieux. Il y avait d’ailleurs ces derniers mois dans les sphères dirigeantes des pays du Maghreb comme une sorte de volonté de ne pas faire le rabat-joie. Ce n’est désormais plus le cas.
Le Premier ministre marocain a décidé, probablement sur instruction du roi, de jeter un froid en affirmant que les conditions de la tenue d’un sommet n’étaient pas réunies. En réalité, elles risquent de ne jamais être réunies si l’on continue à formuler des exigences «préalables» qui ne font que figer la situation et entretenir le statuquo. Sans le dire de manière directe, le Premier ministre marocain laisse entendre que pour qu’un sommet maghrébin se tienne, il faut d’abord rouvrir les frontières entre l’Algérie et le Maroc. On est toujours dans la logique de perte de temps qui consiste à bloquer l’UMA en croyant pouvoir faire changer d’avis l’autre partie. C’est une «condition» qui est tout simplement contreproductive et elle n’ouvrira pas la frontière.